Première séance du mardi 13 octobre 2020
- Présidence de M. Richard Ferrand
- 1. Communications de M. le président
- 2. Questions au Gouvernement
- Vaccins contre le covid-19
- Violences à l’encontre des policiers
- Reprise de l’épidémie de covid-19
- Néonicotinoïdes
- Justice de proximité
- Système de soins
- Fiscalité écologique
- Pauvreté
- Violences à l’encontre des policiers
- Malus écologique automobile
- Conditions de travail des soignants
- Échéance des concessions autoroutières
- OPA de Veolia sur Suez
- Situation dans le Haut-Karabakh
- Soutien aux associations sportives
- Reconnaissance du covid-19 comme maladie professionnelle pour les soignants
- Nombre de lits de réanimation
- Vaccination obligatoire des personnels de santé
- Gestion de l’épidémie à l’école
- Verdissement des garanties à l’export
- Politique sanitaire
- Directeurs d’école
- Immeuble Le Signal de Soulac-sur-Mer
- Protection des données personnelles
- Tempête Alex dans les Alpes-Maritimes
- Stratégie du Gouvernement dans les territoires ruraux
- 3. Projet de loi de finances pour 2021
- Première partie (suite)
- Après l’article 2
- Amendements nos 1371 et 1872
- M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
- Amendements nos 1888, 2665, 2643, 268, 728, 1782, 451, 1156, 1118, 1596, 1584, 1734, 1822, 2437, 2861, 2863, 2744, 860, 859, 219, 883, 884, 1634 et 1595
- M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Amendements nos 3, 14, 58, 550, 1333, 2546, , 1, 12, 91, 383, 551, 705, 1073, 1335, 2547, 475, 548, 1334, 1629, 2544, 13, 2, 101, 549, 1677, 2545, 885, 518, 520 rectifié, 2642, 220, 695, 994, 1056, 1336, 2862, 886 et 1119
- Sous-amendement no 2931
- Amendements nos 1886, 535, 703, 225, 1546, 863, 95, 1164, 490 et 2860
- Après l’article 2
- Première partie (suite)
- 4. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de M. Richard Ferrand
M. le président
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Communications de M. le président
M. le président
La Conférence des présidents a adopté ce matin à l’unanimité de nouvelles consignes sanitaires. En conséquence, je vous invite, chers collègues, à respecter les règles de distanciation en laissant au moins une place libre entre chacun d’entre vous. Le port du masque est désormais obligatoire en permanence, y compris lors des interventions des orateurs.
Par ailleurs, en votre nom à tous, je tiens à adresser les plus vives félicitations de l’Assemblée nationale à Mme Emmanuelle Charpentier, colauréate du prix Nobel de chimie 2020. (Applaudissements sur l’ensemble des bancs.)
2. Questions au Gouvernement
M. le président
L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Vaccins contre le covid-19
M. le président
La parole est à M. Boris Vallaud.
M. Boris Vallaud
Monsieur le Premier ministre, 200 vaccins contre la covid-19 sont actuellement développés dans le monde. Quarante-deux font l’objet d’essais cliniques et une dizaine donnent lieu à des tests à large échelle.
M. Pierre Cordier
Il en faudrait surtout un qui marche !
M. Boris Vallaud
L’actualité américaine est bien sûr marquée par l’élection présidentielle mais aussi par cette course aux vaccins, qui laisse espérer que deux d’entre eux soient disponibles au mois de décembre, permettant de vacciner l’ensemble de la population américaine d’ici le mois d’avril. Vous le savez : dans un contexte de mise sur le marché accélérée et simplifiée, la confiance et la transparence sont particulièrement nécessaires, car les risques de conflit d’intérêts et la pression mise sur les agences du médicament sont très élevés. Si la FDA – Food and Drug Administration –, l’agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux, a rendu publiques ses lignes directrices, c’est-à-dire les conditions de mise sur le marché d’un vaccin, ce n’est pas le cas de l’Agence européenne des médicaments. J’aimerais savoir si le Gouvernement a connaissance de ces lignes directrices européennes.
De la même façon, la Commission européenne n’a pas rendu publics les contrats qui la lient aux laboratoires pour le développement et la fourniture de vaccins. Or il pourrait être intéressant, dans un contexte de rareté des ressources, de savoir comment seront traités les différents pays, en particulier le nôtre. J’aimerais savoir si le Gouvernement a connaissance de ces contrats avec l’industrie pharmaceutique et s’il peut les rendre publics.
La question de la modalité de distribution des vaccins est également posée, dans l’urgence. Le gouvernement britannique en a déjà communiqué les modalités : l’armée et le National Health Service, le système de la santé publique, seront mobilisés. Il a déjà indiqué que 30 millions de Britanniques, c’est-à-dire la moitié de la population, auraient accès au vaccin, ce qui le conduira à cibler en priorité les personnes de plus de 65 ans, les personnes les plus vulnérables et, bien sûr, les personnels de santé. Qu’en est-il de la France ? Avez-vous établi une stratégie vaccinale ? Êtes-vous déjà engagé dans la préparation de la distribution de ces vaccins ? Monsieur le Premier ministre, nous ne savons rien ou pas grand chose. Après le fiasco des masques et les retards des tests, nous préparez-vous la débâcle des vaccins ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR et sur quelques bancs du groupe FI.)
M. le président
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Maxime Minot
Ministre de la débâcle !
M. Olivier Véran, ministre
Ce qui certain, monsieur Boris Vallaud, c’est que vous n’êtes jamais en retard d’une polémique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, exclamations sur les bancs des groupes SOC et LR.) Je vous en félicite, c’est tout à votre honneur, et c’est sans doute à la hauteur de la confiance nécessaire dans notre pays, à l’heure où nous faisons face à une vague épidémique qui mobilise les soignants et l’ensemble des Français ! Chapeau pour la pertinence avec laquelle vous avez terminé votre question ! Je le dis en toute sincérité, monsieur Vallaud : on n’est jamais déçu. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. Ugo Bernalicis
Changez de refrain, soyez sérieux !
M. Pierre Cordier
Les masques seraient inutiles ! Qui l’a dit ? Un ancien collègue à vous !
M. le président
S’il vous plaît, chers collègues, laissez le ministre répondre à la question de M. Vallaud. (Exclamations sur les bancs des groupes SOC, GDR, FI et LR.)
M. Olivier Véran, ministre
Mesdames et messieurs les députés, la question de M. Vallaud est importante puisqu’elle porte sur les vaccins contre le coronavirus. (Les exclamations se poursuivent.)
M. le président
S’il vous plaît, chers collègues !
M. Olivier Véran, ministre
Je vais me permettre d’y répondre, en vous indiquant d’abord que, comme tous les vaccins, ceux-ci devront être efficaces et sûrs. Nous proposerons un vaccin aux Français lorsque l’un d’entre eux aura démontré qu’il est à la fois efficace et sûr. Avec l’Italie, l’Allemagne et les Pays-Bas, nous avons pris l’initiative de contractualiser un pré-contrat avec un laboratoire anglais pour une première commande de vaccins qui pourraient être disponibles au cours des prochains mois.
M. Boris Vallaud
Mais quelles sont vos lignes directrices ?
M. Olivier Véran, ministre
Nous avons immédiatement passé le relais à la Commission européenne, qui a chargé un comité indépendant, composé d’experts venant de différents pays et sans lien avec les pays des laboratoires concernés, de contractualiser des précommandes massives pour pouvoir vacciner la population européenne. À la demande du Président de la République, nous avons ajouté une clause visant à s’assurer de la prise en compte du bien public mondial, afin de pouvoir en faire bénéficier par la suite les pays les plus pauvres.
Monsieur le député, une partie de votre question porte sur le secret de la recherche et du développement en matière de politique vaccinale. Je n’ai pas encore connaissance de tous les éléments d’information puisque, par définition, les données auxquelles nous aurons accès concernant les projets de recherche industrielle sont uniquement celles qui seront publiées pour nous permettre d’acheter les vaccins en toute sécurité et confiance. Cela concerne par exemple la recherche publique développée, dans le cadre du projet d’AstraZeneca, par l’université publique d’Oxford.
Enfin, quant aux indications populationnelles, la Haute Autorité de santé est bien sûr totalement mobilisée pour déterminer les conditions de la vaccination, qui dépendront de la nature et de l’efficacité du vaccin. Rassurez-vous, tout est en cours de préparation sur ce sujet.
Violences à l’encontre des policiers
M. le président
La parole est à M. Antoine Savignat.
M. Antoine Savignat
Dominique, 45 ans, et Philippe, 30 ans, ont été victimes, dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions au sein de l’antenne de police judiciaire de Cergy-Pontoise, d’une attaque ignoble, d’une violence inouïe. En cet instant, nous devons avoir une pensée pour eux, dont l’un lutte encore pour la vie et dont le second a vu la sienne bouleversée à jamais, mais aussi pour leurs collègues de Champigny-sur-Marne attaqués ce week-end de manière intolérable et particulièrement violente (Tous les députés se lèvent et applaudissent), ainsi que pour toutes celles et ceux qui sont exposés quotidiennement, dans l’exercice de leurs fonctions. Je voudrais qu’ici, nous leur rendions hommage pour leur courage, leur sang-froid et leur professionnalisme. (Les applaudissements se poursuivent.)
Jusqu’à quand allons-nous rester impuissants devant ces attaques ignobles ? Nous ne pouvons plus nous contenter de déclarations d’hommage, de soutien et d’autres formes de compassion.
M. Pierre Cordier
Il a raison !
M. Michel Herbillon
Agissez enfin !
M. Antoine Savignat
Nous devons collectivement apporter des réponses à ces situations intolérables et de plus en plus fréquentes. Monsieur le Premier ministre, vous êtes en fonction depuis cent jours et en matière de sécurité, nous attendons toujours des actes forts. Vous ne pouvez plus vous contenter de commenter cette escalade de la violence ; vous devez pointer le problème et proposer des solutions.
M. Pierre Cordier
Castaner, reviens !
M. Michel Herbillon
Gérard Collomb, où es-tu ?
M. Antoine Savignat
S’il s’agit d’un problème de moyens, pourquoi ne pas utiliser une partie du budget de la relance pour augmenter davantage les effectifs de police et leur protection ? S’il s’agit d’un problème de cadre légal et de riposte policière, pourquoi ne pas envisager d’autoriser les forces de l’ordre à répliquer dans un cadre moins anxiogène pour elles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) S’il s’agit d’un problème de réponse pénale, pourquoi refusez-vous de faire preuve de fermeté en instaurant des peines minimales en cas d’atteinte aux policiers, et en musclant ainsi l’arsenal pénal ? (Mêmes mouvements, Mme Agnès Thill applaudit également.) S’il s’agit d’un problème socio-éducatif, pourquoi ne pas lancer un grand chantier pour inculquer aux jeunes générations le respect des forces de l’ordre ? Mais de grâce, monsieur le Premier ministre, ne restons pas là à nous lamenter et à déplorer ! Agissons de concert pour rétablir l’ordre républicain. Quand la République est attaquée, la République doit triompher ! Ma question est simple : que comptez-vous faire ? (Mêmes mouvements.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Michel Herbillon
De l’action !
M. Gérald Darmanin, ministre
Permettez-moi bien sûr de m’associer à l’hommage que vous rendez aux forces de l’ordre, singulièrement aux deux policiers qui ont été attaqués très sauvagement, visés par des actes qui, selon toute vraisemblance, avaient pour but de causer leur mort. Je me suis rendu dans votre département ; vous avez d’ailleurs eu la gentillesse, en tant que parlementaire du Val-d’Oise, de me faire part de votre solidarité, dont je sais qu’elle est partagée par tous les députés du département. Je suis allé saluer celui des deux policiers qu’il était possible de rencontrer à l’hôpital, et j’ai indiqué à l’ensemble des équipes du commissariat et de la police judiciaire du Val-d’Oise à quel point cet acte nous révulse.
L’enquête est en cours, monsieur le député, mais vous aurez pu lire dans la presse – je le dis devant M. le garde des sceaux – que la personne arrêtée a été, après de longues heures de garde à vue, écrouée et présentée devant un magistrat instructeur.
M. Pierre Cordier
Elle s’est rendue, on ne l’a pas capturée !
M. Gérald Darmanin, ministre
D’autres actes, sous l’autorité du procureur de la République, sont en cours ou seront réalisés dans les heures qui viennent. Je ne me permettrai pas de les commenter mais évidemment, aucun acte ne restera impuni.
J’en viens au fond de votre question : faut-il des moyens ? La réponse est oui ! Votez le PLF présenté par Bruno Le Maire et Olivier Dussopt : il prévoit une augmentation de 40 % des crédits du ministère de l’intérieur ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
Votez, monsieur le député, le projet de loi de finances : pour la première fois en trois ans, c’est bien la majorité qui crée 10 000 postes de policiers et de gendarmes ! (Mêmes mouvements.)
M. Ugo Bernalicis
Ce n’est pas vrai du tout !
M. Gérald Darmanin, ministre
Votez, monsieur le député, le plan de relance : il permettra le changement d’un quart des véhicules, alors qu’il y a encore quelques années, on changeait un véhicule tous les huit ans ! (Mêmes mouvements.) Votez, monsieur le député, en faveur des amendements au projet de loi de finances, que vous n’avez pas soutenus et qui permettront de mener plus de 3 000 opérations dans les commissariats d’ici au 31 décembre !
M. Pierre Cordier
Ce n’est pas une question de crédits !
M. Gérald Darmanin, ministre
Alors en toute chose, évitons les polémiques et votons, monsieur le député ! (Mêmes mouvements.)
Reprise de l’épidémie de covid-19
M. le président
Avant de lui céder la parole, je suis heureux de souhaiter la bienvenue à Mme Muriel Roques-Etienne, devenue députée de la première circonscription du Tarn le 8 octobre dernier, en remplacement de M. Philippe Folliot. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Ma chère collègue, vous avez la parole.
Mme Muriel Roques-Etienne
C’est avec une émotion certaine que je prends la parole pour la première fois dans l’hémicycle.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, depuis maintenant plusieurs semaines, notre pays se prépare à affronter ce que beaucoup appellent déjà la deuxième vague de l’épidémie de covid-19. Au cours de l’été, le Gouvernement a amplifié la capacité de test de notre pays et a fortement encouragé le port du masque en intérieur comme en extérieur, le généralisant même dans certains territoires. De plus, une stratégie de concertation avec les élus locaux a été menée, afin que les décisions soient prises au plus près du terrain, sous l’impulsion du couple maire-préfet.
Si certaines difficultés ont pu parfois apparaître, nous savons que le Gouvernement et l’ensemble des services de l’État sont mobilisés pour lutter contre le virus et protéger nos concitoyens. J’ai moi-même pu m’en rendre compte dans le Tarn, et je tiens à remercier les services de la préfecture, ainsi que l’ensemble des élus locaux, pour leur action.
Mais aujourd’hui, malgré tous les efforts des Françaises et des Français, que nous devons saluer…
M. Fabien Di Filippo
Ça commence mal !
Mme Muriel Roques-Etienne
…la situation se dégrade. Pour faire face, un suivi actif de l’épidémie est effectué quotidiennement dans l’ensemble du territoire, et des mesures de restriction, concertées et adaptées, sont prises localement. Depuis septembre, le plan blanc renforcé a été déclenché dans les hôpitaux de plusieurs départements, les plus touchés par la reprise épidémique. Nos médecins et soignants sont pleinement mobilisés, et nous devons solennellement rendre hommage à leur engagement.
Dans ce cadre, suite au conseil de défense qui s’est tenu ce matin et à la veille de la prise de parole du Président de la République, pourriez-vous faire un point de la situation sanitaire et nous indiquer comment notre stratégie pourrait évoluer ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. le président
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
Je tiens tout d’abord à vous souhaiter la bienvenue au Parlement, et à vous remercier pour votre question, qui me permet effectivement de dresser un point rapide de l’évolution épidémique dans notre pays.
Hélas, l’épidémie continue son ascension : si à la fin de l’été, il touchait essentiellement les populations jeunes, et n’avait donc qu’un impact sanitaire faible, le virus est aujourd’hui passé aux populations moins jeunes, vulnérables, fragiles, qui présentent ce que l’on appelle des comorbidités, entraînant plus de conséquences sanitaires.
Nous constatons – et les soignants nous le disent également – que la vague qui a commencé à arriver dans les hôpitaux inquiète et fragilise notre édifice sanitaire. Pour faire face à cette épidémie redoutable…
M. Pierre Cordier
On ne le savait donc pas ?
M. Olivier Véran, ministre
…il nous faut donc prendre des mesures partout où c’est nécessaire. Nous ne sommes pas un cas isolé : l’Espagne, la Belgique et les Pays-Bas font face à une épidémie forte ; l’Italie et l’Allemagne, ainsi que les pays d’Europe de l’est, ont observé, depuis maintenant plus d’une semaine, une ascension épidémique relativement importante…
M. Pierre Cordier
Ce n’est pas une excuse !
M. Olivier Véran, ministre
…obligeant chaque pays à prendre des mesures selon des stratégies qui, à défaut d’être calquées sur la nôtre, lui sont parallèles.
Je rappelle que notre stratégie consiste à tester, tracer et protéger, en particulier les populations vulnérables, en appliquant les gestes barrières et en aérant son domicile et les pièces dans lesquelles on se trouve.
M. Pierre Cordier
Tergiversations permanentes ! Il faut mettre le masque, il ne faut plus le mettre… Heureusement que Sibeth Ndiaye est partie !
M. Olivier Véran, ministre
Partout où c’est nécessaire, des mesures visant à freiner la diffusion du virus, adaptées à la situation épidémique propre à chaque territoire, sont prises après consultation, vous l’avez dit, des élus et des représentants de l’État dans les territoires.
Je crois que les Français ont pleinement pris conscience de la gravité de la situation épidémique et sont parfaitement mobilisés aux côtés de l’État pour faire face à ce virus, qui a déjà causé des dégâts considérables – hospitaliers, notamment – dans notre pays et que nous devons arrêter au plus vite, afin d’éviter qu’ils ne deviennent trop importants. C’est l’objet des décisions prises en Conseil de défense par le Premier ministre et le Président de la République, qui s’exprimera demain soir à leur sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Néonicotinoïdes
M. le président
La parole est à M. Olivier Falorni.
M. Olivier Falorni
Madame la ministre de la transition écologique, vous nous avez manqué, la semaine dernière, lors du débat parlementaire sur le projet de loi permettant la réintroduction des néonicotinoïdes, ce véritable poison pour l’environnement ! En effet, j’aurais tant aimé entendre à nouveau celle qui, alors secrétaire d’État à la biodiversité, en 2016, nous disait ici-même avec justesse, que, quoi qu’il arrive, en 2020, c’en serait fini pour tous les néonicotinoïdes, que l’on savait bien que les dérogations étaient la porte ouverte à ce qu’ils ne soient jamais interdits. Or, nous sommes en 2020, et la boîte de Pandore est à nouveau ouverte ! Même chose pour le glyphosate, cet autre poison classé cancérogène probable par l’Organisation mondiale de la santé et dont le Président de la République, promettait, le 27 novembre 2017, qu’il serait interdit dans les trois ans. Sauf que les trois ans sont écoulés : c’est maintenant ! Comme le reniement et le renoncement…
M. Pierre Henriet
On nous a déjà fait le coup : « Le changement, c’est maintenant. » Or ça n’a rien donné !
M. Olivier Falorni
Et que dire des engagements pris par le chef de l’État devant la Convention citoyenne pour le climat, en juin ?
M. Pierre Cordier
C’est uniquement de la communication !
M. Olivier Falorni
Aujourd’hui, les propositions de la Convention tombent comme à Gravelotte. Madame la ministre, je sais combien il est difficile de résister face aux lobbies, mais quand on fait des promesses, on doit tenir bon pour les honorer ! André Gide disait : « La promesse de la chenille n’engage pas le papillon. » Madame la ministre, je vous invite, si j’ose dire, à être en même temps la chenille et le papillon.
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation
Allez-vous un jour arrêter d’opposer agriculture et environnement, monsieur le député ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM – Protestations sur les bancs LT.) Cela n’a aucun sens !
M. Fabien Di Filippo
Enlevez les masques !
M. Julien Denormandie, ministre
Cessez d’opposer l’agriculture à l’environnement et les uns aux autres ! Acceptez qu’avec la ministre de la transition écologique, nous travaillions de concert. Vous savez, un agriculteur vit de la terre ; un agriculteur chérit le sol et vit de l’environnement. Les agriculteurs étaient écologistes bien avant vous, voilà la réalité ! Alors cessez de les opposer, car cela n’a aucun sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
S’agissant du glyphosate, notre position est claire, et la transition a déjà commencé : un tiers des agriculteurs ont déjà arrêté d’utiliser du glyphosate. La semaine dernière, avec la ministre de la transition écologique…
Un député du groupe LR
On n’en sait rien, elle ne répond pas !
M. Ugo Bernalicis
Pourtant elle est là, Barbara !
M. Julien Denormandie, ministre
…nous avons pris connaissance d’éléments transmis par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – ANSES –, qui montrent à quel point la transition est en route.
L’engagement du Président de la République était très clair : il n’y aura un arrêt du glyphosate que lorsqu’une alternative crédible le permettra. C’est une position pragmatique, fondée sur une écologie de terrain, une écologie des territoires ; il s’agit d’une écologie réelle et non d’une écologie de l’incantation ! Cela ne vous plaît pas, mais telle est la réalité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Et puisque vous adorez les citations et les idées, monsieur Falorni, je vais vous soumettre une question ô combien difficile : toute une génération d’agriculteurs…
Mme Cécile Untermaier
Il faut les accompagner !
M. Julien Denormandie, ministre
…a été accompagnée dans une agriculture de conservation. Dites à vos administrés qu’aujourd’hui, grâce aux agriculteurs, on capte le carbone dans le sol, et on empêche les conséquences des gaz à effet de serre. Mais cela nécessite des désherbants : le jour où nous aurons trouvé une solution pour empêcher la collision d’objectifs écologiques, ce sera une grande avancée. Et c’est ce à quoi nous travaillons. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
Justice de proximité
M. le président
La parole est à M. Dimitri Houbron.
M. Dimitri Houbron
Vous l’avez souligné, monsieur le ministre de la justice, nos concitoyens ont peur ; ils manquent de confiance dans la capacité de notre institution judiciaire à apporter une réponse adaptée à la situation telle qu’ils la vivent ou la perçoivent. Trop lente, peu efficace, laxiste : c’est ainsi, hélas, que les Français qualifient notre justice.
Je tiens à saluer la détermination dont vous avez fait preuve en vue d’obtenir une hausse historique de 8 % du budget de la justice, qui pourra ainsi développer une branche de proximité forte de 200 millions d’euros. Vous avez par exemple annoncé le recrutement, d’ici à quelques mois, de 764 renforts de greffe et juristes assistants : pour les avoir exercées avant de siéger ici, je connais bien ces professions essentielles, qui soutiennent quotidiennement les magistrats dans leurs missions.
Vous avez la volonté, vous aurez désormais les moyens de remédier à la faiblesse mortifère de notre justice, à l’engorgement des tribunaux qui laissent donc impunis cette petite délinquance, ces petits délits, pourrissant la vie des Français. Il faut mettre fin à ce sentiment d’impunité qui exaspère jusqu’à nos forces de l’ordre.
Le groupe Agir ensemble présentera en novembre une proposition de loi visant à améliorer la justice pénale de proximité, grâce, entre autres, aux alternatives aux poursuites. Au lieu d’engager une procédure longue et fastidieuse, le procureur pourrait ainsi exiger du délinquant qu’il repeigne le commissariat qu’il a tagué (« Oh oui ! » sur les bancs du groupe LR)
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire davantage au sujet des prochaines circulaires que vous édicterez pour guider et simplifier le travail des acteurs de la justice, ainsi que de votre vision de la justice de proximité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens.)
M. le président
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
Premièrement, je ne laisserai jamais dire que la justice de notre pays est laxiste,…
M. Fabien Di Filippo
Ce n’est pas la justice qui est laxiste, c’est le garde des sceaux !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
…et je rappellerai qu’en matière criminelle, elle est rendue par le peuple français.
M. Ugo Bernalicis
Plus pour longtemps !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Deuxièmement, dès mon arrivée, j’ai travaillé à établir une justice de proximité. J’ai obtenu un budget exceptionnel, à la hauteur des enjeux, que vous adopterez sans aucun doute et qui se traduira en effet par des recrutements massifs : 2 450 personnels supplémentaires, dont 750 contractuels, sont en passe d’être embauchés. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.) C’est la preuve de l’attachement que je porte à la justice !
M. Pierre Cordier
Et la formation ? Elle se fait en deux jours, peut-être ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Pour répondre à votre question, j’ai pris le 1er octobre une circulaire de politique pénale.
Un député du groupe LR
Qu’en pense le ministre de l’intérieur ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
J’ai rencontré les procureurs généraux : nous avons évoqué une justice rapide, systématique et, n’en déplaise à certains, proportionnée.
M. Pierre Cordier
« Proportionné », c’est le mot préféré des laxistes !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Cette justice rendra des décisions immédiates à l’encontre des petits délinquants dont les rodéos urbains, les tags, les incivilités rendent la vie insupportable aux Français. Je souhaite également que davantage d’audiences pénales et civiles se tiennent à l’extérieur des tribunaux, dans le cadre d’une justice de proximité foraine, faite pour les plus défavorisés de nos concitoyens.
M. Pierre Cordier
Nicole Belloubet, reviens !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Parce que cette proximité nécessite le concours des élus locaux, j’ai demandé aux procureurs de se rapprocher de ceux-ci, afin qu’ils mettent en commun leur expérience et soient ainsi plus efficaces. Je sais pouvoir compter sur votre engagement et sur celui de l’ensemble de la majorité pour compléter mon action dans le domaine législatif.
M. le président
Merci, monsieur le ministre…
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux
Votre proposition de loi en témoigne : elle permettra notamment d’accélérer l’exécution des peines d’intérêt général. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Système de soins
M. le président
J’ai le plaisir de donner la parole à M. Jean-Luc Reitzer, que je me réjouis très sincèrement et très amicalement de voir reprendre sa place parmi nous. (Mmes et MM. les députés se lèvent et applaudissent.)
M. Jean-Luc Reitzer
Merci, mes chers collègues, je suis très touché !
Chacun comprendra l’émotion que j’éprouve aujourd’hui à prendre la parole. Admis en réanimation le 4 mars, plongé dans le coma durant quatre semaines, j’ai pu quitter l’hôpital Émile-Muller de Mulhouse après y avoir passé deux mois et demi.
M. Alexis Corbière
Bravo !
M. Jean-Luc Reitzer
À vous, monsieur le président, à mes collègues de tous les bancs de l’Assemblée, j’exprime ma reconnaissance pour vos messages de soutien et de sympathie. Je rends hommage, aussi et surtout, à tous les soignants, qui ont sauvé tant de vies et qui méritent nos applaudissements ! (Applaudissements sur tous les bancs.)
Malheureusement, tout le monde n’a pas eu la chance de vaincre ce maudit virus. Dès lors, notre devoir le plus sacré est de tirer les leçons de cette épreuve collective.
M. Pierre Cordier
C’est vrai !
M. Jean-Luc Reitzer
Je suis le témoin vivant des dysfonctionnements qu’elle a révélés. Mme Bachelot s’en souvient : je me bats depuis des années contre le déclassement des hôpitaux de proximité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, SOC, FI et GDR.)
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous vous engager à ne plus fermer de lits, ni de services ? Ils sont indispensables à nos hôpitaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR.) Depuis des années, nous nous battons contre la suradministration de nos services de santé, en vertu de la seule logique comptable. Allez-vous lancer une réflexion, en concertation avec les élus, portant sur le rôle et la mission des agences régionales de santé ? Depuis des années, nous nous battons pour que le travail des soignants soit revalorisé. Des mesures ont été prises, mais allez-vous corriger les injustices et les oublis auxquels a donné lieu le Ségur de la santé à l’encontre de nombreuses catégories de soignants,…
M. Alexis Corbière
Eh oui !
M. Jean-Luc Reitzer
…ainsi que les inégalités dans le versement des primes covid ?
L’heure est grave, monsieur le Premier ministre. Votre désir de proximité est reconnu : rétablirez-vous l’humanité, la cohérence, la lisibilité des mesures qui ont été prises ? Déterminerez-vous ce choc de confiance et d’espérance qu’attendent nos soignants, nos concitoyens ? Il y va des valeurs de la République ; il y va de la grandeur et de l’honneur de la France. À l’adresse de tous ceux qui luttent aujourd’hui contre le virus, je n’aurai que deux mots : ils vaincront. Vive la vie ! (Applaudissements sur tous les bancs.)
M. le président
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre
Cher Jean-Luc Reitzer, quel plaisir de vous voir ici, aujourd’hui !
M. Jean-Luc Mélenchon
Ça commence bien…
M. Jean Castex, Premier ministre
Vous êtes malheureusement la preuve vivante (Rires et exclamations sur les bancs du groupe FI) que ce virus peut toucher tout le monde : personne n’a l’assurance d’être épargné, d’être à l’abri de ses ravages. Depuis le début de la deuxième vague, nous observons un rajeunissement des patients hospitalisés en réanimation.
M. Fabien Di Filippo
Toujours aussi bavard ! C’est très français, apparemment…
M. Jean Castex, Premier ministre
Outre les décès comptabilisés, la maladie laisse parfois des séquelles importantes. Une mobilisation générale est absolument nécessaire. Nous avons rapidement tiré les conclusions de la première vague : j’ai signé le 13 juillet les accords du Ségur de la santé,…
M. Jean-Paul Dufrègne
Et alors ?
M. Jean Castex, Premier ministre
…dont vous conviendrez tous (Protestations sur les bancs du groupe LR) qu’ils constituent un tournant historique en matière de pilotage et de ressources affectées à notre système de soins. Je suis d’ailleurs certain que vous adopterez le projet de loi de financement de la sécurité sociale,…
M. Pierre Cordier
Pas de chantage ! Ce n’est pas une question de chiffres !
M. Jean Castex, Premier ministre
…qui, comme le projet de loi de finances pour 2021,…
M. Fabien Roussel
Zéro !
M. Jean Castex, Premier ministre
…les traduit en moyens destinés à nos personnels soignants, en reprise de la dette hospitalière, en maintien des hôpitaux de proximité, en volume d’investissements de modernisation.
M. Fabien Roussel
Combien de lits ouverts ?
M. Jean Castex, Premier ministre
Nous allons d’ailleurs essayer d’accélérer ces augmentations de rémunération :…
M. Pierre Dharréville
D’activer d’abord !
M. Pierre Cordier
Tout est dans le verbe « essayer » !
M. Jean Castex, Premier ministre
…une première tranche de plus de 90 euros est prévue en octobre, une deuxième en mars. L’accélération de ces versements marquera notre reconnaissance aux professionnels de santé, notamment, monsieur Reitzer, à ceux de Mulhouse, qui, comme tous les autres, ont été exemplaires pendant la première vague de la pandémie. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Pierre Cordier
Il aurait mieux valu anticiper !
M. Jean Castex, Premier ministre
Mais de grâce, alors que la deuxième vague est là, ne faisons pas croire qu’on peut recruter ou former des anesthésistes réanimateurs en trois mois – pas plus que des infirmières ! Les mesures que nous avons prises provoqueront des résultats dans le long terme. Nous devons muscler nos dispositifs concernant les heures supplémentaires, et renforcer l’attractivité immédiate de ces métiers. Croyez en la mobilisation totale du Gouvernement pour faire face à la deuxième vague qui s’annonce ; elle se traduira non seulement par des mesures de prévention – même strictes –, que nous approuverons tous, mais aussi par des mesures structurelles visant à renforcer le système sanitaire français, qui le mérite amplement. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
Fiscalité écologique
M. le président
La parole est à M. Bruno Duvergé.
M. Bruno Duvergé
Début septembre, monsieur le ministre de l’économie et des finances, vous avez présenté un plan de relance visant à accélérer la reprise de l’activité économique et à amortir les conséquences sociales de la crise liée au covid-19. Il doit amplifier la transition énergétique, objectif auquel sont consacrés 30 milliards d’euros. Lors de l’examen du PLF, nous vous avons alerté sur des dispositions qui nous semblaient anti-écologiques et anti-sociales, comme la hausse de la taxation de l’essence sans plomb 95-E10 de 1 centime par litre, soit une augmentation du plein de super de 30 centimes en 2021 et de 60 centimes en 2022. À la suite des annonces que j’ai lues ce matin dans les médias, je vous demande de bien vouloir confirmer, devant la représentation nationale, l’abandon de cette taxe qui pénaliserait nos concitoyens et aurait un bénéfice écologique quasi-nul.
Je souhaite appeler votre attention sur deux autres sujets : la réforme du système d’indemnités kilométriques en fonction de la puissance des véhicules, et la taxation relative au poids des véhicules. Ces deux meures pourraient désavantager des familles en zone rurale, et, surtout, annuler le bénéfice d’évolutions technologiques conçues par les constructeurs automobiles. La taxation des technologies constitue toujours un frein à la recherche et à l’innovation. Il est toujours préférable qu’elle favorise directement l’objectif à atteindre, plutôt qu’elle ne pénalise les moyens qui vont en sens contraire. C’est pourquoi, monsieur le ministre, à l’occasion de l’examen d’un PLF très sensible, je souhaiterais que vous apportiez des réponses sur ces trois sujets.
M. le président
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Pierre Cordier
…et des lithographies !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Vous interrogez le Gouvernement au sujet de la fiscalité écologique et de la poursuite d’une trajectoire visant à construire une fiscalité plus respectueuse de l’environnement, et qui accompagne l’économie dans cette transition. Vous l’avez souligné : le PLF que nous présentons, avec M. Bruno Le Maire, contient des dispositions qui participent à la construction d’une fiscalité écologique. Les mesures allant en ce sens sont nombreuses, et beaucoup font consensus – je m’en réjouis, car cela démontre notre capacité collective à construire un nouveau modèle.
Vous évoquez une mesure en particulier, qui vise une convergence, vers une taxation à 2 centimes par litre, de la fiscalité de différents composants de carburant, le E5 et le E10 ; elle se traduirait par une augmentation de 2 centimes d’euros du litre d’essence sans plomb 95. Comme vous l’avez noté, et parce que nous avons entendu les réactions, les inquiétudes et les interrogations de très nombreux parlementaires, dont vous êtes, M. Bruno Le Maire et moi avons annoncé, ce matin, que nous donnerions un avis favorable aux amendements parlementaires visant à revenir sur cette disposition. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. Fabien Di Filippo
Vous réessayez chaque année !
M. Pierre Cordier
Tous les ans, il faut les rappeler à l’ordre !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Nous veillerons à ce que la fiscalité du carburant soit parfaitement inchangée dans le PLF pour 2021, de manière à répondre pleinement à vos attentes.
Par ailleurs, la convention citoyenne pour le climat a émis des propositions qui nourrissent le débat. Comme l’a indiqué le Président de la République, il y a parfois lieu d’en étudier les modalités, d’en examiner la temporalité, et de veiller à ce que leurs conditions d’application soient pertinentes au regard de la crise que nous traversons. Quoi qu’il en soit, nous devons continuer à construire et à échanger à ce sujet. Cela ne doit pas nous faire oublier – vous l’avez souligné au début de votre question – que ce PLF est historique en matière de transition écologique. Non seulement nous augmentons le budget du ministère de la transition écologique de près de 1 milliard d’euros, mais encore nous consacrons un tiers du plan de relance à des actions de verdissement. Ainsi, plus de 30 milliards sont dédiés à la transition écologique ; c’est là le principal outil de verdissement de notre économie.
Pauvreté
M. le président
La parole est à M. Stéphane Peu.
M. Stéphane Peu
La semaine dernière, nous avons appris « en même temps » – si j’ose dire ! –, de France stratégie, d’une part, que l’effet combiné de vos décisions relatives à l’allégement fiscal sur les dividendes et à la suppression de l’ISF – impôt de solidarité sur la fortune – avait littéralement fait exploser les revenus des plus riches ;…
M. Ugo Bernalicis
Eh oui !
M. Stéphane Peu
…et du Secours populaire, d’autre part, que depuis le début de la crise du covid-19, un million de personnes supplémentaires avaient vu leur vie basculer dans la pauvreté.
M. Fabien Roussel
C’est vrai !
M. Stéphane Peu
Dans la sixième puissance économique du monde, dix millions de nos compatriotes dépendent des banques alimentaires, ne savent plus comment payer leur loyer, leur eau et leur électricité, renoncent aux soins et vivent la peur au ventre. Ces nouveaux captifs de la pauvreté sont des intérimaires, des extras, des personnes en fin de CDD, des saisonniers et des chômeurs en fin de droits qui ne bénéficient pas, ou plus, de la couverture chômage en raison de votre réforme. Ce sont également des indépendants, des commerçants, des artisans, des autoentrepreneurs ; ce sont aussi des étudiants et des jeunes qui n’ont droit ni au RSA, ni au chômage, et dont les premiers pas dans la vie se feront sur un chemin d’angoisse. Bref, ce sont les premiers de corvée et les cobayes de la « start-up nation » !
Pour faire face à cette vague de pauvreté inédite depuis la Deuxième Guerre mondiale, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous, à défaut de vous réinventer, au moins vous amender et tirer les enseignements de vos erreurs ? Alors que le pays traverse une crise exceptionnelle, allez-vous enfin vous corriger et mettre la justice sociale au cœur de votre plan de relance ? Allez-vous enfin mettre à contribution l’enrichissement exceptionnel de quelques-uns, par un impôt exceptionnel – un « impôt covid » – au bénéfice de tous ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI, ainsi que sur de nombreux bancs du groupe SOC.)
M. le président
La parole est à M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Fabien Di Filippo
Il ne faut pas se tromper d’Olivier, on s’y perd avec les anciens socialistes !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Le Gouvernement et la majorité ont pris leurs fonctions après deux quinquennats caractérisés par le même mouvement : l’augmentation des prélèvements obligatoires, en particulier pour les ménages…
M. Fabien Di Filippo
Vous y avez largement contribué !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
…même si une inflexion a été aménagée pour les entreprises, au milieu du quinquennat précédent, avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE. La ligne du présent gouvernement est différente : il s’agit de baisser les impôts…
M. Fabien Di Filippo
Relisez ce qu’il disait il y a trois ans !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
…et nous baissons les impôts comme jamais. Fin 2021, la baisse d’impôts atteindra 45 milliards d’euros, la moitié au bénéfice des entreprises, l’autre moitié au bénéfice des ménages. Pour ces derniers, la diminution dépasse 20 milliards, dont 10 milliards correspondent à la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des Français – bien loin des 0,1 % des plus riches que vous stigmatisez ! À cela s’ajoutent la défiscalisation et l’exonération de cotisations sociales des heures supplémentaires, dont on sait pertinemment que ce sont les ouvriers, les employés et les classes moyennes qui en font le plus.
M. Fabien Di Filippo
Te voilà sarkozyste ?
M. Pierre Cordier
C’est Nicolas Sarkozy qui te l’a soufflé !
M. Stéphane Peu
Et les plus pauvres ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
S’y ajoute aussi la baisse de l’impôt sur le revenu pour les deux premières tranches, à hauteur de 5 milliards.
M. Stéphane Peu
Ce n’est pas du tout ma question !
M. Pierre Cordier
Sors un peu de ton ministère, tu verras si les gens ne paient pas d’impôts !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
C’est aussi ce gouvernement qui, en plus de ces baisses d’impôts, a appliqué la plus grande revalorisation des minima sociaux et le reste à charge zéro. C’est grâce à ce gouvernement que, si vous avez besoin de changer de lunettes, si vous avez besoin de soins dentaires ou de prothèses auditives, vous n’avez pas de reste à charge à payer– et vous devriez vous en féliciter ! C’est ce gouvernement qui fait preuve de la plus grande solidarité vis-à-vis des plus fragiles, et qui, contrairement à vous, s’attaque aux inégalités à la racine plutôt que de se contenter d’en traiter les symptômes. C’est cette majorité qui a de quoi être fière – fière de ce qu’elle fait, fière de ce que nous faisons !
M. André Chassaigne
Fière d’une mécanique inhumaine ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Les leçons de solidarité, monsieur Peu, nous n’en avons pas besoin ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Violences à l’encontre des policiers
M. le président
La parole est à Mme Cécile Rilhac.
Mme Cécile Rilhac
Mercredi dernier, à Herblay-sur-Seine, dans ma circonscription, deux policiers ont fait face à un déferlement de violence inouï. Nos forces de l’ordre en sont, malheureusement, de plus en plus la cible, comme à Champigny-sur-Marne le week-end dernier. Les policiers ont été tabassés, matraqués, et se font fait tirer dessus à bout portant à plusieurs reprises. Disons-le : il y a eu volonté d’en finir.
J’ai une pensée particulière pour Dominique et Philippe, deux policiers de la police judiciaire de Cergy-Pontoise qui ont été victimes d’une tentative d’homicide dans l’exercice de leurs fonctions. À 45 et 30 ans, leur carrière et leur vie sont brisées. Je voudrais ici, devant la représentation nationale, leur adresser mes plus sincères vœux de prompt rétablissement, et exprimer à leurs collègues mon indignation – notre indignation – face à cet acte inqualifiable. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Je souhaite réaffirmer notre indéfectible soutien aux forces de l’ordre et de sécurité pour leur engagement sans faille au service de la population. Dans le Val-d’Oise, comme partout ailleurs dans le pays, les policiers, les gendarmes, mais aussi les sapeurs-pompiers exercent des missions de plus en plus difficiles : rester calmes en toutes circonstances, porter assistance et secours, protéger la population ou encore appréhender les malfaiteurs.
Aujourd’hui, tout cela les expose à un risque permanent, accru par le simple fait qu’ils sont dépositaires de l’autorité publique ou qu’ils portent un uniforme. Cette violence gratuite à l’encontre de nos forces de l’ordre comme de nos concitoyens n’est plus acceptable.
Monsieur le ministre, je connais votre mobilisation pour la sécurité.
M. Fabien Di Filippo
Vous êtes bien la seule !
Mme Cécile Rilhac
Nous attendons une réponse pénale ferme. C’est indispensable pour que la défiance à l’égard de la justice se transforme en confiance.
Ma question est simple : quelles mesures allez-vous prendre pour que nous puissions dire à nos concitoyens « Plus jamais ça ! » ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur
Madame la députée, j’ai déjà exprimé, devant vous lors de mon déplacement dans le Val-d’Oise et en réponse à votre collègue, la solidarité du Gouvernement aux forces de l’ordre. Nous nous associons à vos propos sur la protection des gendarmes, des policiers, des sapeurs-pompiers, des élus, des magistrats, de tous ceux qui sont dépositaires de l’autorité publique.
Dans quelques jours, vous aurez l’occasion de débattre de la proposition de loi de vos collègues Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue. J’espère, mesdames, messieurs les députés, que vous soutiendrez tous, quels que soient les bancs où vous siégez, ce texte de bon sens qui vise à remettre de l’autorité, à assurer le continuum de sécurité avec la collaboration des maires et à protéger nos forces de l’ordre.
Celles-ci ne doivent plus être la cible de ce qu’on a trop laissé faire sur les réseaux sociaux et ailleurs – nous avons vu à la télévision des images de policiers se faisant agresser en dehors de leur lieu de travail.
Les sapeurs-pompiers – devant lesquels le Président de la République s’exprimera samedi prochain lors de l’assemblée générale de leur fédération nationale – et les forces de l’ordre doivent être davantage protégés, notamment grâce à des caméras de vidéo-protection en plus grand nombre, qu’elles soient installées sur eux ou sur leurs véhicules. Cela permettra aux magistrats de mieux condamner puisqu’ils pourront s’appuyer sur des faits incontestables. Vous savez, en effet, que les difficultés proviennent souvent du manque d’éléments, notamment de films de vidéosurveillance.
Vous aurez aussi l’occasion d’écouter les syndicats de police, jeudi matin, après qu’ils auront été reçus – fait exceptionnel – par le Président de la République aux côtés duquel se tiendront le garde des sceaux et moi-même,…
M. Pierre Cordier
À quoi sert le Premier ministre !
M. Gérald Darmanin, ministre
…ainsi que le directeur général de la police nationale et le préfet de police. Je vais aussi écouter ces mêmes syndicats cet après-midi.
M. Pierre Cordier
Il ne suffit pas de les écouter !
M. Gérald Darmanin, ministre
Le projet de loi de finances que vous allez adopter donnera les moyens financiers d’aider nos forces de l’ordre, en plus des moyens juridiques. Merci, madame la députée, pour tout ce que vous faites avec la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Malus écologique automobile
M. le président
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz
Monsieur le Premier ministre, vous êtes en poste à Matignon depuis cent jours et vous augmentez déjà les taxes des Français. Je veux parler du durcissement sans précédent du malus écologique sur l’automobile prévu dans le budget pour 2021 qui alourdira considérablement l’achat d’un véhicule neuf dès le 1er janvier.
À l’origine, le malus avait été créé pour financer les bonus dans une démarche incitative mais vous, vous cassez cette logique en augmentant beaucoup plus fortement le malus que le bonus. L’an prochain, le malus rapportera à l’État 500 millions de plus que le coût du bonus automobile. Dans les faits, vous allez multiplier par quatre en un an et par huit en deux ans le montant du malus pour un véhicule émettant 138 grammes de CO2. Il en va ainsi pour les voitures familiales comme la Peugeot 3008 ou encore la Dacia Sandero.
De nombreux modèles populaires seront ainsi rendus inaccessibles et les besoins quotidiens et professionnels des familles ne pourront être comblés. Les territoires ruraux et les familles les plus modestes seront les premiers à souffrir de vos choix budgétaires.
Notre usage de la voiture est déterminé par notre lieu d’habitation et par l’offre de services de transports publics, bien souvent inexistante dans nos territoires, notamment en montagne. (Approbations sur plusieurs bancs du groupe LR.)
Nous tenons là un exemple frappant d’une écologie exclusivement punitive servant surtout de prétexte pour faire la poche de nos concitoyens. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)
Cette politique budgétaire injuste touchera directement le portefeuille des ménages mais, de surcroît, elle sera suicidaire pour les fleurons industriels français de l’automobile, gravement affectés, et mettra en péril des milliers d’emplois.
Le « en même temps » a ses limites et s’avère même dangereux. N’est-ce pas particulièrement incohérent avec la politique de relance que vous entendez mener ? La question se pose à l’heure de votre premier bilan. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le président
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Pierre Cordier
Le ministre du malus !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Madame la députée, vous avez fini en évoquant l’incohérence. Je vous répondrai qu’il y a une grande cohérence dans la politique fiscale du Gouvernement. Comme je l’ai déjà dit à M. Duvergé, nous menons une politique de transition. Nous voulons construire la première économie décarbonée et accompagner la production et la consommation sur le chemin de la transition écologique. Nous avons ainsi retenu dans le projet de loi de finances une mesure consistant à augmenter le malus en fonction des émissions de gaz à effet de serre, particulièrement le CO2.
M. Fabien Di Filippo
Tu trahis la ruralité !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Nous prévoyons une mise en œuvre progressive, avec un objectif correspondant à un palier supérieur à la moyenne des véhicules produits en France.
À travers cette politique fiscale, notre volonté est non pas de rechercher des recettes supplémentaires…
Mme Marie-Christine Dalloz
Cela rapportera 500 millions de plus !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
…mais de mettre en place des outils fiscaux incitatifs pour accompagner la conversion du parc automobile.
M. Pierre Cordier
Ce sont les mêmes arguments que pour la taxe carbone !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Vous avez beaucoup insisté sur le malus mais vous auriez pu aussi souligner les efforts déployés par le Gouvernement pour favoriser cette conversion : nous prévoyons des primes à la conversion d’un montant sans précédent. Nous accompagnons aussi la rénovation énergétique des logements et des bâtiments publics. Tout se tient.
En pleine cohérence, nous construisons, je le répète, un chemin de transition écologique et environnementale grâce à des outils fiscaux, tout en veillant au pouvoir d’achat des Français. Et cela, sans jamais remettre en cause la trajectoire de baisse des prélèvements obligatoires que j’ai rappelée, qui se traduit par une baisse d’impôts de 45 milliards pour les ménages et les entreprises françaises.
C’est là notre objectif, et je vous invite à nous suivre sur cette ligne de crête. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Conditions de travail des soignants
M. le président
La parole est à Mme Annie Chapelier.
Mme Annie Chapelier
Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et des solidarités.
Après les épuisants mois de confinement où ils ont été acclamés comme des héros, les soignants ont beaucoup espéré du Ségur de la santé, pensant obtenir une véritable reconnaissance de la valeur de leur travail. Ces espoirs ont été…
M. Pierre Cordier
…déçus !
Mme Annie Chapelier
…douchés. De nombreuses professions sont amères : sages-femmes, professionnels libéraux, de la santé de ville, médico-sociaux, pour ne citer qu’eux. Ils sont nombreux à estimer qu’ils n’ont pas été entendus.
La place prépondérante laissée aux administrations dans les négociations alors que presque partout elles ont été perçues comme des freins, voilà qui ne passe pas.
La fuite du public vers le privé se poursuit chez les soignants, ce qui mène à une aggravation des conditions de travail pour ceux qui restent. Pire, selon un dernier sondage fourni par l’ordre des infirmiers, 43 % des infirmiers envisagent d’exercer une autre profession que la leur alors que près de 34 000 postes seraient vacants.
Les soignants sont à bout mais on leur demande d’être mobilisés face à la deuxième vague. Alors que les malades de la covid refluent à nouveau vers les hôpitaux, le sentiment est que rien n’a vraiment changé.
M. Alain Bruneel
C’est vrai !
Mme Annie Chapelier
Monsieur le ministre, ne serait-il pas temps de donner la priorité à une véritable et profonde réforme de santé…
M. Pierre Cordier
On ne dirait pas qu’elle appartenait au groupe LaREM encore récemment !
Mme Annie Chapelier
…en prenant en compte et en écoutant ces femmes et ces hommes, ces professionnels qui font notre système de santé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EDS.)
M. Christian Hutin
C’est dit gentiment, mais c’est bien dit !
M. le président
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Pierre Cordier
Ne dis pas trop de mal d’elle, c’était ta copine il y a quinze jours !
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
Madame la députée, moi, je suis très fier que cette majorité et ce Gouvernement augmentent les salaires de plus d’1,5 million de soignants, pour plus de 8,8 milliards d’euros par an. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
En termes de bilan, vous pourrez chercher sur tous les bancs, vous ne trouverez jamais une telle revalorisation. Jamais !
Cette augmentation de salaire de 15 % pour des aides-soignantes, pour des infirmières, pour des brancardiers, qu’ils travaillent au SAMU, aux urgences, dans les EHPAD, dans les hôpitaux, c’est la plus forte réduction d’écarts de rémunération entre hommes et femmes de toute l’histoire de notre pays parce que 85 % de ses bénéficiaires sont des femmes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Madame la députée, on peut quitter les bancs de la majorité, on peut être critique, mais on ne peut pas avoir d’œillères. Regardez ce que vous allez être amenée à voter dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale : 225 euros de salaire net de plus pour plus d’1,5 million de soignants. Aucun secteur de notre pays n’a jamais connu cela auparavant.
M. Fabien Roussel
8 000 lits supprimés en deux ans !
M. Olivier Véran, ministre
Je ne dis pas que c’est trop, je ne dis pas que cela suffit à restaurer l’attractivité, mais par pitié, lorsqu’il est question des carrières, essayons aussi de promouvoir ce qui a été fait de bien.
Madame la députée, nous ne nous arrêtons pas aux salaires. Il y a des changements de gouvernance : nous sortons de la tarification à l’activité, nous modifions totalement la place des soignants et la démocratie interne dans les établissements.
M. Pierre Dharréville
Bla bla bla !
M. Michel Herbillon
Arrêtez un peu avec l’autosatisfaction !
M. Olivier Véran, ministre
Ce sont 6 milliards d’investissements pour l’hôpital et les EHPAD ; ce sont 13 milliards de reprise de la dette des hôpitaux. Pour la première fois, vous avez un gouvernement qui dit : « Nous n’allons pas fermer des lits, nous allons en rouvrir – 4000 ». Pour la première fois depuis très longtemps, vous avez un Gouvernement qui dit : « Nous n’allons pas supprimer de postes à l’hôpital, nous allons embaucher des soignants– 15 000 ».
M. Alain Bruneel
C’est nous qui allons payer, pas vous !
M. Olivier Véran, ministre
Accompagnez-nous, madame la députée, les choses vont dans le bon sens et je suis sûr que vous voterez ces mesures la semaine prochaine dans ce même hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le président
La parole est à Mme Annie Chapelier.
Mme Annie Chapelier
Monsieur le ministre, je vous entends parfaitement et j’approuve tout ce qui a été fait lors du premier Ségur, mais la question n’est pas là : je veux vous dire que les soignants sont épuisés et ne sont pas sûrs de pouvoir faire face à la deuxième vague. Ce que réclament tous les collectifs de soignants c’est un deuxième Ségur, où tous les soignants seraient autour de la table pour exposer leurs propositions – cela et rien d’autre. J’insiste sur ce point, sans remettre en question votre action et les mesures que vous avez prises. (Applaudissements sur les bancs du groupe EDS.)
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre
Madame la députée, aucune prime, aucune hausse de salaire n’enlèvera la fatigue des soignants qui ont tout donné pendant la première vague. Nous devons les soulager, les épargner,…
M. Alain Bruneel
Combien d’embauches ?
M. Olivier Véran, ministre
…en respectant les mesures barrières et en prenant garde à ne pas faire circuler le virus.
Par ailleurs, nous avons développé la formation des soignants pour qu’ils soient plus nombreux à être opérationnels en réanimation. Cet été, rien qu’en Île-de-France, 750 infirmières ont été formées aux pratiques de réanimation, et 300 de plus le seront avant le mois de décembre. Nous accompagnons les soignants dans leur lutte contre le virus. Soyons tous à la hauteur !
Plusieurs députés du groupe GDR
Ce n’est pas vrai !
M. Christian Hutin
C’est un mensonge !
Échéance des concessions autoroutières
M. le président
La parole est à Mme Christine Pires Beaune.
Mme Christine Pires Beaune
Monsieur le Premier ministre, au terme des travaux d’une commission d’enquête, nos collègues sénateurs viennent de rendre un rapport accablant sur les concessions autoroutières. Un de plus, me direz-vous, tant il est vrai que ces dernières années, les rapports se sont succédé sans que les différents gouvernements en tirent des conséquences.
Selon le sénateur Vincent Delahaye, les mauvaises opérations de l’État ont occasionné un manque à gagner évalué entre 12 et 50 milliards d’euros selon le périmètre retenu. Cependant, on voit poindre une lueur d’espoir du fait que les concessions vont arriver à échéance entre 2031 et 2036.
Un député du groupe GDR
Nationalisez les autoroutes !
Mme Christine Pires Beaune
Au terme de celles-ci, les concessionnaires devront restituer à l’État propriétaire les infrastructures, gratuitement et en bon état d’entretien.
Monsieur le Premier ministre, on entend dire que l’État aurait engagé des discussions avec les plus grandes entreprises du secteur. Pouvez-vous nous rassurer en nous disant que ces discussions visent à définir un bon état d’entretien ainsi que les modalités de retour à l’État, mais en aucun cas à étudier un possible allongement de la durée des concessions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. Christian Hutin
Très bien !
M. le président
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Christian Hutin
Et des concessions autoroutières !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Vous avez rappelé les modalités qui ont régi les concessions autoroutières durant plusieurs législatures et évoqué le rapport qu’ont remis les sénateurs au Gouvernement. Nous examinons maintenant ce rapport qui comporte à la fois des éléments de constat et des propositions, qui nous aideront à préparer l’échéance des concessions autoroutières – une échéance dont vous conviendrez qu’elle est encore assez lointaine.
À ce jour, nous n’avons pas ouvert de discussions visant à prolonger, arrêter ou renouveler les concessions, ni à leur apporter des modifications substantielles. Évidemment, l’État a des contacts et des échanges avec les entreprises concessionnaires. Il s’agit même d’une obligation, puisque des dispositions résultant des dernières lois de finances prévoient que les taxes payées par les concessionnaires soient indexées afin de garantir leur participation au financement de certains ouvrages : je pense notamment aux ouvrages financés par l’Agence de financement des infrastructures de transport de France – l’AFITF –, tel le canal Seine-Nord Europe.
Nous continuerons à entretenir ces relations avec les sociétés autoroutières, en faisant preuve d’une grande vigilance et sans perdre de vue l’objectif consistant à protéger l’intérêt des Français.
M. Christian Hutin
C’était vraiment très convaincant – et très applaudi !
M. le président
La parole est à Mme Christine Pires Beaune.
Mme Christine Pires Beaune
J’ai bien noté que vous n’aviez pas entamé de discussions portant sur le sort des concessions, mais que le dialogue avec les sociétés concessionnaires restait ouvert. Je rappellerai quelques chiffres : de 2006 à 2019, 24,3 milliards d’euros de dividendes ont été servis, et les sénateurs ont évalué qu’au terme des contrats et à distribution constante, 70 milliards, soit deux fois les crédits 2021 du plan de relance, seraient distribués.
Le rapport du Sénat indique également que s’il n’y avait qu’une mesure à retenir, ce serait celle consistant à proscrire l’allongement des durées de concession, et j’insiste donc sur ce point.
Enfin, j’aimerais que vous fassiez vôtres les propos de Mme Borne qui a déclaré devant la commission d’enquête du Sénat qu’il fallait « arriver au terme de ces contrats, les solder et passer à autre chose pour ne pas traîner le péché originel de contrats trop anciens. » (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. le président
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Vous avez raison de noter que si des discussions formelles et des négociations ne sont pas ouvertes, l’État doit continuer à mener des discussions, comme il en a la responsabilité. Nous avons d’ores et déjà soumis les concessionnaires à une indexation de taxes qui n’était pas prévue initialement.
Les chiffres que vous avez cités portent effectivement sur la période allant de 2006 à 2019. En prévision de l’échéance de 2030, nous devons nous efforcer de réunir l’ensemble des forces politiques afin de parvenir à un consensus, ce qui me semble être également votre objectif.
OPA de Veolia sur Suez
M. le président
La parole est à M. Adrien Quatennens.
M. Adrien Quatennens
Monsieur le Premier ministre, dans l’affaire de l’OPA de Veolia sur Suez, c’est l’intérêt général qui est en cause : on parle ici de la gestion de l’eau et des déchets en France, d’un outil dont nous aurons impérativement besoin pour engager la bifurcation écologique. L’eau est un bien commun, qui ne devrait pas faire l’objet d’une guerre entre actionnaires.
Si cette OPA était menée à son terme, nous pourrions craindre un scandale du même type que celui des autoroutes : des prix à la hausse et un démantèlement de Suez pour satisfaire les exigences de la concurrence, avec à la clé, plus de 4 000 emplois menacés. Les Français n’ont aucun intérêt à la constitution d’un monopole privé en la matière.
Mais ma question, monsieur le Premier ministre, porte surtout sur les mensonges du Gouvernement et votre duplicité dans cette affaire où nous voyons une trahison, un scandale d’État ! Je vous le demande solennellement, cessez de nous prendre pour des imbéciles ! Vous ne ferez croire à personne qu’en France, une entreprise peut lancer une OPA hostile contre Suez, où l’État est totalement engagé, sans que celui-ci ait donné, d’une manière ou d’une autre, son feu vert à cette funeste opération. (Applaudissementssur les bancs des groupes GDR et FI.)
Bien sûr, pour sauver les apparences face aux Français, l’État a voté contre la cession à Veolia des actions Suez détenues par Engie, mais vous ne ferez croire à personne que l’État peut être mis en minorité au sein d’un conseil d’administration dont il est l’un des principaux actionnaires, sans que cette mise en minorité ait été organisée avec sa propre complicité. C’est une farce, et il est temps de siffler la fin de la récréation pour monsieur Macron, monsieur Kohler, monsieur Frérot et monsieur Clamadieu : la France n’est pas un gibier dont on découpe les bons morceaux pour s’en faire des cadeaux entre amis en récompense de bons et loyaux services ! (Mêmes mouvements.)
Nous demandons que l’Assemblée nationale se saisisse de cette affaire en constituant une commission d’enquête. Monsieur le Premier ministre, votre réponse vous engagera devant l’histoire : qu’avez-vous à répondre aux révélations du journal Mediapart, selon lesquelles l’Élysée serait intervenu directement dans cette affaire contre l’intérêt général ? A-t-on comploté dans le dos des Français dans ce dossier et, le cas échéant, qu’avez-vous l’intention de faire pour que les comploteurs soient pourchassés et punis ?
M. le président
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Christian Hutin
Un ancien socialiste !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Dans ce dossier entre Veolia et Suez, l’État a constamment poursuivi trois objectifs, à savoir la préservation de l’emploi et des implantations, le maintien d’une concurrence saine entre les différents opérateurs de ce secteur sur le territoire français, et la volonté que les choses se passent de la manière la plus amicale possible, et en aucun cas dans le cadre d’une OPA hostile.
Vous avez demandé à M. le Premier ministre de prendre position au sujet d’un article de presse que vous avez cité. En réalité, il suffisait d’écouter les déclarations du Gouvernement qui, par la voix de son porte-parole, a déjà démenti l’intégralité de l’article. J’ajouterai quelque chose qui peut vous paraître étonnant : lorsqu’on est minoritaire dans un conseil d’administration, on peut être mis en minorité – c’est la règle. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et FI.)
M. Alexis Corbière
Ce n’est pas sérieux !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
L’État assume le fait de défendre les trois objectifs que je vous ai cités et sur lesquels nous restons arc-boutés. Les administrateurs d’Engie n’ont pas suivi la position d’État, ce qui est leur droit, même si nous le regrettons.
M. Ugo Bernalicis
Vous nous prenez pour des cons !
M. Pierre Cordier
Quelle perspicacité, quelle intelligence !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Cela dit, il ne s’agit pas d’une prise de contrôle, mais d’une première étape.
M. Christian Hutin
L’État n’est pas respecté !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Nous sommes convaincus qu’il y aura encore des discussions et qu’ils peuvent encore réussir à mettre au point entre eux un scénario qui ne soit pas sur le mode hostile et qui, je le répète, soit de nature à préserver l’emploi, les implantations et la concurrence.
M. Alexis Corbière
Voilà qui est très convaincant…
M. Christian Hutin
La France, c’est la France, et l’État, c’est l’État !
Situation dans le Haut-Karabakh
M. le président
La parole est à Mme Danièle Cazarian.
Mme Danièle Cazarian
Monsieur le ministre des affaires étrangères, dans quelques heures s’achèvera le seizième jour de guerre au Haut-Karabakh : seize jours et seize nuits d’horreur, de bombardements délibérés des populations civiles d’Artsakh et d’Arménie. Les journalistes envoyés sur place parlent d’un déluge de missiles, de villes devenues fantômes, de l’enfer de Stepanakert, la capitale. Amnesty International a, de son côté, dénoncé l’usage d’armes à sous-munitions, ces armes qui n’ont pour objet que la destruction aveugle des populations civiles. Des crimes de guerre sont commis en ce moment-même au Haut-Karabakh. C’est la mort qui attend les Arméniens.
Depuis seize jours, les pays qui président le groupe de Minsk, au premier rang desquels la France, appellent à un cessez le feu et haussent le ton. Je sais que la diplomatie française et vous-même ne ménagez pas vos efforts mais la donne a changé. L’Azerbaïdjan est désormais soutenue par la Turquie qui lui apporte une aide diplomatique et militaire, la fournit en armes, en drones et en stratèges de guerre.
Le Président de la République a clairement affirmé que l’offensive azerbaïdjanaise était injustifiée, que l’envoi de mercenaires djihadistes par la Turquie constituait le franchissement d’une ligne rouge et qu’il ne l’accepterait pas. Il est temps de dire stop au bellicisme d’Ankara, porteur d’un risque majeur d’internationalisation du conflit, comme l’a souligné l’Union européenne. (M. Guillaume Larrivé applaudit.)
Monsieur le ministre, face à ces constats, une position de stricte neutralité n’est plus tenable. Au Haut-Karabakh, ce sont nos amis qui combattent dans un rapport de force inégal. Vous connaissez mon histoire de petite-fille de rescapés du génocide arménien, mais dans cet hémicycle, sur tous les bancs, dans un consensus inédit de la représentation nationale, je veux le dire haut et fort : nous sommes tous des Arméniens. Dans toute la France, nos collectivités s’investissent, des régions, des départements, des communes votent jour après jour… (Applaudissements sur tous les bancs.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères
Vous faites référence au conflit du Haut-Karabakh,…
M. Pierre Cordier
Oui c’est bien ça !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre
…l’un des plus graves depuis l’effondrement de l’URSS. De nombreuses victimes civiles sont à déplorer. Vous avez rappelé que le Président de la République s’était exprimé…
M. Pierre Cordier
Qui a eu peur ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre
…sur les conséquences graves de l’internationalisation de ce conflit, internationalisation engagée par la Turquie au travers de livraisons d’armes et de l’envoi de mercenaires.
J’entends souligner trois points en réponse à votre intervention. D’abord, je comprends l’émotion que suscite en France ce conflit, avec toutes ses victimes et le ciblage inacceptable des populations civiles.
M. Jérôme Lambert
De part et d’autre !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre
Cette émotion légitime exprime la proximité des liens humains, culturels, historiques qui nous lient à l’Arménie. Je connais votre histoire, je la respecte et je comprends votre émotion. Nous avons en effet une relation bilatérale étroite avec ce pays.
Vous le savez, nous entretenons aussi une relation de longue date avec l’Azerbaïdjan. Nous devons donc, en tant que coprésident du groupe de Minsk, utiliser des canaux bilatéraux pour faire pression sur les deux parties et consolider le cessez-le-feu conclu à Moscou dans la nuit de samedi à dimanche, en présence de mon représentant et du représentant américain, pour que les deux parties respectent strictement ce cessez-le-feu et que les affrontements cessent.
Je rappelerai un dernier point. Le mandat que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l’OSCE, nous a confié en 1994, ainsi qu’à la Russie et aux États-Unis, pose une exigence d’impartialité de la France dans le contexte de la crise du Haut-Karabakh. Nous ne serions plus légitimes si nous prenions parti pour l’un ou l’autre des pays. Nous ne rendrions pas service à la qualité de notre relation bilatérale avec l’Arménie si nous adoptions une posture déséquilibrée qui remettrait en cause le rôle que nous jouons dans le cadre du groupe de Minsk et l’influence que nous pouvons avoir sur chacune des parties dans cette crise. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe FI. – M. Bruno Joncour applaudit également.)
M. Jérôme Lambert
Quel esprit de décision !
Soutien aux associations sportives
M. le président
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Monsieur le Premier ministre, le projet de loi de finances pour 2021 est votre premier budget et, à ce stade, cent jours après votre installation à Matignon, les associations restent les grandes oubliées.
Laissez-moi vous donner un exemple tout simple : celui des clubs sportifs, et je ne parle pas des clubs professionnels qui sont eux aussi très inquiets en ce moment ; je parle des petits clubs comme ceux de chez moi : les clubs de Charencey, L’Aigle, Vimoutiers, Saint-Ouen-Sur-Iton, les Aspres, pour ne parler que de quelques-uns.
Que nous dit le terrain ? Il nous dit que les associations sont aujourd’hui grandement fragilisées. Il nous dit que la crise a eu des effets sur le fonctionnement général d’associations qui n’ont plus les ressources qu’elles tiraient d’activités comme les lotos ou les kermesses. Il nous dit enfin que l’impact financier de la crise ouvre des perspectives inquiétantes : le dépôt de bilan, voire l’impossibilité de maintenir des effectifs salariés quand elles en ont.
Pourtant le plan de relance ne fait qu’effleurer le sujet et le monde associatif ne voit rien venir. L’équation est simple : pas d’argent, pas d’éducateurs et sans éducateurs, ce sont des jeunes qui restent sur le carreau. Ma question est tout aussi simple : que compte faire le Gouvernement pour que ces associations et, par ricochet, la dynamique des territoires, ne s’éteignent pas ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Pierre Cordier
Et des associations !
M. Maxime Minot
Il ne fait pas campagne celui-là ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports
Ce problème est évidemment très important, madame la députée, et vous avez bien raison de le soulever, le monde associatif ayant, comme d’autres secteurs de notre société, souffert du confinement et de l’ensemble des difficultés liées à la crise sanitaire. L’exemple que vous avez choisi des associations œuvrant dans le domaine sportif l’illustre parfaitement tant il concentre les difficultés éprouvées par tous les acteurs économiques pendant le confinement, auxquelles s’ajoutent celles rencontrées pour reprendre leur activité et attirer des adhérents.
Roxana Maracineanu,…
M. Damien Abad
La ministre des sports ne sert à rien !
M. Fabien Di Filippo
Son emploi est fictif !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre
…Sarah El Haïry et moi-même sommes bien sûr complètement mobilisés sur cette question. Vous le savez, plus de 3 milliards d’euros ont été consacrés pendant le confinement au monde sportif, notamment aux associations sportives, au titre du soutien à l’économie. À cela se sont ajoutées des mesures incitatives au moment de la rentrée. Nous avons lancé plusieurs campagnes d’adhésion aux associations sportives, dont l’une, « Envie de sport », au plus près des territoires, assorties de mesures très volontaristes sur le plan financier. L’Agence nationale du sport consacre ainsi 15 millions d’euros à un fonds de soutien aux associations, notamment aux petits clubs.
M. Fabien Di Filippo
C’est quoi 15 millions ? Vous savez combien il y a d’associations ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre
En outre, 122 millions seront consacrés au volet sport du plan de relance.
Notre action en la matière ne se résume bien sûr pas à cela puisque c’est l’ensemble de l’action gouvernementale qui sera totalement mobilisée au service des associations et du monde sportif – mais cela excède le temps de cette réponse. (Mme Françoise Ballet-Blu applaudit.)
M. Pierre Cordier
Il faudra une question écrite !
M. le président
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Vous venez de dresser un état succinct de ce qui a été fait, monsieur le ministre, mais vous ne proposez aucune piste concrète.
M. Damien Abad
Rien !
Mme Véronique Louwagie
Pour ma part je vous en propose deux : premièrement, rétablir les contrats aidés pour ces associations – c’est une vraie demande de leur part ; deuxièmement, mettre en place un fonds de solidarité en faveur du monde associatif. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, FI et GDR.)
M. Pierre Cordier
Rendez l’argent !
Mme Véronique Louwagie
Comme les sportifs le disent, la balle est dans votre camp : saisissez-la. N’oublions pas que les conséquences de la crise continuent à se faire sentir. Sauvez nos associations. (Mêmes mouvements.)
Reconnaissance du covid-19 comme maladie professionnelle pour les soignants
M. le président
La parole est à M. Christian Hutin.
M. Christian Hutin
« Tous les professionnels soignants malades du covid seront reconnus au titre des maladies professionnelles, sans exception », déclarait le 21 avril 2020 le ministre des solidarités et de la santé, M. Olivier Véran. Voilà trois semaines, mardi, a été signé un arrêté dont je me contenterai de dire, si je suis très poli, qu’il est extrêmement restrictif. Il est tout petit, minable.
M. Alexis Corbière
Il s’est arrêté !
M. Christian Hutin
Au lendemain de cet arrêté, les présidents des grands syndicats français disent qu’il est méprisant. Monsieur le ministre, je vous demande de revenir sur cet arrêté,…
M. Fabien Di Filippo
Est-ce la guerre des gauches ?
M. Christian Hutin
…qui est absolument terrible – je pourrais en donner un exemple très simple. Politiquement, cet arrêté ne peut pas être maintenu tel quel. On ne peut pas dire que ces gens qui ont servi la France ne seront pas servis comme la France doit les servir.
Par ailleurs, le député Raphaël Gérard, que je ne connais pas et qui doit être un type extraordinaire, en a bavé comme un malade, comme beaucoup de types ici – parce que certains, parmi nous, en sont morts. Quand on voit ce que peuvent être les séquelles du covid, on comprend que vous devez absolument revoir votre copie, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. Jean-Paul Dufrègne
Il a raison !
M. le président
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
Monsieur le député, vous confondez tout, et c’est bien dommage. (« Oh ! sur les bancs du groupe LR. – Exclamations sur les bancs des groupes FI et GDR.)
Mme Marie-George Buffet
Quel mépris !
M. Olivier Véran, ministre
Votre question est « cash », ma réponse aussi !
M. Christian Hutin
J’aime ton mépris et ta modestie !
M. Olivier Véran, ministre
Le tutoiement n’est pas indispensable, monsieur le député.
M. Maxime Minot
Ce n’est plus un melon : c’est une pastèque !
M. Pierre Cordier
Il y a quelques mois, tu siégeais sur les mêmes bancs ! Ne renie pas tes amitiés !
M. Olivier Véran, ministre
Le décret auquel vous faites allusion porte sur la reconnaissance obligatoire et automatique comme maladie professionnelle de toute maladie causée par le covid chez un soignant ou un professionnel des aides ou des services à domicile. Qu’est-ce que cela signifie ?
M. Christian Hutin
Tu me prends pour un imbécile ?
M. Olivier Véran, ministre
Cela signifie qu’il faut qu’il y ait une maladie professionnelle évolutive liée au covid, comme dans le cas d’une intoxication à l’amiante ou d’un accident. Nous avons retenu un seuil d’invalidité de 10 %, soit un chiffre très faible, ce qui signifie que si un soignant ou aide à domicile conserve la moindre séquelle respiratoire, on ne lui demande pas de démontrer qu’il a été contaminé dans le cadre de son activité professionnelle, mais on reconnaît de fait qu’il s’agit d’une maladie professionnelle. Voilà ce que dit le décret, et c’est complètement nouveau. Ainsi, un soignant contaminé par le covid et qui ne garde pas de séquelles n’est pas considéré comme atteint de maladie professionnelle, car c’est la définition même de la maladie professionnelle que de laisser des séquelles au long cours. Si donc il y a séquelles, la reconnaissance est automatique. Pour ceux qui ne sont pas des soignants ou des acteurs du domicile, une reconnaissance est possible au terme d’une expertise, comme c’est le cas pour tous les cas d’intoxication ou de maladie professionnelle. Voilà le travail que nous avons fourni et l’objet de ce décret. (Mme Caroline Abadie et M. Cyrille Isaac-Sibille applaudissent.)
M. le président
La parole est à M. Christian Hutin.
M. Christian Hutin
Monsieur le ministre, une voie législative est possible, proposée par Régis Juanico, Valérie Rabault, votre serviteur et l’ensemble des députés du groupe Socialistes et apparentés. Nous avons tout ce qu’il faut pour défendre ensemble la création d’un fonds d’indemnisation des victimes – pas seulement ceux qui étaient au premier rang, mais aussi les autres, comme la caissière de Calais… (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre
Je le répète : c’est la première fois dans l’histoire du droit que la reconnaissance d’une maladie professionnelle est automatique, je vous renvoie à la branche AT-MP – accidents du travail et maladies professionnelles – qui figure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Pour toutes les autres maladies, la reconnaissance est tout à fait possible au terme d’une expertise, comme cela existe dans le droit commun depuis des années.
M. Christian Hutin
Tu es passé de l’autre côté de la barricade !
M. Olivier Véran, ministre
Par ailleurs, je ne vois aucune difficulté à aborder la question de l’indemnisation des aléas ou des indemnisations spécifiques, car cela fait partie du débat parlementaire : la porte est ouverte. Monsieur le député, reconnaissons que les choses ont été bien amenées jusqu’à présent. Continuons dans le consensus. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. Christian Hutin
Victor Hugo ! La barricade !
Nombre de lits de réanimation
M. le président
La parole est à M. Hubert Wulfranc.
M. Hubert Wulfranc
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, le 6 octobre, à l’hôpital Rothschild, le Président de la République, répondant à une interpellation des soignants sur la situation sanitaire, disait : « Ce n’est pas une question de moyens, mais d’organisation. » Il ajoutait : « On ne va pas créer des postes et des lits parce que le covid arrive là. C’est impossible. » Nous prenons ces propos comme une véritable gifle pour les Français, compte tenu de ce que vit notre pays. Comme chacun en a fait le constat, les hôpitaux et les soignants souffrent d’un manque de lits et de personnel. Certes, nous payons en cela le désengagement des gouvernements précédents, que vous avez accentué depuis 2017 en supprimant 7 600 lits et en prélevant près de 4 milliards d’euros sur le budget des hôpitaux. Vous affirmez aujourd’hui pouvoir atteindre le chiffre de 12 000 lits de réanimation, mais il est avéré que le personnel fait défaut pour faire fonctionner les 5 000 lits existants : 10 % d’entre eux sont fermés en permanence et il est désormais demandé aux soignants de renoncer à leurs congés.
Ma question est donc la suivante : si vous n’êtes pas en mesure d’embaucher et de former du jour au lendemain depuis six mois, comme l’a indiqué M. le Premier ministre – propos que vous avez largement nuancés tout à l’heure en disant que vous embauchiez et que vous formiez –, et si nous ne pouvons pas mener nos personnels à l’éreintement total lors de cette deuxième vague, comment allez-vous ouvrir, si nécessaire, ces 12 000 lits ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
M. le président
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
Je confirme qu’il faut toujours dix à douze ans pour former un anesthésiste-réanimateur… Cette majorité a supprimé le numerus clausus voilà deux ans. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) C’est, hélas, trop tard, et il a fallu que nous arrivions pour le supprimer. (« Oh ! » sur les bancs du groupe SOC.)
M. Pierre Cordier
Il faut dire ça à Marisol Touraine !
M. Olivier Véran, ministre
C’est un fait. Le numerus clausus existe depuis quarante ans.
M. Fabien Di Filippo
Dommage que vous n’ayez pas été dans la majorité en 2012 !
M. Pierre Cordier
Un commentaire, Mme Bachelot ? Vous n’avez pas l’air d’accord !
M. Olivier Véran, ministre
L’année où j’ai passé le concours de médecine, nous étions 3 700 médecins formés par an en France. Ce chiffre est désormais de plus de 9 000 et je souhaite qu’il y en ait demain encore davantage pour combler les trous, en ville comme à l’hôpital – mais cela prend du temps.
Comme je l’ai dit tout à l’heure, il faut beaucoup de temps pour former un infirmier en service de réanimation, cela ne se fait évidemment pas en six mois. Cependant, les hôpitaux – je ne parle pas du Gouvernement – ne se sont pas tourné les pouces et ont engagé des programmes de formation express, notamment sur simulateur, comme je l’ai vu dans le territoire de Belfort et à Grenoble la semaine dernière. Sept cent cinquante infirmières ont été formées pour prêter main-forte pour la seule Île-de-France. Ça compte, et c’est important.
Vous avez raison, monsieur le député, d’évoquer un enjeu en termes de ressources humaines, avec des soignants fatigués et mobilisés, et avec notre volonté de ne pas annuler ou retarder des soins qui n’ont rien à voir avec le covid, mais qui sont essentiels pour la santé des Français. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous luttons le plus farouchement possible et avec le plus grande rigueur contre la circulation de ce virus, afin de ne pas nous trouver dans une situation de catastrophe qui nous obligerait à nouveau à déprogrammer tous les soins dans les hôpitaux pour orienter toutes les ressources vers les lits de réanimation.
Le 15 avril dernier, au cœur de la tempête, le nombre de lits de réanimation a atteint le chiffre de 10 700. Nous avons désormais 12 000 respirateurs et des médicaments de réanimation pour soigner jusqu’à 29 000 malades – certes pas même temps, car vous imaginez bien que nous n’aurions pas les lits pour cela. Nous appelons toutes les bonnes volontés et les soignants à venir renforcer les effectifs et à se préparer dans l’hypothèse de cette deuxième vague. Je le répète, cela doit faire l’objet d’un consensus national très fort. Face à cette vague, nous sommes tous dans le même bateau. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le président
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour les neuf secondes restantes de son temps de parole.
M. Hubert Wulfranc
Monsieur le ministre, il y a tout de même là de la malveillance délibérée. Si j’écoute les annonces qui viennent d’être faites au CHU de Rouen-Rouvray, quatre-vingts suppressions de lits sont prévues en psychiatrie…
Vaccination obligatoire des personnels de santé
M. le président
La parole est à M. Philippe Berta.
M. Philippe Berta
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, je tiens à associer à ma question mon collègue Michel Fanget.
Vingt ans, c’est le gain d’espérance de vie obtenu par l’espèce humaine dans nos sociétés occidentales en quelques décennies. Si l’offre thérapeutique a explosé et explose dans bien des domaines, vaccinations et antibiotiques n’en restent pas moins la base de cette progression. Si l’antibiothérapie fait l’objet d’abus en santé humaine et animale, la vaccination a été et reste la cible régulière de fausses nouvelles, amplifiées par les réseaux sociaux et quelques mauvais esprits. L’éradication de la poliomyélite par la voie vaccinale en Afrique est pourtant un nouveau succès, tout juste annoncé dans l’Organisation mondiale de la santé.
Certains feignent de ne pas savoir que l’accès à une thérapie repose sur un rapport bénéfices-risques favorable, ce qui n’exclut aucunement la possibilité d’effets secondaires rencontrés dans quelques cas. La recherche de thérapeutiques pour contrer la pandémie covidique au moyen de nombreux essais cliniques réalisés dans le monde entier, basée sur le repositionnement d’antiviraux préexistants, n’a pas, à ce jour, abouti aux résultats escomptés. Notre espoir réside essentiellement dans l’obtention d’un ou plusieurs vaccins dans les mois voire les années à venir, même si nous mesurons aussi la difficulté de sa bioproduction à destination des 7 milliards d’êtres humains.
Cependant, les sondages qui se suivent et se ressemblent attestent de la méfiance, voire du rejet exprimés par une bonne part de la population française envers l’acte vaccinal, indépendamment de la cible et de l’urgence sanitaire. N’est-il pas temps, monsieur le ministre, de développer une communication massive,…
M. Pierre Cordier
Il est grand temps !
M. Philippe Berta
…empreinte de culture scientifique, à l’adresse du plus grand nombre, sans oublier le monde de l’éducation et de l’enseignement supérieur ?
Nombre d’infectiologues et d’immunologistes lancent l’alerte depuis quelques semaines en évoquant le risque d’une épidémie de grippe surajoutée dans les jours à venir. Cette double circulation virale pourrait faire encourir un risque vital majeur, en particulier aux plus âgés d’entre nous. Ne serait-il pas indispensable d’envisager la vaccination obligatoire des personnels de santé et des personnels accompagnants ? Aurons-nous les doses de vaccin antigrippal nécessaires pour faire face à ce qui risque d’être une demande sans égal ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
M. le président
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
Dans le pays de Pasteur, force est de reconnaître que le recul de la confiance des Français envers la vaccination est croissant et de plus en plus grave. Il est parfois alimenté par une partie des élites – je pense notamment à des élus qui siègent sur certains de ces bancs et à des maires de grandes communes, dont le discours sceptique contribue à la perte de confiance de la population.
C’est un débat que nous devrions avoir même en dehors de la crise épidémique : comment restaurer la confiance envers la parole scientifique dans ce qu’elle a de raisonné, et non de disparate, d’éclaté ou de prophétique – d’ailleurs, depuis le début de la crise, les prophéties, vous en conviendrez, ont toutes percuté le mur de la réalité ?
Nous devons donc encourager les Français à se faire vacciner. Je l’ai dit : s’agissant du covid-19, un vaccin doit être sûr et efficace. Quant à la vaccination antigrippale, la campagne commence ce jour, le 13 octobre, et vise en priorité les populations vulnérables ainsi que les soignants et les acteurs de l’aide à domicile qui sont parfois en contact avec des personnes fragiles et vulnérables. Notre objectif est d’élever le niveau de couverture de ces populations fragiles, sachant que la France est très en retard. L’Organisation mondiale de la santé recommande en effet d’atteindre au moins 75 % du public cible tandis que nous ne dépassons plus 50 % depuis des années – y compris parmi les soignants.
Nous nous sommes interrogés, monsieur le député, sur l’opportunité de rendre le vaccin antigrippal obligatoire pour les soignants. Nous ne le ferons pas pour une raison simple : nous avons besoin de la mobilisation de tous les soignants – je répondais à l’instant à M. Wulfranc sur ce point – et nous craignons que le fait de rendre la vaccination obligatoire ne se traduise par des retraits ; or, encore une fois, nous avons besoin de tous les soignants.
En revanche, nous encourageons les soignants – et comptons sur toutes les bonnes volontés du pays, parlementaires, élus, scientifiques, citoyens, pour les y encourager aussi – à se faire vacciner, ainsi que les populations vulnérables face à la grippe. N’ajoutons pas le fléau d’une nouvelle épidémie à celle que nous subissons ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Gestion de l’épidémie à l’école
M. le président
La parole est à Mme Sabine Rubin.
Mme Sabine Rubin
De plateau de télévision en plateau de télévision, monsieur le ministre de l’éducation nationale, vous n’avez cessé de répéter que tout était prêt pour la rentrée. Or rien n’était prêt en septembre, hormis un protocole inapplicable, écrit à la va-vite quatre jours avant la rentrée et laissé à la libre interprétation de chaque collectivité.
M. Alexis Corbière
C’est vrai !
Mme Sabine Rubin
Ainsi, la distanciation sociale n’est ni respectée ni respectable : locaux exigus, insuffisance du nombre d’agents d’entretien, masques et produits en sous-nombre, entre autres. Alors que le virus progresse partout, notamment parmi les jeunes, et que les contraintes sanitaires drastiques se multiplient, vous, monsieur le ministre, ne cessez paradoxalement de relâcher votre surveillance : les cas contacts ne sont pas tracés si l’élève est asymptomatique et, en deçà de trois cas positifs, les classes ne sont pas fermées.
Pourtant, Santé publique France nous alerte : 36 % des 1 001 clusters en cours d’investigation se trouvent en milieu scolaire ou universitaire et, comme l’a rappelé le Premier ministre, on observe un rajeunissement des personnes hospitalisées. D’autre part, un article du magazine Reporterre nous apprend aujourd’hui que les masques de la marque Dim que vous avez distribués aux personnels présentent un risque sanitaire et environnemental car ils sont traités avec des zéolithes d’argent.
Nous avons tous à cœur, monsieur le ministre, de protéger la santé des 12 millions d’élèves et des personnels qui les forment et les encadrent. Or – salutaire rappel – le 31 mai, vous disiez ceci : « Si le virus est toujours là à la rentrée, il y aura toujours la règle des groupes restreints. » Un mois après la rentrée, la deuxième vague submerge les écoles. Comment entendez-vous vous mettre en conformité avec vos propres déclarations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports
L’école est l’épine dorsale de notre pays et de notre République. À chacune des réussites qu’elle enregistre, nous devrions nous réjouir ensemble plutôt que chercher de vaines polémiques. Je sais que votre registre est plutôt celui des vaines polémiques ; je vais donc vous répondre. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
M. Alexis Corbière
Voilà déjà vingt secondes de perdues !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre
Tout d’abord, comme je vous l’ai dit et répété, la France fait partie des pays qui ont le mieux réussi leur rentrée scolaire.
M. Alexis Corbière
Grâce à vous ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre
Vous devriez en être heureuse, madame la députée : en France, 12 millions d’élèves sont rentrés à l’école, et bien des pays aimeraient pouvoir en dire autant. Réjouissez-vous si vous aimez l’école, tout simplement !
M. Ugo Bernalicis
Vous êtes un génie !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre
D’autre part, vous vous interrogez sur le respect des conditions sanitaires et prétendez que le protocole sanitaire a été préparé quatre jours avant la rentrée. Je me souviens de vous nous reprochant de l’avoir élaboré au mois de juillet en affirmant qu’à la fin août se poserait un problème d’adaptation. En réalité, nous l’avons en effet adopté en juillet puis adapté à la fin août car la méthode la plus pertinente consiste à fixer un cadre à l’avance puis à prendre des mesures d’adaptation en fonction de la situation.
Les chiffres dont nous disposons ne sont pas mauvais ; ils sont très comparables aux autres secteurs de la société. Lorsque Santé publique France agrège les chiffres des écoles, collèges, lycées et universités, la focale n’est pas adaptée parce que la réalité des universités n’a rien à voir avec celle des écoles, des collèges et des lycées, et parce que la population concernée dépasse alors 15 millions de personnes ! Il est normal, dès lors, que les chiffres soient élevés.
Quant à ce qu’on appelle des clusters et qu’en bon français on devrait appeler des foyers, ils ne représentent que 20 % des contaminations.
En clair, vos propos sont destinés à effrayer mais ne correspondent pas à la réalité d’une contamination particulière dans les écoles. Depuis sept jours, 5 279 élèves sont atteints par le virus, soit 0,04 % du nombre total des élèves. En outre, comme vous le savez, ce virus ne provoque pas chez les enfants de symptômes particulièrement graves. Seules vingt-quatre structures scolaires sur 60 000 sont fermées. Vous le voyez, rien ne sert d’inquiéter ! (M. Rémy Rebeyrotte applaudit.)
M. le président
La parole est à Mme Sabine Rubin.
Mme Sabine Rubin
Vous savez pourtant, monsieur le ministre, que les enfants fréquentent des adultes. D’autre part, vous qui aimez les comparaisons avec les pays voisins devriez regarder du côté de l’Italie, qui a ouvert 5 000 classes supplémentaires et en a agrandi 5 000 autres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
Verdissement des garanties à l’export
M. le président
La parole est à M. Anthony Cellier.
M. Anthony Cellier
Depuis bientôt deux ans, les parlementaires de la majorité travaillent avec le Gouvernement afin de mettre fin aux garanties publiques à l’export pour des projets d’énergie fossile. Ces garanties de l’État sont un levier puissant dont nous disposons pour ne plus financer à l’étranger des projets que nous nous interdisons sur notre propre sol. Elles constituent également un levier important pour préparer les entreprises françaises aux enjeux majeurs de la décarbonation qui seront demain, j’en suis convaincu, les critères de performance et de compétitivité sur les marchés internationaux.
Je me réjouis donc des avancées que nous avons accomplies en moins de deux ans concernant la fin du soutien au charbon, aux hydrocarbures non conventionnels ou encore au torchage de routine, et la mise en place d’outils de mesure de l’empreinte carbone du portefeuille de Bpifrance.
Hier, de nouvelles dispositions ont été annoncées dans le cadre du plan climat pour les financements export : la mise en place d’un mécanisme de bonus dédié aux entreprises qui mettent en œuvre des projets durables et en pointe sur la transition énergétique, la fin dès 2021 du soutien aux pétroles extra-lourds et aux sables bitumineux, la fin pour 2025 – c’est-à-dire dans cinq ans – du soutien aux nouveaux gisements pétroliers et la fin du soutien aux nouveaux gisements de gaz – que je souhaite effective bien avant 2035 si nous voulons être en phase avec l’Accord de Paris.
Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la relance, l’enjeu climatique est mondial, la solution est pour partie européenne, l’exemplarité doit être nationale. Si la France entend devenir la plus grande économie décarbonée d’Europe, pouvez-vous nous dire comment elle fédère et entraîne les autres États vers la fin du soutien à l’export des énergies fossiles, tant au niveau européen que mondial ? (M. François de Rugy applaudit.)
M. le président
Je précise que l’absence d’un certain nombre de membres du Gouvernement est liée au respect des règles de distanciation, et non à des activités ludiques. (Sourires.)
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Vous avez dit l’essentiel dans votre question, monsieur le député. Vous travaillez avec de nombreux parlementaires – je pense à MM. Holroyd et Colas, au rapporteur général du budget Laurent Saint-Martin ou encore à Bénédicte Peyrol, bref à tous ceux qui vous accompagnent – pour bâtir cette stratégie de décarbonation, y compris en ce qui concerne le financement de l’export, de sorte que l’État, dans son comportement et dans ses financements, soit exemplaire à l’export tout comme il entend l’être pour l’économie nationale.
Le travail que vous avez fourni a nourri la stratégie du Gouvernement en la matière. Hier, vous avez d’ailleurs participé, aux côtés de Bruno Le Maire, à la présentation de cette stratégie de financement de l’export. Vous l’avez dit, à partir du 1er janvier 2021 – c’est-à-dire demain –, nous n’accorderons plus de garanties à l’export aux exploitations de pétroles extra-lourds et d’hydrocarbures non conventionnels. De même, à partir du 1er janvier 2025, nous cesserons de garantir les opérations visant à exploiter de nouveaux gisements de pétrole.
Pour ce qui concerne le gaz, l’échéance est fixée à 2035 et sera actualisée en permanence. La volonté est là aussi de s’inscrire dans le long terme, mais s’il est possible de le faire plus tôt, nous le ferons, conformément aux attentes que vous avez exprimées, vous et les parlementaires que j’ai nommés.
Pour avancer en la matière, nous ferons en sorte d’accompagner la production d’électricité à l’étranger uniquement lorsque ces nouvelles unités de production permettront de renouveler et d’améliorer le mix énergétique des pays d’accueil.
Il faut aller plus loin, et ne pas nous contenter d’une position défensive ou d’interdiction. C’est pourquoi nous envisageons d’accorder des bonus aux projets qui respecteront l’Accord de Paris. C’est aussi pourquoi nous voulons faire preuve d’exemplarité par une cotation. Il nous faut entraîner nos partenaires, les signataires de l’Accord de Paris. Nous y travaillerons avec vous au cours des prochaines semaines.
Politique sanitaire
M. le président
La parole est à Mme Nathalie Serre.
Mme Nathalie Serre
Monsieur le Premier ministre, savez-vous qui a dit récemment : « On n’y comprend plus rien, ce n’est pas bien géré et ce n’est pas bien expliqué » ?
M. Fabien Di Filippo
C’est Macron !
Mme Nathalie Serre
C’est le Président de la République lui-même. La presse nous présente d’ailleurs son intervention télévisée de demain soir comme un recadrage du Gouvernement.
M. Boris Vallaud
Ah…
Mme Nathalie Serre
Monsieur le Premier ministre, la réalité de vos cent premiers jours, c’est que votre gestion d’aujourd’hui est pire que celle d’hier,…
M. Boris Vallaud
C’est dire !
Mme Nathalie Serre
…comme si vous n’aviez rien appris de vos erreurs.
M. Fabien Di Filippo
Je ne pense pas que Castex finira le mandat : les Français ne l’aiment pas !
Mme Nathalie Serre
Entre confinement, déconfinement et reconfinement, les Français ont bien du mal à vous suivre tant vous naviguez à vue, sans ligne directrice et sans méthode. Pire, votre communication et votre gestion ont tendance à opposer les Français : les jeunes aux aînés, les cafetiers aux restaurateurs, les rassemblements privés aux soirées organisées, les urbains aux ruraux.
Nos compatriotes sont prêts à faire beaucoup de sacrifices pour enrayer cette pandémie, mais ils ont besoin de clarté et de cohérence pour adhérer à vos mesures.
On nous dit que de nouvelles décisions devaient être annoncées dans les prochaines heures, que le Gouvernement pourrait prendre des mesures de restriction des libertés jusqu’à la fin mars 2021. Le climat est anxiogène au sein de la population française ; les élus locaux et les acteurs de terrain se sentent abandonnés par l’État qui leur impose des décisions d’en haut ; les secteurs économiques touchés veulent se rebeller.
Monsieur le Premier ministre, entendez-vous l’inquiétude de nos concitoyens ? Alors que la crise sanitaire est appelée à durer, quand allez-vous proposer une politique claire et cohérente qui permettra à tous les Français de continuer à vivre au temps de ce virus ? Faudra-t-il pour cela attendre demain soir et la déclaration du Président de la République qui ne ferait donc plus confiance à votre Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Plusieurs députés du groupe LR
Très bien !
M. le président
La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Un député du groupe LR
Et des masques !
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé
Comme on dit, madame la députée : tout augmente ! Avant, vous attendiez que nous ayons fait des annonces pour les déclarer nulles et dire qu’elles n’auraient pas d’effet. Maintenant, vous anticipez : nous n’avons pas encore ouvert la bouche que vous êtes déjà en train de les déclarer nulles ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Fabien Di Filippo
C’est le Président de la République qui a dit ça !
M. Olivier Véran, ministre
C’est quand même formidable. Je voudrais vous remercier pour toute l’énergie que vous mettez, en tant que parlementaire, à aider le Gouvernement et les Français à lutter avec efficacité contre une épidémie qui tue (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM), qui fait des malades, qui remplit nos hôpitaux.
M. Pierre Cordier
Un peu de modestie, monsieur Véran ! Quand on voit comment vous avez géré les masques !
Mme Valérie Beauvais
Soyez modeste !
M. Olivier Véran, ministre
Franchement, je crois que c’est être parfaitement à la hauteur de vos fonctions que de vous adonner à une polémique comme celle-ci.
Personne n’a prétendu que l’épidémie de coronavirus était stable, ni en France ni à l’étranger. Personne n’a considéré avoir, à ce jour, toutes les connaissances sur le virus permettant de prendre les bonnes mesures, pile-poil, au bon moment.
En revanche, je peux vous dire que nous faisons le maximum, avec les scientifiques, les médecins et les élus dans les territoires – qui tous éprouvent la nécessité absolue de faire preuve de cohésion et de courage, ce qui ne semble pas être votre cas –, pour nous battre aux côtés des Français contre cette épidémie et finir par vaincre ce virus.
M. Fabien Di Filippo
À chaque fois qu’il est interrogé, il perd ses moyens !
M. Olivier Véran, ministre
Nous avons présenté des mesures et notre stratégie, et nous le referons à chaque fois que ce sera nécessaire. Ces mesures doivent être adaptées à chaque territoire, à l’état de circulation du virus dans chaque métropole, dans chaque département. Elles sont ajustées pour ne pas réduire inutilement les libertés publiques. Nous adaptons le niveau de contraintes, j’y insiste, à celui de circulation du virus afin de protéger les hôpitaux, de sauver des vies et d’en finir avec l’épidémie. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Au printemps dernier, sur l’ensemble des bancs, il y avait des députés qui, conscients de la gravité du moment, montraient qu’ils avaient le sens de l’union nationale ; or l’unité, dans la période actuelle, est indispensable. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)
M. Pierre Cordier
M. Véran, l’humilité n’est pas son fort !
Directeurs d’école
M. le président
Avant de lui donner la parole, je suis heureux de souhaiter la bienvenue à notre collègue M. Grégory Labille, devenu député de la cinquième circonscription de la Somme, le 8 octobre dernier, en remplacement de M. Stéphane Demilly. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-I.)
Vous avez la parole, cher collègue.
M. Grégory Labille
Monsieur le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, le samedi 21 septembre 2019, ma collègue Christine Renon se donnait la mort dans l’école maternelle de Pantin, dont elle était directrice, à 58 ans. Elle laissait une lettre dénonçant la dégradation de ses conditions de travail : trois pages détaillant la solitude, le stress et l’accumulation de tâches administratives chronophages.
Le samedi 23 mai 2020, mon collègue Bruno Delbecq, directeur d’école à Saint-Laurent-du-Var, s’est suicidé, à l’âge de 64 ans, alors qu’il allait prendre sa retraite à la fin de l’année scolaire.
Pour avoir été enseignant pendant près de trente ans, dont cinq ans en tant que directeur d’école, j’aurais tendance à dire que rien n’a changé depuis ces deux drames. Pire, les directeurs, que j’ai pu rencontrer, soulignent une dégradation au fil des années : on leur demande de faire toujours plus et mieux avec des moyens humains et matériels limités, une reconnaissance financière insuffisante.
M. Frédéric Reiss
Et ils n’ont toujours pas de statut !
M. Grégory Labille
Si enseigner est le plus beau métier du monde, il ne doit pas devenir une souffrance pour les enseignants. Les directeurs d’école sont des professionnels animés d’une passion réelle, dont les missions sont variées et dont le métier a beaucoup changé au fil des ans.
En présentant la proposition de loi créant la fonction de directeur d’école, adoptée dans cet hémicycle au mois de juin dernier, notre groupe avait formulé diverses propositions par la voix de notre collègue Béatrice Descamps. Or ce texte n’est plus qu’une coquille vide :…
M. Frédéric Reiss
Absolument !
M. Grégory Labille
…abandon de la décharge totale d’enseignement au-delà de huit classes ; rien pour les territoires ruraux ; une aide administrative qui dépendra des communes sans leur octroyer des moyens supplémentaires. Ce texte a suscité beaucoup d’espoirs, ne les laissez pas se transformer en frustration.
Monsieur le ministre, comptez-vous vous saisir de ce vecteur législatif pour améliorer le quotidien de nos directeurs d’école ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I et LR.)
M. Jean-Christophe Lagarde
Très bien !
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports
Vous m’interrogez sur l’un des sujets les plus importants qui soient – celui des directeurs et des directrices d’école, ces dernières étant les plus nombreuses –, et vous avez eu raison de rappeler ces drames qui nous ont tous émus.
Des progrès très importants ont été faits. Vous avez mentionné la proposition de loi de la députée Cécile Rilhac,…
M. Frédéric Reiss
Elle a été vidée de sa substance !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre
…qui montre que nous avançons sur le bon chemin. En revanche, vous n’avez pas fait allusion aux mesures que j’ai prises à la rentrée et que je vais rappeler.
Commençons par la proposition de loi de Madame Rilhac, qui a fait l’objet de très nombreuses concertations et dont vous considérez qu’elle a été vidée de sa substance. D’autres que vous, qui considèrent, eux aussi, qu’il faut améliorer le sort des directeurs d’école, ne sont pas du tout d’accord avec la solution que vous proposez. Avec la députée, nous cherchons à créer un consensus car, s’il reste en effet des progrès à faire, tout le monde ne voit pas le sujet de la même façon. Ce n’est donc pas que le Gouvernement refuse telle ou telle avancée, c’est que nous avons à créer les conditions de ce consensus.
Ensuite, nous avons fait des efforts très importants pour l’école primaire en cette rentrée, lesquels, je l’espère, rejaillissent sur le quotidien des directeurs d’école. Je pense au dédoublement des classes et au taux d’encadrement. En cette rentrée – et c’est inédit –, ce dernier s’est amélioré dans chaque commune de France. À Paris, par exemple, les classes comptent en moyenne deux élèves de moins qu’il y a trois ans. Nous avons par ailleurs créé de nouveaux services civiques, une prime de 450 euros pour les directeurs d’école, des décharges administratives qui seront adoptées l’an prochain dans une proportion qui reste encore à définir.
Nous continuons aussi à travailler avec la députée Cécile Rilhac et dans le cadre du Grenelle de l’éducation qui va commencer courant octobre. Il reste des progrès à faire, je vous l’accorde, mais, je le répète, nous sommes sur la bonne voie et je vous remercie de cheminer avec nous. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Immeuble Le Signal de Soulac-sur-Mer
M. le président
La parole est à M. Benoit Simian.
M. Benoit Simian
Madame la ministre de la transition écologique – ou, devrais-je dire, de l’urgence écologique –, en 2018, à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances, nous avions adopté un amendement magnifique concernant la presqu’île du Médoc.
En effet, l’Assemblée avait décidé d’indemniser à hauteur de 7 millions d’euros, les habitants de l’immeuble Le Signal, situé sur la côte de Soulac-sur-Mer, dont les habitants avaient été expropriés sans ménagement et surtout sans un sou.
Pour replacer la situation dans son contexte, il faut rappeler qu’à la suite des tempêtes de l’hiver 2013-2014 et de la forte érosion qu’elles avaient entraînée, l’immeuble désormais situé à quelques mètres de l’océan avait fait l’objet, le 24 janvier 2014, d’un arrêté municipal d’évacuation et d’interdiction d’occupation, pris par le maire de Soulac-sur-Mer, Xavier Pintat. Face aux risques d’effondrement du bâtiment, les soixante-quinze copropriétaires avaient été contraints d’évacuer les lieux sans qu’une procédure d’expropriation ait été déclenchée, l’érosion dunaire ne faisant pas partie, contrairement à l’érosion de la côte rocheuse – comme chez vous en Bretagne, monsieur le président – des conditions justifiant le recours au fonds Barnier. Les copropriétaires n’ont donc pas pu être indemnisés. Dans sa décision du 16 août 2018, le Conseil d’État a malheureusement confirmé cette injustice. Les copropriétaires ont donc été obligés de payer de leur poche les charges de la copropriété et parfois même de contracter de nouveaux crédits pour financer un bien dont ils sont dépossédés depuis des années.
Cette injustice sociale, nous l’avons réparée, chers collègues, lorsque collectivement, de manière transpartisane, nous avons réorienté, à deux heures du matin, les crédits budgétaires en faveur de ces habitants lésés, et lorsque, avec les équipes de Nicolas Hulot et de Brune Poirson, nous avons débloqué 1 million d’euros pour le désamiantage du bâtiment.
Or nous savons que ce dossier a pâti de lourdeurs administratives du fait d’un vide juridique : le droit français ne reconnaît pas l’érosion comme une catastrophe naturelle.
M. le président
Merci, monsieur le député !
M. Benoit Simian
Madame la ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur ce cas d’espèce ?
M. le président
La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique
Vous l’avez dit, l’immeuble Le Signal a été évacué en 2014. Depuis, nous avons travaillé, avec votre aide et celle de nombreux députés, à l’adoption d’un régime d’indemnisation pour les propriétaires de cet immeuble menacé par le recul du trait de côte, car, en effet, en l’état actuel du droit, il n’existe pas de dispositif permettant d’indemniser les propriétaires de biens atteints par l’érosion.
En 2019, l’État a procédé, à ses frais, au désamiantage de l’immeuble, pour un coût que vous avez rappelé de 1 million d’euros. Puis différents amendements – celui que vous avez déposé sur le projet de loi de finances pour 2019 a été l’un des premiers – ont permis d’adopter une enveloppe de 7 millions d’euros pour indemniser les propriétaires de biens atteints par l’érosion. Enfin, un amendement adopté lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2020, présenté par le Gouvernement, précise les modalités d’indemnisation des propriétaires de l’immeuble.
Il est désormais prévu une indemnité de prise en charge par l’État à hauteur de 70 % de la valeur vénale déterminée, abstraction faite du risque d’effondrement du bien concerné. Les services de l’État, en lien avec la collectivité, travaillent à la mise en œuvre de ces dispositions. La rédaction de deux types de protocoles transactionnels est bientôt achevée : un protocole cadre entre l’État, la commune et l’établissement public de coopération intercommunale – EPCI –, et des protocoles filles entre l’État, l’EPCI et les propriétaires. Le premier sera signé très rapidement, probablement dans le courant du mois d’octobre. Les protocoles filles avec les propriétaires seront signés un peu plus tard car ils nécessitent de rencontrer chacun d’entre eux pour la signature. Les indemnisations seront versées au plus tard à la fin de l’année 2021.
Au-delà des biens concernés à court terme, le Gouvernement entend trouver une solution globale et pérenne pour la gestion du recul du trait de côte – vous pouvez me faire confiance sur ce point –, comme il l’a réaffirmé lors du conseil de défense écologique du 12 février 2020. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Protection des données personnelles
M. le président
La parole est à M. Philippe Latombe.
M. Philippe Latombe
Monsieur le garde des sceaux, la législation européenne est particulièrement soucieuse du droit de chacun au respect de sa vie privée et à la protection de ses données personnelles. Ainsi, en juillet dernier, la Cour de justice de l’Union européenne a invalidé le Privacy Shield, un accord qui autorisait le transfert de données personnelles européennes vers les États-Unis.
Il y a quelques jours, la Cour a également considéré que les fournisseurs de services de communication électronique ne pouvaient se voir imposer une conservation généralisée et indifférenciée des données relatives au trafic et à la localisation sans que le comportement des personnes concernées justifie une telle collecte au regard de l’objectif poursuivi. Elle rappelle ainsi le principe incontournable du respect de la vie privée, un fondement des sociétés modernes démocratiques. Cela signifie, monsieur le garde des sceaux, que notre législation sur ce point et les procédures qui en découlent ne sont pas en règle avec le droit européen.
Les députés du groupe Mouvement démocrate et Démocrates apparentés, soucieux du respect de la vie privée, n’en ont pas moins constaté l’ampleur de l’inquiétude des enquêteurs et des magistrats. La collecte de ces données est en effet jugée cruciale tant pour les investigations que pour les procès qui s’ensuivent. Une vraie incertitude pèse donc sur les procédures pénales en cours dont les éléments de preuve ont été obtenus par une conservation de données contraire au droit européen.
Notre droit national va devoir rapidement s’adapter afin de tenir compte de cette interdiction et prévoir l’exception au principe posé par la Cour de justice de l’Union européenne dans le cadre de menaces graves et persistantes pour la sécurité nationale.
Face à cette potentielle invalidation, qui n’a pas été anticipée en dépit des alertes de notre groupe, comment, monsieur le garde des sceaux, entendez-vous mettre notre droit en conformité avec le droit de l’Union européenne et selon quel calendrier ? (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem, LR et UDI-I.)
M. Philippe Gosselin
Il y a urgence !
M. le président
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
Sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre, nous avons, à plusieurs reprises, avec le ministre de l’intérieur, organisé des réunions sur le thème de la sécurité. Contrairement à ce que vous dites, nous avions anticipé la jurisprudence Tele2, que vient de confirmer la grande chambre de la Cour de justice de l’Union européenne. Cet arrêt, particulièrement touffu, prévoit un certain nombre d’exceptions, notamment en matière de protection de la sécurité intérieure et de lutte contre la grande criminalité.
Nous continuerons, bien sûr, de travailler sur cette question, en veillant, d’une part, à la protection de la liberté individuelle et des données, et, d’autre part, obstinément, à notre sécurité. Je veux donc vous rassurer et vous prie de me croire lorsque je vous affirme qu’avec le ministre de l’intérieur, nous avons déjà engagé un véritable travail – auquel le Parlement sera naturellement légitimement associé.
Tempête Alex dans les Alpes-Maritimes
M. le président
La parole est à Mme Marine Brenier.
Mme Marine Brenier
Chers collègues, ce n’est pas la députée de la nation qui s’exprime devant vous, mais l’une des représentantes de l’ancien comté de Nice, désormais métropole Nice Côte d’Azur. Les Niçois forment un peuple de montagnards : ils ont les pieds dans la Méditerranée et la tête dans les cimes du Mercantour. Nous sommes tous de la Vésubie, de la Roya ou de la Tinée. Ces vallées constituent notre identité.
Je souhaite avant tout vous remercier, monsieur le Premier ministre, ainsi que les membres de votre gouvernement – mais aussi le Président de la République –, non seulement d’être venus dans notre territoire mais aussi pour toutes les annonces qui ont suivi. Vous avez pu mesurer l’incroyable élan de solidarité des Maralpins. Pendant plus d’une semaine, j’ai moi-même conduit le convoi d’approvisionnement destiné aux habitants de la Vésubie aux côtés des agents de la métropole et des bénévoles, qui ont fait un travail formidable. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, UDI-I et LT.)
Merci également aux gendarmes, aux pompiers, aux agents de FORCE 06 – Force opérationnelle risques catastrophes environnement – et aux bénévoles, qui font preuve d’un dévouement sans pareil. Avec Christian Estrosi, président de la métropole Nice Côte d’Azur, et avec notre collègue Éric Ciotti, nous sommes entièrement mobilisés pour la reconstruction de nos vallées aux côtés des maires des communes sinistrées.
Après l’attentat de Nice et en pleine crise sanitaire, nous n’imaginions pas être frappés encore si durement. Nous aurons besoin d’un État fort pour nous accompagner dans cette reconstruction. Le chemin sera très long. Les 110 millions d’euros annoncés sont un soulagement, mais ils ne peuvent être qu’une première étape vers un engagement plus important. L’eau, l’assainissement, les routes, les ponts, les réseaux, les services publics et les maisons : tout est à reconstruire.
Nous aurons donc besoin de mesures fortes pour accompagner les particuliers et les professionnels en les exonérant de charges et d’impôts. Nous aurons besoin que vous acceptiez de déroger à la loi relative au développement et à la protection de la montagne pour permettre la création de bulles d’urbanisation au bénéfice de ceux qui n’ont plus rien. Nous aurons besoin, enfin, que vous soyez à nos côtés lors des discussions avec les assurances pour soutenir les sinistrés.
Monsieur le Premier ministre, la France est si belle de ses territoires ruraux : aidez-nous à les sauver ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le président
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur
Permettez-moi de vous répondre en votre qualité de députée de la nation. Accompagnés de vous-même, madame la députée, mais aussi du député Éric Ciotti, du maire de Nice Christian Estrosi, du président du conseil départemental Charles-Ange Ginésy et de tous les parlementaires des Alpes-Maritimes venus apporter leur soutien, parmi lesquels Loïc Dombreval et Alexandra Valetta Ardisson, le Premier ministre et le Président de la République se sont rendus dans les zones sinistrées et ont rencontré longuement les habitants afin de témoigner de la solidarité nationale.
Face à cette situation, le ministère de l’intérieur se charge plus particulièrement de l’urgence, quand le ministère de la transition écologique, sous la houlette de Barbara Pompili, se concentre sur la reconstruction. Un processus qui sera très certainement accompagné par Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics.
Alors que les élus accompagneront sans doute jeudi matin Mme la ministre déléguée à la citoyenneté à l’enterrement de ce pompier pour qui je veux avoir un mot particulier – en attendant peut-être de découvrir une deuxième victime parmi les sapeurs-pompiers –, je voudrais, comme vous l’avez fait, saluer les gendarmes, les agents de l’État et des collectivités locales, et notamment ceux du conseil départemental et de la métropole.
Permettez-moi de dresser devant vous le bilan humain et matériel – incomplet, malheureusement, car beaucoup reste encore à évaluer – de cette terrible tempête. Le Président de la République l’a dit, la solidarité nationale aura à s’exprimer.
Sept personnes sont décédées – nous n’oublions pas celle qui est décédée en Bretagne, où la tempête est également passée – et douze sont disparues ; 800 sauvetages et mises en sécurité ont été réalisés, et 952 membres de la sécurité civile ont été mobilisés au plus fort de la crise – 597 le sont encore –, ainsi que treize hélicoptères – huit continuent à tourner dans le département des Alpes-Maritimes – et dix-huit équipes cynophiles. Cinquante-cinq communes ont été reconnues comme victimes de catastrophe naturelle à la demande du Premier ministre, trois jours après les événements, et 1 562 bâtiments ont fait l’objet d’un diagnostic par la cellule bâtimentaire : ceux qui ont été totalement détruits, au nombre de 59, ont été classés « noir », alors qu’un arrêté de péril a été pris pour 159 autres, classés « rouge ».
Oui, vous avez raison, il faudra plus de 100 millions d’euros au département pour se relever. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Stratégie du Gouvernement dans les territoires ruraux
M. le président
La parole est à Mme Célia de Lavergne.
Mme Célia de Lavergne
Monsieur le Premier ministre, madame la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à la grande satisfaction des députés de tous les bancs, vous avez dit haut et fort votre attachement et votre soutien à tous nos territoires, en particulier à nos territoires ruraux qui ont depuis trop longtemps souffert de la migration des populations vers les centres urbains, mais aussi du recul voire de la disparition des services publics et souvent de services privés essentiels à la vie de nos concitoyens, créant un sentiment d’abandon et de déclassement.
Nous ne voulons plus laisser faire cela. Nous ne laisserons plus faire cela, avant tout parce que les Français habitent à nouveau nos campagnes, et que ce processus s’accélère avec la crise du covid-19 ; ensuite, parce que vous et nous, depuis 2017, menons ensemble une politique volontariste en faveur de la ruralité. Elle passe par la revitalisation des centres urbains, par le désenclavement des territoires grâce au financement de petites lignes ferroviaires, de routes secondaires, de la fibre ou de la 4G, par le soutien aux collectivités territoriales rurales, et par la création de maisons France Service pour promouvoir un service public de proximité et à visage humain auprès des habitants des territoires ruraux.
Toutes ces mesures font de l’agenda rural, confié au secrétariat d’État chargé de la ruralité, un élément essentiel de notre politique.
Mais des inquiétudes persistent. Elles concernent d’abord le dispositif des zones de revitalisation rurale – ZRR –, qui doit prendre fin d’ici à la fin de l’année. Ce dispositif d’exonérations fiscales et sociales permet de créer de l’emploi, de la valeur, de l’activité dans nos territoires. Que va-t-il advenir de lui ?
Des inquiétudes existent aussi s’agissant du plan de relance. Il faut aller vite pour financer des projets, mais cela nécessite de disposer d’une certaine ingénierie technique, ce qui donne la prime au sortant. Comment aider des territoires fragiles comme nos territoires ruraux à bénéficier de manière équitable du plan de relance ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, UDI-I et LT.)
M. Thierry Benoit
Très bien !
M. le président
La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales
Comme vous le soulignez, le dispositif des zones de revitalisation rurale arrive à échéance le 31 décembre prochain. Avec Joël Giraud, secrétaire d’État chargé de la ruralité, nous connaissons l’inquiétude que l’avenir de ce dispositif suscite chez les élus locaux et chez les professionnels qui en bénéficient, tout particulièrement en cette période de crise. Nous savons aussi que notre géographie prioritaire, dont le coût a été évalué à environ 650 millions d’euros, mérite d’être réformée pour mieux soutenir les territoires qui en ont le plus besoin. Des rapports parlementaires ont d’ailleurs souligné son caractère un peu complexe et insuffisamment ciblé.
Cependant, la période de crise que nous vivons a conduit le Premier ministre à penser qu’il fallait stabiliser les outils existants.
M. Thierry Benoit
Très bien !
Mme Jacqueline Gourault, ministre
Comme nous l’avons annoncé dès la présentation du projet de loi de finances pour 2021, nous déposerons un amendement prolongeant les ZRR de deux ans, jusqu’au mois de décembre 2022 (Vifs applaudissements sur de nombreux bancs.)
Vous m’interrogez par ailleurs sur la manière dont le plan de relance va profiter aux territoires ruraux. Je voudrais vous assurer que le Premier ministre met tout en œuvre pour que les 100 milliards d’euros consacrés à la relance « descendent » le plus efficacement possible sur les territoires.
M. Régis Juanico
Qu’ils ruissellent donc !
Mme Jacqueline Gourault, ministre
Sachez que je partage votre souci quant à la complexité des appels à projets, susceptible d’éloigner les territoires ruraux de cette réponse. Nous allons débloquer pour eux des sommes importantes, qui seront confiées aux préfets de région et de département ; nous voulons que le plan de relance réponde aux projets des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem, UDI-I, LT et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
M. le président
Nous avons terminé les questions au Gouvernement.
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures dix, sous la présidence de Mme Annie Genevard.)
Présidence de Mme Annie Genevard
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est reprise.
3. Projet de loi de finances pour 2021
Première partie (suite)
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2021 (3360, 3399).
Hier soir, l’Assemblée a commencé la discussion des articles, s’arrêtant à l’amendement no 1371 portant article additionnel après l’article 2.
Après l’article 2
Mme la présidente
Nous commençons par deux amendements identiques, nos 1371 et 1872.
La parole est à M. Éric Coquerel, pour soutenir l’amendement no 1371.
M. Éric Coquerel
Dois-je mettre le masque ?… Je le mets, mais j’observe que certains collègues le portent et d’autres non. Il faudrait la même règle pour tous. Je vous avoue, madame la présidente, qu’être enfermé pendant des heures et, en plus, devoir parler encore avec un masque, donne, au bout d’un moment, de terribles maux de crâne.
Mme la présidente
Nous vous comprenons.
M. Éric Coquerel
Cet amendement concerne la déduction fiscale des dons aux partis politiques. Le dispositif actuel pose un double problème : d’une part, il est injuste puisque cette déduction n’est possible que pour les donateurs assujettis à l’impôt sur le revenu et que, de ce fait, les dons de la moitié des Français ne sont absolument pas déductibles alors que ceux qui font partie des 10 % les plus riches et donnent la somme plafond de 7 500 euros ne payent en définitive que 2 500 euros et, d’autre part, il est coûteux puisqu’un don de 7 500 euros est à la charge de la collectivité à hauteur de 5 000 euros – je rappelle qu’il s’agit au total d’une somme importante : 56 millions d’euros par an, soit quasiment autant que le financement public des partis. Nous proposons donc de rendre dégressif ce système de réduction d’impôt. Il ne faut pas qu’une proportion trop importante des plus riches de nos concitoyens par rapport à l’ensemble des donateurs financent ainsi les partis politiques mais, au contraire, que tout à chacun puisse bénéficier du remboursement d’une partie de ses dons. C’est donc une mesure de justice fiscale.
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 1872.
Mme Christine Pires Beaune
Le groupe Socialistes et apparentés a souhaité en effet déposer un amendement identique à celui défendu par Mme Rubin en commission des finances, et soutenu à l’instant par M. Coquerel. Comme le dispositif actuel ne consiste qu’en une réduction d’impôt, n’en profitent évidemment que les contribuables qui font des dons à des partis politiques. Il serait possible d’intéresser un plus grand nombre de nos concitoyens au financement des campagnes électorales en leur permettant, à eux aussi, de bénéficier d’une aide fiscale en fonction du montant de leurs dons.
Aujourd’hui, en effet, une personne non assujettie à l’impôt sur le revenu, un smicard par exemple, peut participer à ce financement mais même s’il verse 100 euros ou 200 euros, il n’aura rien en retour, alors que, comme vient de le rappeler M. Coquerel, le contribuable qui donne 7 500 euros n’aura à payer en définitive que 2 500 euros, le budget de l’État supportant le reste par le biais de la réduction d’impôt. Il nous semble que modifier ce système serait une mesure de justice et applicable, je le précise, sans coût supplémentaire puisque la réduction serait dégressive.
Mme la présidente
La parole est à M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Nous avons régulièrement à examiner ce type d’amendements auxquels j’ai toujours été défavorable. Cette question rejoint celle plus générale de la réduction d’impôt sur les dons – même quand il est proposé comme ici de la transformer en crédit d’impôt pour les non-imposables.
En matière de financement de la vie démocratique, il faut veiller à ce que tous les partis soient bien financés, tout en maîtrisant le coût pour les comptes publics qu’induirait une transformation de la réduction d’impôt actuelle en crédit d’impôt. La mesure que vous proposez ne me semblant pas tout à fait chiffrée ni évaluée, j’émets, j’y insiste, un avis défavorable.
En outre, même si je comprends, sur le fond, votre objectif, prenons garde à ne pas mettre en difficulté, par une telle transformation, le financement des partis politiques – lesquels sont, vous le savez, nécessaires à la vie démocratique.
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
Il est également défavorable, pour les raisons exposées par le rapporteur général. J’ajoute que nous sommes attachés à la stabilité et à l’équilibre qui a été trouvé, année après année, en matière de financement de la vie politique.
Mme la présidente
La parole est à Mme Christine Pires Beaune.
Mme Christine Pires Beaune
J’entends les préoccupations exprimées par le rapporteur général et par le ministre délégué, mais le crédit d’impôt dégressif pourrait être calibré de façon à éviter que le nouveau dispositif coûte plus cher à l’État. L’enjeu n’est pas financier : il s’agit de permettre à tous ceux qui le veulent de participer aux campagnes électorales, y compris par le biais d’un don, en leur proposant en retour une aide financière, qui, objectivement, n’existe pas actuellement pour ceux qui ne payent pas d’impôt sur le revenu.
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert
Je vous avoue, chers collègues, avoir quelque difficulté à comprendre la philosophie qui sous-tend vos amendements et qui conduirait à accroître la dégressivité des réductions d’impôt. L’impôt sur le revenu est déjà progressif. En instaurant une dégressivité des réductions d’impôt, on accroîtrait sa progressivité.
Ensuite, vous dénoncez le fait que les personnes qui ne payent pas l’impôt sur le revenu ne bénéficient pas des réductions d’impôt. Cela paraît pourtant assez logique. Vous expliquez également que, dès lors qu’on octroie des réductions d’impôt aux plus riches, ces derniers en profitent. N’oublions pas, tout de même, que ce sont eux qui, au départ, font un chèque : quand ils donnent 5 000 euros ou 6 000 euros à un candidat, ils dépensent cet argent. La somme qui leur est rendue n’est pas payée par le reste de la collectivité : il s’agit d’argent qu’ils dépensent mais qui leur est en partie rendu. Ce ne sont pas les pauvres, ceux qui ne payent pas d’impôts, qui sont prélevés pour financer cette réduction d’impôt.
En réalité, en cumulant une plus grande progressivité de l’impôt sur le revenu et une très forte dégressivité des réductions d’impôt, nous aboutirions pour le coup à un barème très « pentu ». En outre, il ne faut pas partir du principe que parce qu’une majorité de Français ne paie pas l’impôt sur le revenu, elle serait défavorisée par rapport à des personnes qui payent beaucoup d’impôts et dont on tente d’alléger l’addition en leur permettant de bénéficier de réductions d’impôt.
De ce point de vue, j’avoue donc mon incompréhension quant à la philosophie qui vous anime, au-delà de la question des campagnes électorales – même si j’estime que, si nous voulons continuer à financer la vie démocratique, nous aurions intérêt, monsieur le président de la commission des finances, à mener un jour un débat sur la rénovation de nos règles, qui sont parfois contournées, obsolètes ou très complexes à appliquer.
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Coquerel.
M. Éric Coquerel
Je n’ai pas bien compris la réponse qui nous a été apportée. Le problème est réel : il n’est pas sain, dans une démocratie, que seule une partie des citoyens…
Mme Marie-Christine Dalloz
Paient des impôts !
M. Éric Coquerel
…puissent verser des dons à des partis politiques. Vous m’opposerez que chacun peut faire un don – sauf que la moitié de la population doit alors s’acquitter de l’intégralité des versements effectués, tandis que l’autre moitié peut réduire ses impôts.
Là encore, l’enjeu est celui du regard porté sur la fiscalité : ce n’est pas à vous que j’apprendrai que l’impôt sur le revenu ne présente qu’une petite part de la fiscalité. Tout le monde paie des impôts. Comme je l’ai expliqué hier, les 10 % de nos concitoyens les plus pauvres voient même leurs revenus baisser après redistribution par les impôts, en prenant en compte la taxe sur la valeur ajoutée, la TVA, et le reste.
Mme Valérie Beauvais
Ce ne sont pas des impôts, ce sont des taxes !
M. Éric Coquerel
Dès lors, en limitant la réduction d’impôt au seul impôt sur le revenu, vous créez de fait une injustice, puisque vous décidez que seuls les plus riches – en tout cas les plus aisés – peuvent financer, en bénéficiant d’une réduction d’impôt proportionnelle à leur don, les partis politiques, avec les problèmes que cela pose en matière de représentation politique. Vous excluez ainsi une grande partie de nos concitoyens, qui pourraient vouloir financer la vie politique.
Le système que nous proposons est, somme toute, cohérent, puisqu’il permettra à toute personne souhaitant aider un parti politique de diminuer ses impôts ou de bénéficier d’un crédit d’impôt. Cela semble logique. Si vous ne souhaitez pas adapter le système, changeons-en totalement – c’est toujours possible ! Mais, en l’état, il est injuste.
(Les amendements identiques nos 1371 et 1872 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1888 et 2665.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune, pour soutenir l’amendement no 1888.
Mme Christine Pires Beaune
Il est défendu. Je laisserai néanmoins Mme Tamarelle-Verhaeghe, qui avait originellement déposé cet amendement en commission des finances, le présenter.
Mme la présidente
La parole est donc à Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, pour soutenir l’amendement no 2665.
Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe
Il a une visée sociale, puisqu’il concerne le logement des personnes précaires. En effet, à l’heure actuelle, les propriétaires solidaires, qui font un don d’usufruit à des associations, en particulier pour loger des personnes en situation de précarité, se voient désavantagés par rapport à ceux qui gardent leur bien vacant. Je m’explique : en France, environ 150 000 personnes sont sans domicile et la Fondation Abbé-Pierre estime à 4 millions le nombre de personnes mal logées. Dans le même temps, le pays compte près de 3 millions de logements vacants.
Lorsqu’un propriétaire souhaite être solidaire, il peut faire une donation temporaire de son logement, en usufruit, à une association. En contrepartie, il bénéficie d’une réduction d’impôt sur le revenu. L’administration fiscale lui demande cependant de déclarer le montant des loyers qu’il n’a pas encaissés, ramenant sa déduction fiscale de 66 % à moins de 40 %. C’est ainsi, me direz-vous. Mais un logement restant vacant – ce qui est le cas des 3 millions de logements que j’évoquais précédemment – peut, de ce fait, se révéler plus rentable, du fait de l’exonération de la taxe foncière, qu’un logement faisant l’objet d’une donation d’usufruit par son propriétaire à une association.
L’amendement vise donc à ce que le propriétaire ne soit pas imposé sur les revenus du logement qu’il ne perçoit pas, afin que la donation d’usufruit soit plus rentable pour lui que la conservation du logement vacant.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je rappelle que si l’obligation de déclarer les loyers non perçus existe, c’est précisément parce que le propriétaire bénéficie d’un avantage fiscal. Permettre à ce dernier de ne pas déclarer les loyers – et donc l’exonérer d’impôt – tout en lui accordant un avantage fiscal, ce serait lui offrir à la fois fromage et dessert, pour reprendre l’expression employée par Mme Rabault. Nous souhaitons maintenir l’obligation de déclaration des loyers non perçus précisément du fait de la déduction de 66 %. Il est donc normal que le dispositif reste en vigueur sous sa forme actuelle. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Arnaud Viala.
M. Arnaud Viala
À travers cet amendement, se pose la question des logements qui ne peuvent pas être mis à disposition de personnes particulièrement dans le besoin, mais aussi celle de l’imposition – notamment sociale – des revenus fonciers, laquelle explique en grande partie le grand nombre de logements vacants en France. Les propriétaires fonciers, lorsqu’ils mettent un bien en location, se retrouvent en définitive considérablement pénalisés fiscalement, à tel point que certains renoncent à mettre leur bien en location, tout simplement pour s’épargner des préoccupations de cette nature.
Dans le cadre de l’examen du présent projet de loi de finances, nous devrions y réfléchir car la lutte contre le mal-logement est intimement liée à la capacité des propriétaires à maintenir en location des biens que, pour la plupart, ils envisagent de retirer du marché ou de vendre.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.
Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe
Je me permets d’insister car cet amendement a une finalité solidaire, vous l’avez compris. À l’heure actuelle, les propriétaires ont davantage intérêt à garder leur logement vacant qu’à faire une donation d’usufruit à une association. Ce sont les associations qui nous alertent sur ce point, au vu des difficultés de logement des personnes précaires. Un propriétaire qui effectue cette démarche positive doit être encouragé, même si j’entends bien l’argument selon lequel il ne faut pas leur donner à la fois fromage et dessert.
L’enjeu, ici, c’est le logement des personnes précaires, qui doit être favorisé par rapport à la conservation d’un bien au seul bénéfice de son propriétaire : il n’est pas normal que le fait de garder un logement vacant offre une exonération plus forte que sa mise à disposition auprès d’une association, avec les risques de dégradation et de frais de réhabilitation qu’elle implique. Je regrette vraiment que vous repoussiez cet amendement, car l’appel que je lance ici n’est pas au bénéfice des propriétaires, mais des personnes précaires.
(Les amendements identiques nos 1888 et 2665 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Luc Lagleize, pour soutenir l’amendement no 2643.
M. Jean-Luc Lagleize
Il vise à combler une faille de notre fiscalité. À l’heure actuelle, les travaux de rénovation énergétique sont déductibles des revenus fonciers pour tout le monde, sauf pour les propriétaires de commerces et de locaux d’activité. Ces bâtiments doivent pourtant eux aussi faire l’objet de travaux de rénovation énergétique. Il me paraît totalement injuste que seuls certains propriétaires puissent en déduire les coûts de leurs revenus fonciers.
La situation actuelle a un effet délétère : dans une copropriété, les lots de rez-de-chaussée sont souvent des lots commerciaux. Or, quand les propriétaires prennent conscience du fait qu’ils ne peuvent pas déduire les coûts des travaux de rénovation énergétique de leurs revenus fonciers, ils votent contre ces travaux en assemblée générale. Dès lors que, dans les copropriétés ne comptant que trois ou quatre étages, les propriétaires de locaux commerciaux disposent d’une majorité de tantièmes, ils peuvent bloquer la rénovation énergétique de tout l’immeuble, ce qui est complètement contraire à l’objectif que s’est fixé l’Assemblée nationale, à savoir rénover globalement les immeubles – qu’il s’agisse d’immeubles d’habitation, de bureaux ou de services.
L’objet de l’amendement est donc de permettre aux bailleurs de déduire les travaux de rénovation énergétique de leurs revenus fonciers en provenance de locaux professionnels ou commerciaux.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Il faut distinguer les locaux d’habitation des locaux professionnels : les travaux de rénovation énergétique de bâtiments professionnels permettent également de valoriser l’actif. Des mesures de neutralisation fiscale de revalorisation de l’actif figurent d’ailleurs dans le présent projet de loi de finances.
Vous soulevez néanmoins un point important : nous devons inciter les très petites entreprises – TPE – et les petites et moyennes entreprises – PME – à investir dans la rénovation thermique de leurs bâtiments et de leurs locaux professionnels. L’amendement no 1787 du Gouvernement, que nous aurons l’occasion de voter ensemble, vise à aller dans ce sens grâce à la création d’un crédit d’impôt financé à hauteur de 200 millions d’euros. Il satisfera au moins partiellement votre demande. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Je partage l’avis du rapporteur général et je confirme que le Gouvernement a déposé un amendement visant à créer des aides pour la rénovation énergétique des bâtiments des PME et des TPE.
J’ajoute simplement que, dans le cas des entreprises logées chez des bailleurs, la disposition que vous proposez, si elle était adoptée, créerait un double avantage : les propriétaires pourraient à la fois bénéficier du dispositif que vous proposez et faire supporter la charge des travaux à leur locataire, en application du principe de liberté contractuelle. Les dispositions que vous proposez n’empêcheraient pas cette forme d’effet d’aubaine. Je vous invite donc à retirer votre amendement et à vous rallier au dispositif que nous proposerons en faveur des petites entreprises. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
J’avoue ne pas comprendre les arguments développés par le rapporteur général et le ministre délégué. L’amendement concerne les propriétaires des locaux : on parle ici de revenus fonciers et non de BIC – bénéfices industriels et commerciaux – ou d’immeubles inscrits à l’actif ; cela n’a strictement rien à voir.
Quant à la possibilité pour le propriétaire de demander au locataire de supporter le coût des travaux, elle est en réalité beaucoup plus compliquée à mettre en œuvre que ce que vous laissez entendre : tout dépend de la relation qui existe entre le bailleur et le preneur.
Votre position conduit à bloquer des rénovations énergétiques dans certaines copropriétés. Lisez l’exposé sommaire qui accompagne l’amendement : la situation actuelle est un frein aux travaux. L’amendement ne vise pas à créer un effet d’aubaine. Il me semble donc dommage de le balayer aussi rapidement.
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Je rejoins le point de vue de nos collègues. J’ai toujours été surprise par le fait que les propriétaires d’immeubles d’habitation pouvaient déduire de leurs revenus fonciers toutes les dépenses d’amélioration qu’ils avaient engagées dans l’immeuble alors que les propriétaires d’immeubles professionnels, eux, ne pouvaient bénéficier de la même déduction – c’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils ne font pas de travaux.
Les propriétaires ne sont donc pas incités à engager des travaux de rénovation que les exploitants jugent nécessaires mais qu’ils ne peuvent financer eux-mêmes. Cette situation est d’autant plus problématique que la présence de locaux professionnels contribue au maintien de nos centres-villes. La question que pose notre collègue mérite donc d’être examinée, surtout à l’heure où la rénovation thermique des bâtiments apparaît comme une nécessité.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Luc Lagleize.
M. Jean-Luc Lagleize
Le droit fiscal prévoit que les travaux d’amélioration relatifs à la recherche de l’amiante et à l’accessibilité sont déductibles des revenus fonciers. Dès lors, pourquoi les travaux d’amélioration engagés dans le cadre de la rénovation énergétique ne le seraient-ils pas aussi ?
Mme Valérie Beauvais
Eh oui, c’est vrai !
M. Jean-Luc Lagleize
Votre argument, selon lequel le propriétaire peut faire supporter le coût de ces travaux au locataire, ne vaut que si une telle disposition figure dans le bail. Or le propriétaire ne va pas changer de bail au moment où il décide d’engager des travaux. Cela n’a donc rien à voir. D’ailleurs, même si une telle disposition était prévue par le bail, la déduction des revenus fonciers ne serait pas possible, conformément à la loi fiscale en vigueur. Aucun de vos arguments n’est donc recevable.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Le propriétaire peut tout à fait valoriser des travaux au moment où il revend son bien – ce qui lui assurerait une plus-value. Rien ne l’en empêche, mon argument est donc toujours valable.
M. Jean-Luc Lagleize
Et pour les logements ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Le bénéfice du crédit d’impôt, prévu par l’amendement du Gouvernement, vaut pour le propriétaire comme pour le locataire. Cette mesure répond donc bien au souci d’encourager la rénovation des bâtiments par les propriétaires ou par les locataires des locaux professionnels.
(L’amendement no 2643 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je rappelle que le règlement précise qu’en cas d’égalité des votes, comme cela vient d’être le cas, l’amendement n’est pas adopté. Dura lex…
Mme Cendra Motin
…sed lex.
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 268, 728 et 1782.
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 268.
M. Fabrice Brun
Le renouvellement des générations chez les commerçants, chez les artisans et plus encore chez les agriculteurs, constitue un véritable enjeu. Par conséquent, nous devons adapter notre politique fiscale pour favoriser la libération du foncier au profit des jeunes agriculteurs. Voilà pourquoi nous vous proposons, par cet amendement, d’instituer un abattement temporaire sur les revenus fonciers tirés de la location à un jeune agriculteur d’un bien dans le cadre du statut du fermage.
Mme la présidente
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 728.
Mme Émilie Bonnivard
La pyramide des âges dans le milieu agricole est très inquiétante puisqu’on compte actuellement une installation d’un jeune pour trois départs à la retraite. Vous le savez, l’installation d’un jeune agriculteur, a fortiori en dehors du cadre familial, demande un investissement fortement capitalistique. Sans bâtiment ni terrain agricole en propriété familiale, l’investissement est très lourd pour ces jeunes dont nous avons pourtant besoin. Les terres agricoles étant une ressource sous tension, nous devons impérativement encourager la location à ces jeunes agriculteurs.
Cet amendement vise donc à instituer un abattement temporaire sur les revenus fonciers tirés de la location d’un bien à un jeune agriculteur, à hauteur de 30 % pendant cinq ans, ce qui correspond à la période durant laquelle les jeunes agriculteurs bénéficient d’une fiscalité avantageuse sur le foncier.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 1782.
Mme Marie-Christine Dalloz
Il s’agit de l’amendement, rigoureusement identique, de notre collègue Josiane Corneloup, qui prévoit l’application du dispositif de l’abattement de 30 % sur les revenus fonciers pendant cinq ans – soit la même durée que les exonérations temporaires sur le foncier bâti – dans le cadre d’un statut de fermage. L’objectif est à la fois de répondre à la tension du foncier agricole et d’aider à l’installation.
Bien encadrée, cette mesure ne représenterait pas un coût excessif et permettrait de stimuler l’installation de jeunes agriculteurs, notamment dans les massifs de montagne, où se pose un problème de reprise des terres agricoles.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je suis surpris que vous proposiez une déduction sur le revenu locatif, donc un avantage fiscal pour le bailleur et non pour le jeune agriculteur.
Mme Émilie Bonnivard
Oui, pour l’inciter à louer !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je pense qu’il faudrait plutôt inciter directement les jeunes agriculteurs eux-mêmes. C’est aussi, voire surtout, à ce niveau que se situe l’enjeu.
Par ailleurs, je suis toujours un peu gêné par l’effet d’éviction que provoque ce type de mesure – je pense en l’occurrence au sort des agriculteurs moins jeunes. S’il n’existait aucune mesure d’accompagnement de nos agriculteurs, nous pourrions retenir la solution que vous proposez. Or il se trouve que le plan de relance apporte certaines solutions aux problèmes des agriculteurs, notamment les 250 millions d’euros d’aides à l’investissement dans les agroéquipements et les 400 millions destinés à faciliter la transition agroécologique.
M. Jean-Paul Dufrègne
Ça n’a rien à voir !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Ces mesures ne concernent l’installation des jeunes agriculteurs, je vous l’accorde,…
M. Fabrice Brun
Absolument pas !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
…mais ces aides à l’investissement accompagnent la filière et l’aident à progresser. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Je partage l’interrogation du rapporteur général. Dans l’exposé des motifs de ces amendements, vous expliquez qu’on compte trois départs pour une installation. Le risque est donc plus grand, pour un agriculteur qui part à la retraite, de ne pas trouver de successeur qu’il ne l’est, pour un jeune agriculteur qui s’installe, de ne pas trouver d’exploitation à reprendre. C’est pourquoi la mesure d’abattement que vous proposez – dont je comprends le mécanisme – me semble aller à contresens de l’objectif recherché. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Émilie Bonnivard.
Mme Émilie Bonnivard
Nous souhaitons inciter les propriétaires de terres agricoles, notamment en montagne, à mettre leur terrain en location pour des jeunes – ce qu’ils n’ont pas forcément fait car ils n’y sont pas obligés. Ils le feront s’ils bénéficient de l’avantage fiscal que constitue l’abattement. En effet, dans de nombreuses situations, les propriétaires sont réticents à louer leur terrain à des agriculteurs – certains de mes collègues vous expliqueraient mieux que moi pourquoi. L’objectif de cette mesure est bien de lever ce frein à la mise en location de terres agricoles pour de jeunes agriculteurs. L’outil est donc adapté au problème que nous rencontrons.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Je ne soutiendrai pas ces amendements car l’outil qu’ils prévoient de créer n’est pas le bon. Le vrai problème est tout simplement celui du statut du fermage, qui fera sans doute l’objet d’autres discussions lors d’une éventuelle réforme du foncier. Les mesures d’incitation fiscale constituent un outil qui peut être intéressant mais qui ne me semble pas assez efficace pour lutter contre la rétention foncière, c’est-à-dire le fait que les personnes à la retraite ne soient pas enclines à louer leur terre.
Mme la présidente
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard
Je trouve au contraire qu’il s’agit d’un outil efficace, tout simplement parce que la situation varie selon les régions, selon les territoires. Dans ma circonscription, pas très loin de chez moi, certains agriculteurs ont un mal fou à trouver des terres sur lesquelles s’installer pour devenir viticulteurs car elles ne sont pas disponibles. Un peu plus au nord de ma circonscription, en revanche, certains viticulteurs qui partent à la retraite ont un mal fou à trouver des repreneurs, tout simplement parce que leurs terres ne sont pas – ou peu – irriguées. Eux ont donc besoin d’une incitation fiscale afin de trouver des repreneurs. Dans certains cas, cette mesure peut donc se révéler un très bon outil.
(Les amendements identiques nos 268, 728 et 1782 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 451 et 1156.
La parole est à Mme Lise Magnier, pour soutenir l’amendement no 451.
Mme Lise Magnier
Le présent amendement tend à régler la difficulté du traitement fiscal de la rémunération perçue en contrepartie de ses fonctions techniques par l’associé d’une société ayant pour objet l’exercice d’une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, qui exerce dans cette société sans être titulaire d’un contrat de travail.
En effet, la doctrine administrative et la jurisprudence du Conseil d’État s’opposent sur ce point. Pour la première, la rémunération des fonctions techniques de ces associés relève de la catégorie des traitements et salaires alors que dans plusieurs arrêts, le Conseil d’État classe cette rémunération dans la catégorie des BNC, les bénéfices non commerciaux.
Cet amendement permettrait de mettre fin à une situation d’insécurité juridique puisqu’il prévoit que la rémunération des fonctions techniques des associés de ces sociétés soit traitée fiscalement comme des traitements et salaires.
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 1156.
Mme Véronique Louwagie
Il s’agit d’un amendement de notre collègue Patrick Hetzel. Les associés dirigeants de sociétés ayant pour objet l’exercice d’une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ne disposent pas, le plus souvent, d’un contrat de travail. Ils perçoivent une rémunération en tant que gérant ou en qualité de président. Cela donne lieu à des contentieux concernant la qualification fiscale de leur rémunération – les interprétations étant différentes d’un territoire à l’autre. Il est donc important d’apporter une sécurité juridique et de trancher définitivement cette question afin de ne pas laisser de vide juridique donnant lieu à des appréciations différentes.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je partage totalement votre volonté de sécuriser juridiquement cette situation. J’émets simplement une réserve sur la forme. Vous proposez en effet une modalité d’imposition unique pour toutes les fonctions et pour toutes les situations, ce qui ne me semble pas applicable.
Je souhaite cependant que nous avancions dans le même sens que vous. C’est pourquoi je vous demande de retirer ces amendements tout en précisant que, si vous souhaitiez les maintenir, je ne donnerais pas un avis défavorable mais m’en remettrais à la sagesse de l’Assemblée. Si vous les retirez, nous leur donnerons une seconde chance, par exemple au cours de la navette parlementaire, en procédant à des modifications afin de s’assurer que plusieurs types d’impositions seront possibles.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Je partage l’interrogation du rapporteur général concernant l’utilité de ces amendements et sa crainte à propos de l’instauration d’un système d’imposition unique. Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée, considérant que, s’ils étaient retirés – comme le propose le rapporteur général –, ils seraient affinés au cours de la navette parlementaire et que, s’ils étaient adoptés, nous travaillerions ensemble afin de trouver le bon système d’imposition avant la navette. Vos amendements tentent en tout cas de répondre à un véritable besoin.
Mme la présidente
Mesdames, maintenez-vous vos amendements ?
M. Pierre Cordier
Adoptons-les !
Mme Véronique Louwagie
Oui.
(Les amendements identiques nos 451 et 1156 ne sont pas adoptés.)
Mme Véronique Louwagie
À une voix près, c’est dommage !
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1118 et 1596.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1118.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je laisse Mme Lemoine présenter ces amendements.
Mme la présidente
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 1596.
Mme Patricia Lemoine
Ces amendements adoptés en commission des finances visent à harmoniser les règles fiscales en matière de versement des prestations compensatoires en cas de divorce, en tirant les conséquences de décisions faisant suite à deux questions prioritaires de constitutionnalité – QPC – rendues en janvier 2020.
Ils proposent tout d’abord que, lorsque la prestation compensatoire est versée pour partie sous forme de capital libéré dans les douze mois du jugement ou de la convention de divorce et pour partie sous forme de rente, les versements en capital réalisés ouvrent droit au bénéfice de la réduction d’impôt. Par ailleurs, ils permettent la déductibilité de la contribution aux charges du mariage du revenu imposable de l’époux qui la verse même lorsque son montant n’est pas fixé ou homologué par le juge, les sommes admises en déduction étant corrélativement imposables entre les mains de l’époux bénéficiaire dans les conditions prévues à l’article 80 quater du code général des impôts.
(Les amendements identiques nos 1118 et 1596, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 1584, 1734 et 1822.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 1584.
M. Jean-Paul Dufrègne
Cet amendement proposé par l’Union sociale pour l’habitat vise à appliquer aux indemnités de rupture conventionnelle versées aux directeurs généraux des offices publics de l’habitat – OPH –, qui ne sont pas des fonctionnaires en position de détachement, le régime fiscal prévu à l’article 80 duodecies du code général des impôts pour les indemnités de rupture conventionnelle des salariés de droit privé, afin d’éviter toute rupture d’égalité devant la loi fiscale et les charges publiques.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1734.
M. Thibault Bazin
Il s’agit d’un amendement d’harmonisation. Des dispositions ont été prises dans les PLF pour 2018 et pour 2020 mais il y a des oubliés. Les directeurs généraux d’OPH ne sont pas des fonctionnaires en position de détachement, c’est pourquoi il convient d’étendre l’exonération prévue à l’article 80 duodecies du code général des impôts aux indemnités de rupture conventionnelle qui leur sont versées.
Mme la présidente
La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 1822.
M. Aurélien Taché
Cet amendement a été travaillé avec l’Union sociale pour l’habitat, une telle harmonisation est une demande forte du monde HLM. Depuis 2018, beaucoup de mouvement s’est produit dans le monde du logement social. La réduction du loyer de solidarité par le PLF pour 2018 a conduit les OPH à se regrouper, et un nombre significatif de directeurs généraux sont donc concernés par cette mesure, qu’il est important de voter.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je comprends que cet amendement vienne de différents bancs mais je ne comprends pas pourquoi nous devrions exonérer d’impôt les indemnités versées au titre d’une rupture conventionnelle. Cela doit rester un régime extrêmement dérogatoire, si je puis dire. Je sais que cela se fait – les exposés sommaires des amendements le soulignent – pour le personnel administratif des chambres de commerce et d’industrie, par exemple.
M. Pierre Cordier
Alors supprimez-le !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Ce pourrait être une idée.
M. Pierre Cordier
J’ai lu dans votre esprit !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Mais je ne vois pas pourquoi les directeurs d’OPH devraient bénéficier d’une exonération sur les ruptures conventionnelles. Avis défavorable.
M. Jean-Paul Mattei
Très bien !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis. Le système proposé est particulièrement dérogatoire à une règle d’imposition.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Thibault Bazin
Vous émettez un avis défavorable profondément incohérent avec les lois de finances que vous avez vous-mêmes défendues, à savoir le PLF pour 2018 et celui pour 2020, avec leurs systèmes « extrêmement dérogatoires », pour reprendre vos termes. L’idée est donc ici d’harmoniser. Les offices HLM subissent, à la suite de votre réforme brutale des aides personnalisées au logement – APL –, des changements, notamment dans des municipalités importantes.
M. Pierre Cordier
Tout à fait !
M. Thibault Bazin
Soit le dispositif est valable pour tout le monde, soit il ne l’est pour personne. Par souci de cohérence, vous devriez vous montrer favorable à l’harmonisation que nous proposons, sinon vous créerez encore une fois des injustices.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
Je ne comprends pas la position du Gouvernement. Nous avons étendu ce dispositif, dont bénéficient les salariés du secteur privé, aux chambres de commerce afin de faciliter leur restructuration. Nous l’avons fait aussi pour d’autres agents publics. Or c’est le même problème qui se pose pour les organisations d’HLM car la loi leur a imposé des réorganisations et des fusions, ce qui a eu pour conséquence le départ de plusieurs directeurs, ce n’est pas plus compliqué que cela. Les amendements me paraissent donc cohérents avec la politique du Gouvernement visant à favoriser le regroupement des organismes HLM. C’est le même problème que pour les chambres de commerce, que pour un certain nombre de structures publiques…
M. Pierre Cordier
Ou alors on supprime tout !
M. Charles de Courson
Par ailleurs, quid de l’égalité entre les salariés du privé et les différents agents du secteur public ? les premiers bénéficient bien d’un régime d’exonération partielle. Il faut être cohérent, sinon viendra un jour une QPC et je ne suis pas sûr que vous vous en tirerez.
(Les amendements identiques nos 1584, 1734 et 1822 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 2437.
Mme Emmanuelle Ménard
L’article 81 du code général des impôts permet aux journalistes gagnant jusqu’à 6 000 euros nets par mois de déduire directement 7 650 euros de leurs revenus imposables pour « les frais inhérents à leur fonction ». Concrètement, un journaliste qui gagne 3 000 euros par mois ne paie que 2 125 euros d’impôts par an, alors qu’un autre Français ayant le même revenu paie quant à lui 4 153 euros d’impôt, soit le double.
Cette mesure date de 1934. Les journalistes faisaient alors partie d’une liste de 110 professions bénéficiant d’un abattement sur leurs revenus – des métiers pour beaucoup aujourd’hui disparus. En théorie, cet abattement était censé financer les frais professionnels, qui étaient, c’est vrai, à cette époque devenue assez lointaine, assez importants. Difficile de justifier aujourd’hui ce genre de frais alors que la plupart des journalistes sont devenus sédentaires. En outre, quand un journaliste doit produire une note de frais pour écrire un article, il se fait directement rembourser par l’organe de presse qui l’emploie ; du coup, il cumule le remboursement de son journal avec cet abattement fiscal.
Par ailleurs, ces frais ne donnent lieu à aucune vérification de la part de l’administration fiscale. Il convient donc de supprimer ce privilège, perçu comme une véritable injustice par de nombreux Français.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre Cordier
Faites attention, vous parlez des journalistes !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je ne partage pas votre avis, madame Ménard. C’est une situation fiscale qui date, en effet, et elle a d’ailleurs été retouchée : nous avons, pour la première fois, assorti cet abattement d’une condition de ressources, certes élevée, de mémoire de 93 000 euros.
M. Pierre Cordier
C’est pas mal !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Comme je l’ai dit à propos de nombreuses professions, je pense qu’un peu de stabilité fiscale ne ferait pas de mal après toutes les modifications de ces dernières années. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
C’est un débat traditionnel que Mme Ménard nous permet d’avoir… L’avis du Gouvernement reste défavorable, pour les raisons évoquées par le rapporteur général.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
Cet amendement est un peu un marronnier.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
En effet !
M. Charles de Courson
Il faut bien reconnaître que la déduction dont il est ici question est une anomalie. Le problème, c’est que les journalistes – ce n’est pas moi qui le dis mais les patrons de presse – sont sous-payés car cet avantage fiscal spécifique est intégré dans la négociation salariale. Si nous faisons tomber l’avantage, il faut réévaluer les salaires.
M. Pierre Cordier
Il faut les augmenter…
M. Charles de Courson
Il faudrait donc une vraie discussion et j’espérais que vous seriez plus ouvert, monsieur le ministre délégué, en reconnaissant le problème, dont la solution n’est pas de supprimer sèchement l’abattement mais de conduire une discussion avec la presse.
J’ajoute que la situation n’est pas saine, pour les journalistes, car on leur reproche ce privilège. J’en ai parlé avec les syndicats de journalistes, qui reconnaissent eux-mêmes que ce n’est pas sain et qu’il faudrait se mettre autour d’une table pour régler ce problème, en évitant une mesure sèche de suppression – raison pour laquelle je ne voterai pas l’amendement.
Mme la présidente
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard
C’est effectivement un marronnier : cela fait quatre ans que je défends cet amendement. Je crois d’ailleurs, monsieur de Courson, que vous l’avez présenté avant moi. Mais ce n’est pas parce que c’est un marronnier qu’on ne peut pas en discuter ni prendre en considération nos arguments.
Quand, il y a deux ans, vous avez voté, sur proposition du Sénat, cet abattement pour les journalistes gagnant moins de 6 000 euros nets par mois – ça va, on peut vivre avec de tels revenus –, vous étiez bien moins généreux avec les retraités, soumis à la contribution sociale généralisée, la CSG, pour un plafond de ressources beaucoup plus bas – de mémoire, il s’agissait de moins de 2 000 euros.
M. Pierre Cordier
Très bien, madame Ménard !
Mme Emmanuelle Ménard
Il faut être cohérent : on ne peut pas avoir une politique fiscale à géométrie variable et accepter des abattements fiscaux pour les journalistes avec un plafond de 6 000 euros quand on taxe les retraités pour des revenus bien plus bas. Il est temps d’avoir une politique fiscale équilibrée et égalitaire.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz
Ce n’est pas parce que c’est un marronnier qu’il faut s’interdire le débat. Ce sujet mérite une vraie réflexion et vous ne pouvez pas dire, monsieur le ministre délégué, monsieur le rapporteur général, que ce n’est pas d’actualité et que vous n’en voulez pas. Vous nous reprochez souvent de présenter des amendements qui coûtent ; or, ici, c’est une recette budgétaire qui est proposée.
J’entends M. de Courson qui évoque une forme de compensation sur la rémunération, sauf qu’on ne me fera pas croire que tous les journalistes sont sous-payés. Certains journalistes de grandes chaînes d’information sont bien mieux rémunérés et bénéficient du même avantage, à savoir une déduction de 7 650 euros. Ce n’est pas acceptable. Ne serait-il pas intelligent, dans une recherche de consensus, de trouver un plafond de revenus au-dessus duquel cette déduction forfaitaire ne serait plus applicable ? Il serait intéressant d’y travailler dans les années à venir – et cela montrerait votre volonté d’équité fiscale.
(L’amendement no 2437 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l’amendement no 2861.
M. Julien Aubert
Hier, Mme Rabault a rappelé qu’une mauvaise indexation de l’impôt sur le revenu pouvait y soumettre de nouvelles catégories de contribuables. Il y a une autre manière d’en élargir la base : supprimer une exonération. C’est ce que la précédente majorité avait fait en 2013 : la suppression de l’exonération pour les majorations de retraite ou de pension pour enfants élevés ou à charge a mécaniquement fait entrer un grand nombre de foyers fiscaux dans le barème de l’impôt sur le revenu.
Avec le présent amendement, je propose de rétablir cette exonération qui relève d’une politique favorable à la famille. Sachant que La République en marche se pique d’être de droite, je suppose que le rapporteur général sera d’accord avec moi pour dire qu’il faut soutenir la famille – et donc mon amendement.
M. Matthieu Orphelin
Parce que la famille, c’est de droite ?
M. Julien Aubert
La vraie !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je suis d’accord avec M. Orphelin : je ne sais pas si la famille est de droite ou de gauche. En revanche, autant l’amendement précédent – Mme Dalloz l’a noté – aurait apporté des recettes à l’État, autant l’adoption du vôtre grèverait les finances publiques de 1,4 milliard d’euros.
La mesure adoptée par la majorité précédente – que vous êtes libre de contester – a permis, depuis 2014, de financer des baisses d’impôts.
M. Pierre Cordier
François Hollande, reviens !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Il faut reconnaître que la fin du quinquennat précédent a été marquée par un début de mouvement de baisse des impôts, que nous avons poursuivi depuis 2017. Il ne s’agit pas de fonds perdus qui auraient été récupérés par l’État, mais de sommes qui ont été redistribuées, y compris en faveur des familles.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis, pour les mêmes raisons.
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert
Quand on parle de défendre les familles, il y a l’amour et il y a les preuves d’amour. La précédente majorité – M. le ministre en sait quelque chose ! – fut à l’origine de la suppression de l’universalité des allocations familiales. Si c’est une politique favorable aux familles, dites-moi ce que serait une politique qui leur serait hostile ! Je n’y comprends plus rien !
Aujourd’hui, vous avez la possibilité, en tant que nouvelle majorité, de vous situer par rapport à cet héritage. Décider de poursuivre cette politique, c’est en être solidaire ; comme elle a été menée par un gouvernement de gauche, c’est donc mener une politique de gauche.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Ce n’est pas une insulte !
M. Julien Aubert
En revanche, décider de revenir à la situation antérieure reviendrait à rompre avec une politique de gauche et à vous positionner du côté droit.
Monsieur le rapporteur général, vous avez refusé de revenir sur la suppression de cette exonération avec un argument spécieux qui consiste à dire que toute proposition de dépense amène une dépense supplémentaire – c’est une tautologie – et serait malvenue si l’on veut faire des économies. Une telle vision limite la qualité de l’exercice collectif auquel nous nous livrons ici, car si nous ne pouvons plus augmenter une dépense en la compensant par une recette, sachant que nous sommes déjà très encadrés par l’article 40, il ne nous restera pas grand-chose. Ou alors il faudrait imposer aux parlementaires un plafond de ressources : nous aurions par exemple le droit de faire des propositions dans la limite de 3 millions d’euros ; mais alors le coût horaire des discussions dans l’hémicycle viendrait rapidement carotter cette réserve…
Bref, ce n’est pas une bonne manière de soutenir une politique nataliste, et votre argument est spécieux.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
En 2013, quand la majorité de gauche a voté cette disposition, je l’ai violemment combattue : elle était injuste et antisociale.
M. Jean-Louis Bricout
Elle était juste !
M. Charles de Courson
Pourquoi existait-il une exonération pour les majorations pour enfants élevés ou à charge ? Premièrement, ces exonérations représentent, dans le secteur privé, 10 % à partir de trois enfants, alors que dans le secteur public, elles vont de 10 à 30 %, selon les régimes et le nombre d’enfants, chaque enfant supplémentaire apportant 5 %. Peu de gens savent que les majorations pour enfants sont réversibles à 100 % ; la mesure a donc essentiellement frappé des veuves. Or ceux qui ont eu trois enfants et plus ont pour partie renoncé à une carrière professionnelle et ont donc des retraites plus faibles : c’était là le fondement de l’exonération. Sa suppression était donc profondément injuste. Certaines veuves qui étaient exonérées de taxe d’habitation y sont devenues assujetties. Beaucoup de gens qui étaient exonérés d’impôt sur le revenu sont devenus imposables.
M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Évidemment !
M. Charles de Courson
Oui, je répète : la suppression de cette exonération était profondément injuste et antisociale. (M. Marc Le Fur applaudit.)
(L’amendement no 2861 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l’amendement no 2863.
M. Julien Aubert
Avec l’amendement précédent, j’ai essayé de voir si la majorité était prête à rejoindre des positions de droite ; voyons maintenant si elle est prête à adopter des positions d’une autre sensibilité, plus sociale.
Le présent amendement peut, à mon avis, faire consensus puisqu’il vise à exonérer d’impôt sur le revenu les ressources issues d’une allocation personnalisée d’autonomie – APA –, lorsqu’elles sont utilisées pour rémunérer un aidant familial. En d’autres termes, si c’est votre descendant qui s’occupe de vous et que c’est lui qui perçoit votre APA, ce revenu sera exonéré d’impôt.
En effet, l’APA peut être utilisée pour payer une aide à domicile, un prestataire de services ; mais on peut évidemment l’utiliser pour rémunérer un aidant familial vivant sous le même toit – qui sera éventuellement taxé. Avec le présent amendement, je souhaite instaurer un critère de différenciation, selon que l’aidant est un descendant de la personne aidée ou non, afin d’inciter à l’aide familiale. Car nous avons devant nous le défi de la dépendance. On peut penser que la solution consiste à construire plus d’EHPAD ou à créer une branche dépendance de la sécurité sociale ; je suis pour ma part convaincu que l’une des manières d’agir sereinement et intelligemment, c’est de retisser les liens familiaux et de faire en sorte que les personnes en perte d’autonomie soient plutôt accueillies, jusqu’à la fin de leur vie, dans le foyer familial. C’est un moyen de les aider. Il existe bien une solidarité vis-à-vis des descendants ; il faut en créer une vis-à-vis des ascendants. Cela refléterait, à mon sens, le vieillissement de la société. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Si vous essayez de faire adopter des amendements positionnés tantôt plus à gauche, tantôt plus à droite, je crains que vous n’échouiez à chaque fois. Car cette majorité a précisément été élue sur un projet et un programme qui s’efforçaient de dépasser ce qu’on considère comme des idées de droite ou de gauche. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Vous pouvez toujours tenter de déplacer son curseur ; je fais confiance à la majorité pour voter ce qui relève du bon sens et non de sa couleur politique.
M. Pierre Cordier
LOL !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Pourquoi votre amendement reçoit-il un avis défavorable ? Je vous l’ai dit en commission : votre proposition créerait un double avantage. Aujourd’hui, l’APA permet à l’aidé de financer un salarié à domicile, un aidant. Si celui-ci est issu du cercle familial – pourquoi pas –, il est rémunéré de la même façon. On ne va pas lui octroyer un avantage parce qu’il est un descendant ou un ascendant de l’aidé, alors qu’il fait déjà bénéficier le foyer de l’APA. Cela créerait une distorsion et une discrimination : en vous faisant aider par un membre du foyer familial, vous auriez deux aides publiques, alors qu’en faisant appel à un aidant extérieur, vous n’en auriez qu’une. Ce n’est pas raisonnable.
En revanche, vos amendements sont intéressants en ce qu’ils anticipent une discussion que nous devrons avoir et qu’il ne faudra surtout pas évacuer : celle sur la dépendance en général et sur l’organisation de nos foyers pour y faire face en particulier. Car, en effet, nous ne pouvons pas nous concentrer uniquement sur l’accueil en EHPAD et il faudra trouver d’autres solutions innovantes, telles que les familles d’accueil, et les traiter à la fois dans le PLFSS et – surtout – dans le texte sur la dépendance qui arrivera au début de l’année prochaine.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Comme l’a souligné le rapporteur général, nous débattrons de l’autonomie et de la dépendance dans le cadre du PLFSS.
Le Gouvernement est défavorable à la mesure proposée pour la raison que vient de rappeler le rapporteur général : elle amènerait un foyer fiscal à bénéficier d’un double avantage en cas de recours à un aidant familial, à un simple avantage en cas de recours à un aidant hors du cercle familial. Une telle distorsion ne nous paraît pas envisageable.
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert
Donc ce qui vous gêne, c’est la distorsion de concurrence ? C’est intéressant, car vous avez une vision très économique de la famille. Je crois pour ma part que le meilleur aidant, c’est le descendant ; c’est pourquoi je préfère que le père soit aidé par le fils qu’il emploierait. D’abord, dans la vraie vie, c’est mieux pour certaines facettes de l’autonomie ; ensuite, je pense que c’est la meilleure aide qu’on puisse fournir.
Je ne reviendrai pas sur les arguments du rapporteur général, qui a expliqué que la majorité était comme un train : elle ne peut aller ni à gauche ni à droite. La seule différence entre La République en marche et un train, c’est que lorsqu’un train déraille, il s’arrête ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)
(L’amendement no 2863 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Jerretie, pour soutenir l’amendement no 2744.
M. Christophe Jerretie
Le présent amendement, déposé par Jean-Noël Barrot et repris à l’unanimité par le groupe MoDem et démocrates apparentés – je suppose donc qu’il fera également l’unanimité dans l’hémicycle –, concerne un sujet très important : les fonds propres des entreprises. Nous proposons d’autoriser le transfert de jours de CET – compte épargne-temps– ou, en l’absence de CET, de jours de repos, vers un plan d’épargne d’entreprise, à condition que ces sommes servent à l’acquisition de titres de l’entreprise ou de parts ou actions de fonds d’actionnariat.
Le but est de renforcer les fonds propres des PME et d’intéresser les salariés à leur entreprise. Jean-Noël Barrot a travaillé là sur un sujet très concret pour formuler une proposition très utile, qui va dans le sens de l’histoire. En effet, nous savons tous que nos PME ont besoin d’être consolidées et cet outil nouveau peut y contribuer. Nous devrions tous voter pour une disposition permettant la consolidation de nos entreprises et favorisant de façon novatrice l’actionnariat salarial.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Nous avons eu le débat en commission. Je vous demande de retirer l’amendement. Je comprends que la proposition de défiscalisation trouve sa place dans une loi de finances, mais l’amendement de M. Barrot vise surtout à faire passer le plafond de l’exonération de dix à vingt jours par an. Cette solution est potentiellement intéressante, mais la question est d’ordre plus réglementaire que législatif – en tout cas pas fiscal – et ne se décide pas en loi de finances.
Mme Marie-Christine Dalloz
Combien ça coûte ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Le Gouvernement pourra éventuellement donner son avis sur le fond du sujet : le doublement des jours de CET.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Le versement de jours inscrits sur un CET ou de jours de repos non pris sur un plan d’épargne d’entreprise, à condition qu’ils servent à l’acquisition de titres de l’entreprise ou d’une entreprise liée, ou de parts ou actions de fonds d’épargne salariale, est d’ores et déjà possible.
L’amendement renforce en outre l’exonération d’impôt sur le revenu des jours inscrits sur un CET ou de congés non pris, transférés sur un plan d’épargne pour la retraite collectif – PERCO –, sans condition d’investissement dans l’entreprise. La disposition proposée ne permet donc pas de consolider les fonds de l’entreprise, contrairement à ce qui est autorisé aujourd’hui. Avis défavorable, à moins que l’amendement ne soit retiré.
Pour ce qui est du doublement du nombre de jours, de dix à vingt, nous n’avons pas à ce stade exploré cette piste et sommes prêts à y travailler, mais à la condition que chaque avancée se fasse en contrepartie d’un renforcement des fonds de l’entreprise – ce qui n’est pas le cas dans votre amendement s’agissant du PERCO.
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Jerretie.
M. Christophe Jerretie
M. Barrot n’étant pas là, nous n’irons pas plus loin dans la discussion. Je retire donc l’amendement.
Nous en ferons part à Jean-Noël Barrot et à toute l’équipe qui s’occupe du sujet, et nous poursuivrons le travail avec le ministère.
(L’amendement no 2744 est retiré.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 860, 859 et 219, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 860.
M. Dino Cinieri
Lorsque le montant global de l’ensemble des bons d’achat et des cadeaux attribués à un salarié au cours d’une année civile n’excède pas 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale, ce montant n’est pas assujetti aux cotisations de sécurité sociale. Ces bons d’achat sont pour les employeurs un moyen de récompenser leurs salariés et ils constituent pour ces derniers une forme de prime, supplément de pouvoir d’achat indispensable en période de crise liée au covid-19.
Cependant, le niveau du plafond en question est trop bas. Il limite la possibilité pour l’employeur d’abonder de manière substantielle le pouvoir d’achat de ses salariés, le montant des bons ne pouvant excéder 169 euros.
L’amendement vise à instaurer une exonération d’impôts pour les bons d’achat et les cadeaux en nature attribués aux salariés, dans la limite, pour chaque bénéficiaire, d’un plafond n’excédant pas 20 % du plafond mensuel de la sécurité sociale pour l’année civile.
Mme la présidente
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 859.
M. Marc Le Fur
J’ai été alerté, sans doute comme d’autres parlementaires, par un certain nombre de salariés. Les comités d’entreprise peuvent offrir au plus 169 euros de bons d’achat et de cadeaux en nature aux salariés s’ils veulent bénéficier d’une exonération. Toutefois, cette année, en l’absence d’activité, ces comités d’entreprise n’ont pas pu dépenser leur argent et se retrouvent à la tête de montants assez élevés. Je parle au nom des 3 000 salariés du plus gros abattoir de ma circonscription. Nous souhaitons qu’au moins cette année, l’exonération puisse s’appliquer au-delà des 169 euros : les comités d’entreprise pourraient ainsi distribuer des bons d’achat pour des montants supérieurs, ce qui serait excellent pour la consommation.
Nous proposons un nouveau seuil que vous trouverez peut-être élevé – cela peut se discuter. En tout état de cause, les comités d’entreprise sont fondés à dire : « C’est notre argent, nous n’avons pas pu le distribuer dans les conditions habituelles et nous ne pourrons pas le faire en raison de la crise sanitaire ; qu’on nous permette de le verser sous forme de bons exonérés d’impôts. »
Nous devrions tous nous accorder sur cette mesure. Certains comités d’entreprise font aujourd’hui ce qu’ils n’ont pas pu faire hier : permettons aux salariés de bénéficier d’une forme de rattrapage !
Mme la présidente
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 219.
M. Fabrice Brun
L’adoption de l’un de ces amendements nous permettrait de faire d’une pierre deux coups, d’une part en augmentant le pouvoir d’achat des salariés, d’autre part en nous assurant que davantage de bons seront dépensés dans les commerces de proximité.
Nous proposons que l’exonération puisse s’appliquer jusqu’à un montant de 338 euros, soit le double du plafond actuel. Distribuer 169 euros supplémentaires par salarié à la fin de l’année, c’est du concret et tout le monde y gagne : les salariés évidemment, les employeurs qui récompensent leurs équipes, et les commerces de proximité.
Je réitère en conséquence la proposition qui était la mienne en commission, sachant, monsieur le rapporteur général, que les quelques jours qui se sont écoulés depuis cette réunion ne nous ont pas permis de travailler sur la sécurisation du dispositif. Cela dit, vous disposez d’une force de frappe technique et juridique bien supérieure à celle des simples commissaires aux finances : peut-être aurez-vous une proposition à présenter en la matière ?
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur les amendements en discussion commune ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je suis un peu déçu, monsieur Brun. En commission, c’est vrai, je vous ai dit que j’étais prêt à vous aider à sécuriser le dispositif juridique en vigueur, mais ce n’est pas ce que proposent des amendements qui visent –au choix – à doubler, à tripler ou à quadrupler le plafond de l’exonération actuelle. Ce n’est pas vraiment ce que nous nous étions dit en commission.
Aujourd’hui, l’exonération limitée à 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale est une tolérance. Je ne suis pas favorable à ce que l’on dépasse ce seuil. Je maintiens en revanche que je suis à votre disposition pour sécuriser ce dispositif qui, aujourd’hui, ne figure pas dans les textes, si vous estimez que cela est nécessaire.
Monsieur Le Fur, vous avez raison de vous interroger sur l’utilisation potentielle de la manne dont vous parlez. Je vous rappelle toutefois que le plafond de l’exonération s’entend par année civile, par événement et pour chaque enfant du salarié – elle vaut donc pour chacun des cadeaux ou des bons de Noël offerts. Autrement dit, en les cumulant, vous pouvez distribuer à un salarié bien plus que si on s’en tenait à la lettre de vos amendements qui proposent de doubler, tripler ou quadrupler un plafond qui concernerait toutes les distributions de l’année et engloberait tous les membres du foyer.
Avis défavorable aux trois amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Le Gouvernement est défavorable aux amendements et suggère que leurs auteurs les retirent. La doctrine administrative constante permet l’exonération dans la limite de 5 % du plafond mensuel de la sécurité sociale par événement et par enfant. En fixant ce seuil à 15 % pour chaque salarié et pour l’année, vous proposez une solution moins avantageuse que celle dont bénéficie aujourd’hui le salarié qui a trois enfants et participe à deux événements par an.
Si M. le rapporteur général est d’accord, le Gouvernement participera évidemment aux travaux de sécurisation du dispositif que vous appelez de vos vœux.
Les amendements proposés seraient contre-productifs. Il me semble que proposer le même type d’avantage pour des cadeaux offerts à des bénéficiaires en fonction de leur ancienneté dans l’entreprise et en lien avec leur activité professionnelle serait plus dangereux encore, car cela pourrait inciter à créer une source de revenus complémentaires exonérés.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabrice Brun.
M. Fabrice Brun
Hormis le cas de Noël, la fréquence des événements qui peuvent entrer dans le cadre du dispositif, comme les mariages ou les naissances, reste assez faible.
Je regrette votre position sur le fond, c’est-à-dire sur le doublement du plafond actuel. Concernant ce que j’appelle la forme, c’est-à-dire la sécurisation du dispositif non modifié, les semaines qui nous séparent de l’examen des articles non rattachés nous permettront de travailler avec vos services, qui auront je l’espère le temps de répondre à notre demande.
(Les amendements nos 860, 859 et 219, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 883, 884 et 1634, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 884 et 1634 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir les amendements nos 883 et 884, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Mme Véronique Louwagie
Je dépose systématiquement depuis plusieurs années un amendement semblable à l’amendement no 883 lors de l’examen du projet de loi de finances.
Parce qu’il existe, dans notre pays, des déserts médicaux, et que nous avons du mal à rééquilibrer la démographie médicale, en particulier dans les territoires ruraux – cela concerne évidemment les ZRR, les zones de revitalisation rurale –, une exonération temporaire des bénéfices non commerciaux est prévue en faveur des médecins libéraux. Ce dispositif, mis en place par la loi de finances rectificative pour 2015, fonctionne ; il a donc été prorogé à plusieurs reprises. Les professionnels libéraux concernés bénéficient d’exonérations d’impôt sur le revenu.
Je propose de mettre en place un dispositif similaire en faveur des praticiens hospitaliers afin qu’ils soient fiscalement incités à travailler dans les ZRR. L’amendement no 883 propose une exonération au titre de leur activité durant les cinq années qui suivent la prise de fonction de ses praticiens ; l’amendement no 884 propose une exonération pour trois ans.
Je le répète, ce dispositif a fonctionné pour les médecins libéraux, il peut donc fonctionner pour les médecins hospitaliers dans les mêmes territoires. Nous leur apporterions un soutien majeur en adoptant l’un des amendements.
Mme la présidente
L’amendement no 1634 de M. Fabrice Brun est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Devons-nous répondre au problème bien réel de la désertification médicale des zones rurales en jouant sur la fiscalité ? Je ne crois pas, et cela pour plusieurs raisons.
Les ZRR visent avant tout l’activité économique, et non la démographie médicale. Vous proposez de calquer ce qui existe en la matière au profit des praticiens hospitaliers. Rappelons d’abord que l’exonération dont bénéficient les libéraux en ZRR est liée aux risques et à l’aléa économique – que les salariés ne connaissent pas, chacun le comprend.
Ne faut-il donc rien faire en faveur des employés et des employeurs du secteur privé ou du secteur public ? Permettez-moi de rappeler qu’il existe déjà des exonérations spécifiques pour les zones sous-denses médicalement : à l’exonération de cotisation foncière des entreprises, introduite à l’initiative de notre collègue Julien Dive il y a deux ans, s’ajoutent les exonérations de cotisations sociales pour les jeunes médecins s’installant en zone sous-dense, prévues par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, mais aussi les exonérations des rémunérations au titre de la permanence de soins. En outre, les établissements privés peuvent prétendre aux exonérations en ZRR.
Et puis, il faut inscrire ce qui existe déjà dans le cadre de la stratégie et du plan « ma santé 2022 ». Je ne reviens pas sur l’ensemble du dispositif en question, je me contente de citer le doublement du nombre de maisons et centres de santé, élément essentiel de la lutte contre la désertification.
La direction générale du Trésor avait identifié fin 2019 des pistes complémentaires, mais aucune n’était fiscale. Elle évoquait notamment le fléchage des places d’internat vers les zones sous-denses, la réallocation de spécialités d’internat attractives vers les régions ayant des difficultés à attirer les nouveaux internes, ou encore la sensibilisation à la médecine en zone sous-dense.
En conséquence, le Gouvernement est défavorable aux trois amendements. Selon nous, ils ne permettraient pas de résoudre le problème de la désertification médicale contre laquelle la majorité – je peux parler en son nom – s’emploie à lutter.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Avis défavorable. Le rapporteur général a été très précis en expliquant sa position. Les arguments du Gouvernement sont exactement les mêmes…
M. Pierre Cordier
Tiens ! C’est bizarre, ça ! (Sourires.)
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
Dans les hôpitaux locaux situés en ZRR, où nous n’arrivons pas à recruter, nous essayons d’attirer des vacataires en leur payant des heures pendant lesquelles ils ne travaillent pas. Ce n’est pas moi qui le dis : la situation a été dénoncée par toutes les chambres régionales des comptes qui ont contrôlé ces hôpitaux.
M. Jean-Louis Bricout
C’est vrai !
M. Fabien Di Filippo
Il y en a pour des millions d’euros !
M. Charles de Courson
Elles ont raison en droit, mais il s’agit d’un expédient pour pallier le manque d’attractivité.
Ces amendements ne sauraient certes résoudre le problème à eux seuls – comme pour les médecins libéraux dans les ZRR –, mais ils constituent l’un des éléments d’un ensemble. Et ne croyez pas, monsieur le ministre, qu’ils n’auraient pas d’effets : pour certaines personnes, intéressées par leur revenu net d’impôt, cette mesure peut être une motivation. On peut en penser ce que l’on veut, mais cela faciliterait la gestion des hôpitaux locaux.
Mme la présidente
La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur
Monsieur le rapporteur général, votre réponse est à la fois argumentée et partielle. Elle est argumentée, car vous exposez tout ce qui existe – et fonctionne – pour les médecins libéraux. Il est vrai que le petit avantage offert dans les ZRR conduit à des installations dans ces zones, alors que les zones limitrophes sont parfois défavorisées – c’est le problème du zonage.
M. Jean-Louis Bricout
Les effets de zone !
M. Marc Le Fur
Mais le sujet est de même nature pour les médecins libéraux et pour les médecins salariés des hôpitaux : les difficultés de recrutement sont les mêmes. L’hôpital que je connais bien, entre Loudéac et Pontivy, est obligé de recruter essentiellement des médecins d’origine étrangère, qui ont le mérite d’être là et de faire leur travail, mais dont la situation n’est pas comparable à celle des médecins français. Il s’agit souvent de contrats temporaires, dans le cadre desquels les médecins sont payés relativement cher, comme l’a expliqué mon collègue de Courson. Ce n’est pas une situation très favorable et il faut trouver une solution. Nous vous en proposons une mais, comme à chaque fois, nous sommes renvoyés dans nos buts !
Je profite de l’occasion pour poser une question de fond. Le dispositif des ZRR arrivera bientôt à son terme. Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, pourriez-vous nous répondre sur la pérennité des ZRR ?
M. Jean-Paul Dufrègne
C’était l’objet d’une question au Gouvernement tout à l’heure ! Le dispositif est prorogé pour deux ans !
M. Marc Le Fur
Il s’agit d’un dispositif très important, créé durant la législature 1993-1997, qui fut bénéfique pour le monde rural et a été réorganisé il y a quelques années pour tenir compte des intercommunalités. Les élus locaux m’interrogent sur son devenir.
Mme Marie-Christine Dalloz
Voilà, très bien.
M. Marc Le Fur
Ce dispositif a eu le mérite de créer une forme de discrimination positive, comme on le dit désormais. C’est une bonne chose, car certains territoires particulièrement défavorisés disposent ainsi d’un petit avantage qui leur permet d’attirer du monde. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, pardonnez-moi de dépasser le cadre de l’amendement en discussion : j’aimerais que vous nous donniez des garanties quant à l’avenir des ZRR et, au moins, la pérennisation de la carte actuelle.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Vous abordez, monsieur Le Fur, un sujet important, celui des zonages ; autant en parler dès à présent. Nous avions abordé le sujet lors de la discussion des PLFR pour 2020. Nous attendions alors une évaluation des zonages qui – chacun le comprendra – a pris du retard. Compte tenu en outre de la crise que nous traversons, il me paraîtrait irresponsable de mettre fin à certains dispositifs comme les ZRR, mais aussi les BER, les bassins d’emploi à redynamiser – M. Cordier connaît ce dispositif dans les Ardennes, et il est aussi déployé en Ariège, notamment. J’ai la volonté de proroger l’ensemble des zonages spécifiques soumis à un calendrier ; nous aborderons ce sujet lors de la discussion de la seconde partie. Une prorogation d’au moins deux ans me paraîtrait cohérente et de nature, dans le cadre du plan de relance, à instaurer un climat de confiance dans ces zones pour favoriser les investissements dans un climat serein. Cela éviterait que la fin des dispositifs de zonage ne suspende une épée de Damoclès au-dessus des régions concernées.
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Tout d’abord, monsieur de Courson, l’exonération d’impôt sur le revenu dans les ZRR pour pallier les difficultés de recrutement dans les hôpitaux locaux proposée par l’amendement ajouterait de nouvelles difficultés de zonage ou de concurrence entre zones. Je connais bien certains territoires qui ne sont pas en ZRR : les hôpitaux publics de petite ou moyenne taille y rencontrent les mêmes difficultés de recrutement que ceux situés en ZRR. Cela signifie, comme l’indiquait M. le rapporteur général, que la réponse à ce problème de recrutement n’est pas nécessairement fiscale – en tout cas, elle ne doit pas passer par une accentuation du zonage qui créerait des disparités entre territoires. Voilà un premier élément de réponse à l’appui de l’avis défavorable du Gouvernement.
Je voudrais ensuite répondre à la question de M. Le Fur sur la pérennité des ZRR. Interrogée sur ce sujet tout à l’heure lors des questions au Gouvernement, Jacqueline Gourault a indiqué devant l’Assemblée qu’à l’occasion de l’examen du PLF, le Gouvernement déposerait un amendement visant à proroger de deux ans, soit jusqu’au 31 décembre 2023, les ZRR et l’intégralité des dispositions afférentes.
(L’amendement no 883 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 884 et 1634 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 1595.
Mme Patricia Lemoine
Cet amendement de notre collègue Aina Kuric vise à rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires. Il suggère d’aller un peu plus loin que la mesure proposée par le Gouvernement au titre de la désocialisation de ces heures. Par le passé, ce dispositif a démontré son efficacité. Gagnant-gagnant, il est bénéfique tant pour l’entreprise, qui voit le coût du travail diminuer, que pour le salarié, qui bénéficie d’un pouvoir d’achat plus élevé. Je vous propose donc d’adopter cet amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je ne suis pas d’accord avec votre proposition, madame Lemoine, pour deux raisons. D’abord parce qu’au cœur de la crise, à l’occasion de la commission mixte paritaire avec le Sénat sur le PLFR 2, nous avions abouti à une proposition temporaire visant à rehausser le plafond du montant des heures supplémentaires défiscalisées. C’était, je crois, la priorité. À l’époque, j’avais déjà donné un avis défavorable à un amendement de M. Woerth, me semble-t-il, qui souhaitait aller plus loin dans l’exonération de cotisations patronales.
M. Pierre Cordier et M. Fabien Di Filippo
Très bien ! Il avait raison !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Si j’avais émis cet avis défavorable, c’est parce que la priorité actuelle est de sauvegarder des emplois et d’essayer d’en créer de nouveaux. Par définition, les entreprises qui peuvent faire des heures supplémentaires, dont l’activité redémarre, ont besoin d’être accompagnées dans leurs investissements pour créer les emplois de demain. Je ne crois vraiment pas qu’une plus grande exonération de charges patronales soit la priorité. Ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est de mettre les deniers publics dans le plan de relance.
J’émets donc un avis défavorable, pas seulement pour des raisons financières, mais aussi pour des raisons de principe : nous devons veiller à bien cibler l’accompagnement des entreprises. Une mesure comme celle que vous proposez manquerait sa cible : elle ne permettrait pas de créations d’emplois, mais simplement une nouvelle déduction de cotisations patronales qui, aujourd’hui, ne serait pas très utile.
M. Fabien Di Filippo
Vision à court terme !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Il est défavorable, pour les mêmes raisons. M. le rapporteur général l’a rappelé : nous avons porté le plafond d’exonération des heures supplémentaires de 5 000 à 7 500 euros pour la durée de la crise. Vous proposez d’aller plus loin ; nous préférons pour notre part en rester aux dispositions d’exonération qui avaient été votées avant la crise, au début du quinquennat. À défaut du retrait de l’amendement, je confirme l’avis défavorable du Gouvernement.
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
La défiscalisation et la désocialisation des heures supplémentaires sont un sujet important. À notre demande, le Gouvernement avait accepté d’augmenter le plafond de 5 000 à 7 500 euros – même si cette disposition a été reportée d’un PLFR à un autre, l’important était qu’elle soit adoptée. Je pense pour ma part que l’on pourrait aller plus loin. Sans savoir s’il s’agit ou non d’une priorité, il me semble que nous devrions faire preuve de clarté à ce sujet, et peut-être tenter de mettre cette mesure en œuvre pendant un an ou dix-huit mois. On voit en effet le spectre du chômage avancer à grande vitesse ; le Gouvernement prévoit plus de 800 000 chômeurs supplémentaires d’ici la fin d’année, ce qui est considérable.
M. Jean-Louis Bricout
Et l’intérim !
M. Éric Woerth, président de la commission des finances
Je pense pour ma part que la baisse des charges sociales sur les heures supplémentaires est bénéfique. Il est vrai qu’elle ne peut s’appliquer dans certains secteurs économiques touchés par la crise, dans lesquels aucune heure supplémentaire n’est de toute façon effectuée, puisqu’il n’y a pas de travail. Mais d’autres secteurs vont bien et pourraient sans doute accepter une charge de travail plus importante avant d’embaucher – car quoi qu’il en soit, ils n’embaucheront pas de sitôt.
Mme la présidente
La parole est à Mme Patricia Lemoine.
Mme Patricia Lemoine
Au travers de cet amendement, nous ne faisons que relayer des demandes exprimées par certaines entreprises.
M. Robin Reda
Eh oui ! Très bien, madame !
Mme Patricia Lemoine
M. Woerth a raison : il est vrai que tous les secteurs n’expriment pas cette demande, mais certains le font avec force, comme le secteur des travaux publics et du bâtiment. N’étant pas la première signataire de cet amendement, je le maintiendrai au nom de ma collègue. Il me semble qu’il aurait été intéressant malgré tout de le mettre en œuvre, ne serait-ce que pour l’année 2021.
M. Pierre Cordier et M. Robin Reda
Un amendement Sarkozy !
(L’amendement no 1595 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de six amendements identiques, nos 3, 14, 58, 550, 1333 et 2546.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 3.
M. Marc Le Fur
Cet amendement concerne également les heures supplémentaires : c’est un sujet qui tient à cœur aux membres de ma famille politique, car nous considérons que la valeur travail est déterminante. Pour nous, les heures supplémentaires sont surtout destinées à un monde que l’on oublie bien souvent, le monde ouvrier.
M. Pierre Cordier
C’est vrai ! Très bien !
M. Marc Le Fur
Notre collègue a évoqué les travaux publics, mais il y a aussi le monde des usines. Il faut penser à ces travailleurs qui se sentent vraiment oubliés : on parle de beaucoup d’autres catégories diverses et variées, mais on les oublie totalement. Nous considérons qu’il est essentiel de penser au monde ouvrier. La réforme des heures supplémentaires avait été portée par Nicolas Sarkozy. Les socialistes l’ont supprimée…
M. Pierre Cordier
C’est exact !
M. Marc Le Fur
…– ils s’en sont d’ailleurs mordu les doigts –, avant que vous ne reveniez partiellement sur cette suppression. Je dis partiellement, car les cotisations patronales sur les heures supplémentaires sont toujours payées et les salariés bénéficiant de ces heures continuent de supporter la CSG et la CRDS – contribution pour le remboursement de la dette sociale. Le problème demeure donc. Nous considérons pour notre part qu’il faut être logique et cohérent : soit l’on encourage les heures supplémentaires et l’on va au bout du dispositif, soit on ne le fait pas. Notre point de vue, c’est que le travail doit être récompensé. Un certain nombre de Français souhaitent travailler, ne serait-ce que pour améliorer leur niveau de vie et offrir davantage d’opportunités à leur famille et à leurs enfants. Cette volonté de travail doit être récompensée : c’est l’objet de notre amendement.
M. Robin Reda
Très bien, monsieur Le Fur !
Mme la présidente
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 14.
M. Dino Cinieri
Cet amendement prévoit d’alléger les cotisations sur les heures supplémentaires, pour soutenir les entreprises et relancer l’économie. En effet, de nombreuses entreprises se retrouvent aujourd’hui en situation de sous-effectif en raison de l’épidémie de covid-19. Dans mon département, cela concerne les secteurs de la métallurgie et de la sidérurgie, les fonderies. Plusieurs dirigeants m’ont demandé d’alléger les charges sociales pour que les salariés présents puissent, dans le contexte de l’épidémie, remplacer leurs collègues absents et honorer les commandes qui permettront la survie de l’entreprise.
Mme la présidente
La parole est à M. Robin Reda, pour soutenir l’amendement no 58.
M. Robin Reda
Sans répéter l’excellent argumentaire de mon collègue Marc Le Fur, je soulignerai que cet amendement souhaite aller plus loin sur la question des heures supplémentaires parce que nous devons générer de la croissance. Or M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance l’a dit, et M. le rapporteur général le dit en permanence, il faut renouer avec la croissance pour faire face à la dette abyssale que nous laissera la crise dans laquelle nous sommes toujours plongés. Or quoi de mieux, pour renouer avec la croissance et assurer notre avenir économique, que de mettre la France au travail ? Les heures supplémentaires sont un moyen de générer de la croissance, car nous croyons fondamentalement que le travail ne se partage pas : il se génère par l’activité et la croissance.
M. Pierre Cordier
Très bien !
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 550.
M. Éric Pauget
J’abonde dans le sens de mes collègues du groupe Les Républicains : favoriser les heures supplémentaires, c’est accompagner cette relance que promeut le Gouvernement ! Nous sommes tous d’accord sur ces bancs, et nos amendements ne visent qu’à aller au bout du chemin – vous en avez parcouru une partie, mais vous n’osez pas aller vraiment au bout.
Vous avez porté à 7 500 euros le plafond d’exonération des heures supplémentaires ; nous vous proposons de supprimer ce plafond, car les heures supplémentaires sont un moyen d’alléger les cotisations des entreprises, et donc d’accompagner la relance que nous souhaitons tous soutenir.
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Rolland, pour soutenir l’amendement no 1333.
M. Vincent Rolland
Durant le confinement, de très nombreuses entreprises ont quasiment arrêté de fonctionner, car la demande s’est décalée. Elle est aujourd’hui bien présente, mais pour la satisfaire, les entreprises recourent massivement aux heures supplémentaires, ce que l’amendement vise donc à faciliter.
Tout à l’heure, un très bon exemple a été donné avec le secteur du bâtiment. On pourrait se demander pourquoi les entreprises ne recrutent pas, plutôt que d’avoir recours aux heures supplémentaires, mais c’est tout simplement parce que la situation reste encore beaucoup trop incertaine – je crois que chacun, ici, en conviendra. D’où la nécessité de faciliter le recours aux heures supplémentaires.
Mme la présidente
L’amendement no 2546 de M. Pierre Cordier est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Les amendements étant très voisins de celui de Mme Lemoine, l’avis sera le même que précédemment. Les argumentaires développés sont relativement similaires, je répondrai donc uniquement à Robin Reda, qui a tenu des propos très justes. En effet, le travail ne se partage pas, il se génère – je suis d’accord et je ne saurais dire mieux. Mais le travail et les emplois, cela se crée. La priorité doit donc être de donner aux entreprises la possibilité de créer de l’emploi, en commençant par le relocaliser.
M. Robin Reda
On a besoin de produire !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
La baisse de 10 milliards d’euros des impôts de production que nous proposons n’est rien autre qu’une manière de se donner les meilleurs moyens de relocaliser l’emploi. En subventionnant les investissements verts, en particulier s’agissant de la réindustrialisation des entreprises, nous cherchons à créer les emplois de demain. Si nous investissons 2 milliards d’euros dans le plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique, c’est pour que demain, des entreprises puissent s’engouffrer dans ce marché et que la France soit compétitive tout en créant des emplois.
Croyez-moi : en tant que rapporteur général, ma seule boussole est la protection et la création de l’emploi. Je n’en dévierai pas, et je reste convaincu que cela ne passe pas par une exonération de charges patronales, mais par le soutien aux marchés de demain, grâce auxquels les entreprises pourront remplir leurs carnets de commandes : voilà ce que signifie investir à leurs côtés.
Avis défavorable.
M. Robin Reda
Travailler pour créer plus !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Deux éléments pour appuyer l’avis défavorable du rapporteur. Tout d’abord, le dispositif, tel qu’il existe actuellement – avec une exonération limitée à 5 000 euros, et donc sans même tenir compte de la majoration décidée en raison de la crise –, couvre 85 % des heures supplémentaires effectuées – puisque, comme cela a été dit, ce sont les travailleurs aux salaires faibles ou moyens qui effectuent le plus d’heures supplémentaires.
De plus, le dispositif proposé, qui va beaucoup plus loin en termes d’exonération de cotisations patronales ou de CSG, représenterait un coût de 2 milliards d’euros pour les finances publiques – 1,6 milliard d’euros pour la sécurité sociale et 400 millions d’euros pour l’État.
Ce sont deux raisons supplémentaires d’émettre un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente
La parole est à Mme Cendra Motin.
Mme Cendra Motin
Cette proposition créerait un considérable effet d’aubaine dans les entreprises.
M. Fabien Di Filippo
L’effet d’aubaine de travailler ? Ca me dépasse !
Mme Cendra Motin
De plus, la simple exonération dont nous avons décidé pour le temps de la crise générera, en réalité, pas moins de trois ans de retard dans la gestion du système. En effet, j’ai été alertée par plusieurs entreprises, qui m’ont expliqué que comme elles annualisaient les heures supplémentaires, elles subiraient les conséquences de l’exonération – pourtant temporaire – jusqu’en 2023.
M. Fabien Di Filippo
À qui la faute ?
Mme Cendra Motin
Je ne crois pas que nous ayons envie, collectivement, d’alourdir les problèmes de gestion des entreprises ; aujourd’hui, elles ont surtout besoin de stabilité, de règles claires, et c’est pourquoi cette année, nous avons fait en sorte que rien ne change en matière de charges sociales.
M. Dino Cinieri
C’est faux !
Mme Cendra Motin
Alors ne compliquons pas les choses avec ce type d’exonérations temporaires qui, je le répète, créeront essentiellement des effets d’aubaine. Aujourd’hui, il est possible de faire des heures supplémentaires, elles sont exonérées jusqu’à 5 000 euros – ce n’est pas rien.
Nous devons créer un climat de confiance…
M. Fabien Di Filippo
C’est vous qui n’avez pas confiance dans les entreprises !
Mme Cendra Motin
…pour encourager les investissements dans les entreprises, qui doivent à leur tour créer des emplois. Tel est notre objectif. En commençant par donner une manne financière qui n’est rien d’autre qu’un effet d’aubaine, je crains que vous ne nous emmeniez, au bout du chemin, dans une impasse.
(Les amendements identiques nos 3, 14, 58, 550, 1333 et 2546 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 1, 12, 91, 383, 551, 705, 1073, 1335, 2547, 475, 548, 1334, 1629 et 2544, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1, 12, 91, 383, 551, 705, 1073, 1335 et 2547 sont identiques ; les amendements nos 475, 548, 1334, 1629 et 2544 le sont également.
L’amendement no 1 de M. Marc Le Fur est défendu.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 12.
Si vous le voulez bien, mon cher collègue, je vous propose de présenter en même temps votre amendement no 475.
M. Dino Cinieri
Si vous me le demandez, madame la présidente… Je ne peux rien vous refuser ! (Sourires.)
La loi de finances rectificative du 25 avril 2020 a modifié l’article 81 quater du code général des impôts pour prévoir que les heures supplémentaires effectuées par les employés du 16 mars à la fin de l’état d’urgence sanitaire, soit le 10 juillet au soir, soient exonérées d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales dans la limite de 7 500 euros par an, contre 5 000 euros depuis le 1er janvier 2019.
Cet amendement vise à prolonger le relèvement du plafond jusqu’au 31 décembre 2020. Monsieur le ministre, vous avez indiqué que l’exonération de charges sociales sur les futurs marchés était déjà prévue, pour permettre aux entreprises de produire mieux et de répondre à la demande. Seulement, avant de produire pour répondre aux marchés futurs, encore faut-il pouvoir honorer les marchés aujourd’hui, en particulier lorsqu’on manque de personnel en raison du covid.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 91.
M. Fabrice Brun
Nous sommes tous d’accord ici pour dire que la priorité est de relocaliser l’emploi. Mais une chose nous différencie, et nous le verrons lors des discussions sur ce PLF : à travers le plan de relance, vous défendez en réalité un plan de compétitivité à moyen terme, alors que nous nous mobilisons pour une relance urgente de l’économie.
En effet, la reprise économique se fait aujourd’hui en accordéon ; dans de nombreux secteurs, ce sont les montagnes russes. Il faut donc de la souplesse et de la flexibilité en fonction des marchés et des commandes. Or, cela a été dit, pour nombre de secteurs en souffrance, comme les usines, la filière BTP – bâtiment et travaux publics –, les imprimeries, le bon outil pour assurer souplesse et flexibilité est l’exonération des heures supplémentaires.
En effet, cette mesure permet de s’appuyer sur les équipes en place et de les récompenser pour leur engagement dans la reprise économique du pays tout au long de l’année 2021. Vous venez de refuser l’extension de l’exonération des charges patronales ; acceptez au moins de prolonger en 2021 une mesure adoptée en commission mixte paritaire et qui avait fait consensus entre les deux chambres du Parlement et parmi toutes les sensibilités de nos assemblées.
Mme la présidente
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 383.
Mme Émilie Bonnivard
Avec ces amendements, nous cherchons à instaurer la stabilité que vous défendez. En adoptant les projets de loi de finances rectificative, nous avons voté le relèvement du plafond d’exonération à 7 500 euros.
Alors que nous sommes toujours en crise, nous avons plus que jamais besoin de stabilité. Au moment où les entreprises n’ont pas de visibilité sur les embauches, l’exonération des heures supplémentaires est un outil extraordinaire pour encourager les salariés de ces entreprises à travailler davantage. Ainsi, ils contribuent à la relance et disposent de plus de revenus après bien souvent des mois de chômage partiel.
Il me semble donc que nos amendements sont tout à fait cohérents avec les propos de Mme Motin. Nous défendons la stabilité et nous inscrivons dans la continuité de ce que nous avons adopté lors du PLFR 2. (Mme Véronique Louwagie applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 551.
M. Éric Pauget
Je défendrai également l’amendement no 548, puisque seule la date proposée change.
Nous avons tous conscience que nous entrons à nouveau dans la crise sanitaire et que le temps de la relance, tout comme les mesures prévues lors du PLFR, est remis en cause. Il est donc nécessaire de décaler dans le temps les aides que nous avons adoptées il y a quelques mois, afin de faire face à la réalité sanitaire et économique actuelle.
Nous vous proposons donc de prolonger l’exonération jusqu’au 31 décembre 2021, ou au moins – c’est l’objet de l’amendement n°548 – jusqu’au 31 décembre 2020.
Mme la présidente
L’amendement no 705 de Mme Marie-Christine Dalloz est défendu.
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l’amendement no 1073.
M. Fabien Di Filippo
Nos discussions tendent à nous rapprocher d’un accord sur la nécessité de sortir d’un certain malthusianisme sur le partage du travail qui, lors du mandat précédent, avait conduit à la catastrophe avec la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires.
Je rappelle tout de même que lors des dix-huit premiers mois du quinquennat, vous avez rejeté notre proposition de défiscaliser les heures supplémentaires. Puis il y a eu la crise des gilets jaunes. Les gens nous interpellaient pour nous dire : « Je travaille, mais je n’arrive plus à finir le mois. » Vous aviez alors accédé à notre demande et rétabli la défiscalisation des heures supplémentaires. En termes de pouvoir d’achat pour les personnes qui travaillent, c’est tout à fait décisif.
Mais il faut aller plus loin. Désocialiser et défiscaliser sont une chose, mais pour assurer une réelle incitation à recourir aux heures supplémentaires, il faut que leur coût soit plus bas pour les employeurs. Il faudra donc se poser la question des charges patronales sur les heures supplémentaires.
Seule l’activité génère de l’activité, et donc de l’emploi. Contrairement à ce que vous pensez, ce ne sont pas le plan de relance ou une baguette magique qui créeront des emplois, car cela ne dure pas dans le temps. En réalité, c’est la question de la compétitivité qui est aujourd’hui posée.
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Rolland, pour soutenir l’amendement no 1335.
M. Vincent Rolland
Comme il s’agit là aussi d’une simple question de date, je défendrai également l’amendement no 1334.
Je parlais tout à l’heure de la nécessité d’avoir de la visibilité. Alors qu’en raison de la crise, les entreprises n’en ont globalement plus, donnons-leur la possibilité de recourir aux heures supplémentaires et aux dispositifs qui les accompagnent jusqu’à la fin de l’année 2021.
Mme la présidente
L’amendement no 2547 de M. Pierre Cordier est défendu.
Dans la série d’amendements identiques suivante, les amendements nos 475, 548 et 1334 ont déjà été présentés. Les amendements nos 1629 de M. Pierre-Henri Dumont et 2544 de M. Pierre Cordier sont défendus.
Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Nous avons en effet une différence d’approche s’agissant de la cible de l’investissement de deniers publics pour recréer de l’emploi.
M. Fabrice Brun
C’est vrai.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Aujourd’hui, nous l’avons dit, 85 % des personnes effectuant des heures supplémentaires – et elles ont bien raison de le faire – restent en deçà du plafond de 5 000 euros. Pérenniser le relèvement de ce plafond à 7 500 euros, mesure décidée en 2020, n’est pas la bonne réponse à la crise : vous voyez bien que cela concernera les salariés d’une tranche plus élevée.
Or ce dont nous avons besoin en priorité aujourd’hui, c’est de sauver et préserver les emplois les plus fragiles et les plus précaires, en investissant directement aux côtés des entreprises, non d’offrir un avantage fiscal supplémentaire à ceux qui bénéficient déjà de l’exonération d’impôt sur le revenu et de la désocialisation des heures supplémentaires.
Il faut vraiment que nous menions cette réflexion ensemble : la priorité est d’investir dans les entreprises, pour qu’elles puissent dégager des marges et donc créer des emplois, en particulier des emplois moins qualifiés. Nous n’avons pas la même philosophie sur la cible du dispositif. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis défavorable, car je considère que le dispositif, tel qu’il existe actuellement, suffit à accompagner le recours aux heures supplémentaires. En outre, je partage les arguments de M. le rapporteur général s’agissant des outils à mobiliser pour développer l’emploi et la relance.
(Les amendements identiques nos 1, 12, 91, 383, 551, 705, 1073, 1335 et 2547 ne sont pas adoptés.)
(Les amendements identiques nos 475, 548, 1334, 1629 et 2544 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 13 et 2, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 13.
M. Dino Cinieri
Il vise à aller plus loin dans la reconnaissance du rôle de l’ensemble des soignants qui ont été en première ligne pendant la crise du covid-19, en augmentant le plafond de l’exonération d’impôt sur le revenu des heures supplémentaires effectuées par les personnels soignants médicaux, paramédicaux et ambulanciers visés par le décret du 11 juin 2020. Alors qu’il y a aujourd’hui beaucoup d’arrêts maladie dans les EHPAD en raison du covid, et beaucoup d’absentéisme, je voudrais, en notre nom à tous, leur apporter tout notre soutien.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 2.
Mme Marie-Christine Dalloz
Regardons la réalité en face : tout le monde s’est accordé à reconnaître que nos soignants avaient fait un travail hors normes. Que ce soit en milieu hospitalier, à domicile ou dans les EHPAD, la mobilisation des personnels a été extraordinaire. Le Gouvernement s’était engagé à les rémunérer en heures supplémentaires ; mais la période de la première vague a été si longue que le paiement de ces heures dépasse le plafond de son exonération d’impôt sur le revenu, ce qui entraîne la perte de l’avantage fiscal.
Cet amendement dû à Marc Le Fur vise donc à rectifier provisoirement le dispositif, afin de l’adapter au cas particulier du surcroît de travail occasionné par la crise. On ne peut pas, tous les soirs, remercier les soignants, les féliciter, s’associer à leur travail, et en même temps…
M. Pierre Cordier
Si, « en même temps » !
Mme Marie-Christine Dalloz
…laisser l’avantage fiscal qui leur était promis se ressentir du plafond d’exonération.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
À objets différents, avis similaires. Les heures supplémentaires ne sont pas le premier levier à actionner pour faire face à cette crise, et ce quelles que soient les professions concernées, même si je comprends les intentions qui sous-tendent vos amendements. Avis défavorable.
M. Pierre Cordier
C’est dommage !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis, qui ne variera d’ailleurs pas pour les amendements suivant la même logique.
En appliquant les dispositions prévues par les amendements que nous venons d’examiner, nous porterions le plafond de l’exonération d’impôt sur le revenu à 75 000 ou 80 000 euros d’heures supplémentaires par an. Or le plafonnement à 5 000 euros couvre 95 % des heures supplémentaires effectuées dans notre pays : le seul effet de l’adoption de ces amendements serait donc, au mépris de toute progressivité, d’exonérer les heures supplémentaires de travailleurs dont les salaires sont déjà bien au-dessus de la moyenne.
(Les amendements nos 13 et 2, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 101, 549, 1677 et 2545.
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 101.
M. Fabrice Brun
Je voudrais insister sur notre volonté de récompenser celles et ceux qui se sont trouvés en première ligne face au covid-19 : les soignants et aides-soignants, ambulanciers, professions paramédicales, auxiliaires de vie, agents des services hospitaliers, infirmiers. Au cours du premier semestre 2020, ils ont multiplié les heures supplémentaires. Par conséquent, il importe de relever le plafond de l’exonération d’impôt sur le revenu de ces heures, qui ont déjà fait l’objet du décret du 11 juin 2020.
Ce relèvement se justifie d’autant plus que la direction générale de l’offre de soins, la DGOS, envisage de créer une indemnité correspondant aux congés payés qui n’ont pas été pris pour raisons de service. C’est vous dire si les heures supplémentaires, dans ces professions de santé, constituent une réalité essentielle. Sans revenir sur les controverses suscitées par la prime covid, je ne peux qu’encourager le Gouvernement à ne pas exclure du dispositif de la DGOS les agents des EHPAD, des services à domicile et des établissements prenant en charge des personnes en situation de handicap.
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Pauget, pour soutenir l’amendement no 549.
M. Éric Pauget
Fabrice Brun l’a dit, il s’agit d’un amendement de reconnaissance envers tous ceux qui ont constitué la première ligne face au covid-19 : personnels soignants, médicaux, paramédicaux, ambulanciers, bref toutes les professions visées par le décret du 11 juin. Encore une fois, avec le relèvement du plafond d’exonération, c’est une marque de reconnaissance que nous demandons aujourd’hui.
Mme la présidente
L’amendement no 1677 de Mme Nadia Ramassamy est défendu.
La parole est à M. Pierre Cordier, pour soutenir l’amendement no 2545.
M. Pierre Cordier
L’argumentation restant la même, il est défendu.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Pour les mêmes raisons que précédemment, il est défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis.
M. Pierre Cordier
Les personnels soignants vous en remercient ! Nous ne manquerons pas de le leur dire !
Mme la présidente
La parole est à M. Damien Abad.
M. Damien Abad
Le groupe Les Républicains soutient bien sûr ces amendements qui, au-delà de l’exonération des heures supplémentaires, visent à valoriser le personnel soignant, les ambulanciers et autres.
Monsieur le ministre délégué, je voudrais vous adresser une question très concrète. Vous avez parlé du Ségur de la santé, de la revalorisation des salaires du personnel soignant ; mais cette revalorisation va faire sortir certains soignants du dispositif de la prime d’activité. Pouvez-vous nous dire combien se trouveront dans ce cas, et verront donc l’effet de la revalorisation annulé en ce qui les concerne ? J’aurais besoin d’éléments précis à ce sujet.
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Par correction, je ne veux pas paraître ignorer la question posée par M. Abad ; mais à l’heure où je vous parle, je ne sais pas y répondre. Je vais me renseigner, et je partagerai avec vous les chiffres qui me seront fournis.
Mme Émilie Bonnivard
Très bien !
(Les amendements identiques nos 101, 549, 1677 et 2545 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 885.
Mme Véronique Louwagie
Cet amendement est relatif à la transmission des entreprises, qui constitue un sujet important, car la France compte un certain nombre d’entreprises dont les dirigeants atteignent l’âge de la retraite.
Il faut donc favoriser cette transmission. Or il existe aujourd’hui un frein : les frais d’étude et de diagnostic induits par une éventuelle cession ne sont pas déductibles de l’impôt sur le revenu. Encore une fois, c’est un vrai sujet. Pour inciter les chefs d’entreprise à en préparer la transmission, nous devrions faire en sorte que ces frais, par exemple les honoraires de conseil, puissent être déduits : c’est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Comme chaque année, durant l’examen de ce projet de loi de finances, nous reviendrons régulièrement sur le sujet de la transmission des entreprises. En France, le régime fiscal de ces cessions est intéressant : honnêtement, je ne crois pas que les frais d’étude et de diagnostic doivent y être intégrés. Avis défavorable, pour en rester à l’état actuel du droit, et en attendant l’examen des prochains articles, qui nous offriront beaucoup d’amendements ayant trait à ce sujet.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Les frais professionnels sont des frais engagés par le contribuable, personne physique, dans le cadre de son emploi et pour participer à sa rémunération. Les frais d’étude de cession ne peuvent être intégrés à cette catégorie ; c’est pourquoi nous ne souhaitons pas une telle dérogation. Avis défavorable. En effet, d’autres dispositions nous donneront l’occasion de revenir à ces cessions d’entreprises.
(L’amendement no 885 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 518 et 520 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour les soutenir.
M. Jean-Paul Mattei
Ces amendements dus à Mohamed Laqhila abordent la question des revenus fonciers, qui sont des revenus catégoriels, et visent à porter de 10 700 à 21 400 ou, à défaut, à 16 050 euros par an le plafond déductible imputable sur les autres revenus.
Les revenus fonciers sont particulièrement mal traités : ils sont soumis à diverses contributions sociales, pour un prélèvement total de 17,2 %, mais aussi à l’impôt sur le revenu. Je sais que ces amendements auront bien du mal à susciter un avis favorable de M. le rapporteur général et du Gouvernement ; il n’empêche qu’il convient de s’interroger. Actuellement, nous voulons relancer la rénovation des immeubles : faire appel aux investisseurs privés serait une bonne façon de stimuler ces projets de transition énergétique.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Jean-Paul Mattei et moi avons déjà eu cette discussion à plusieurs reprises ; Charles de Courson prolongeait le débat en demandant, à juste titre, pourquoi ce plafond n’a pas été rehaussé depuis plusieurs années.
Cependant, encore une fois, il serait assez peu pertinent d’adopter l’un de ces amendements. En effet, une fois atteint le plafond déductible de votre revenu global, vous pouvez reporter le surplus du déficit sur les revenus fonciers des années suivantes. Si nous ne disposions pas de cette solution, et que le plafond se trouvait régulièrement atteint, il faudrait probablement le relever ; mais le régime actuel est tout à fait favorable ; maintenons-le donc en l’état. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Pour les mêmes raisons que M. le rapporteur général, et comme l’avait pressenti M. Mattei, je demande le retrait de ces amendements ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Vous conviendrez que les revenus fonciers, en comparaison des autres revenus, sont quelque peu anachroniques. Il faudrait se pencher sur une vraie réforme, indispensable à long terme, pour les doter d’une fiscalité un peu plus moderne. On atteint la tranche marginale de l’impôt sur le revenu à 12,2 %, alors que la flat tax a un taux de 30 % ! Encore une fois, il faut une réflexion à long terme : ce sera certainement l’objet de nos débats dans quelques années.
(Les amendements nos 518 et 520 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
L’amendement no 2642 de M. Jean-Luc Lagleize est défendu.
(L’amendement no 2642, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de cinq amendements identiques, nos 220, 695, 994, 1056 et 1336.
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 220.
M. Fabrice Brun
L’un des enjeux de la relance économique, c’est le bâtiment, en particulier dans des territoires tels que l’Ardèche ou encore la Drôme : le secteur y représente jusqu’à un emploi sur dix, quel que soit le niveau de qualification. De même, l’un des enjeux de la transition écologique, c’est la rénovation thermique des bâtiments, habitations comprises.
Sans les bailleurs, nous ne gagnerons pas la bataille de la massification de cette rénovation énergétique. Voilà pourquoi nous voulons leur permettre de déduire de leur revenu global les déficits fonciers issus de travaux visant à l’amélioration de la performance énergétique. Cette mesure forte permettrait de lutter contre les passoires thermiques et d’améliorer ainsi le confort quotidien de milliers, voire de millions de Français.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 695.
Mme Marie-Christine Dalloz
Dans le même esprit, dans la continuité logique des propos de Fabrice Brun, j’ajouterai que le secteur du bâtiment représente 2 millions d’emplois et 500 000 entreprises. Celles-ci ont subi un choc équivalent à celui d’une fermeture administrative : pour elles, il ne se passait plus rien.
Lorsqu’on les interroge aujourd’hui au sujet de leurs perspectives d’avenir, on constate que les dirigeants de ces entreprises prévoyaient une reprise à partir de septembre et jusqu’à la fin de l’année ; mais à compter de l’année prochaine, de nouveau, un trou d’air incroyable. Plutôt que de leur donner des moyens directs, il faut leur permettre de retrouver une activité, une forte activité.
Le dispositif que nous vous proposons par l’intermédiaire de ces amendements serait à même de relancer l’économie au profit de ces entreprises, dans le cadre de la rénovation énergétique, c’est-à-dire d’une priorité que vous affichez depuis longtemps. Pour cela, il faut seulement que les bailleurs qui s’engageront dans la rénovation énergétique puissent dépasser le plafond de 10 700 euros de déficit déductible.
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Naegelen, pour soutenir l’amendement no 994.
M. Christophe Naegelen
Actuellement, le plafond annuel d’imputation des déficits fonciers sur le revenu global est limité à 10 700 euros. Pour inciter les bailleurs à investir au maximum dans la rénovation énergétique, il convient de supprimer ce plafonnement. Si tel était le cas, des sommes plus importantes seraient investies, ce qui aurait non seulement l’avantage de faire travailler les entreprises concernées, mais aussi, et surtout, de produire des résultats concrets et de soutenir plus fortement la rénovation énergétique. Il s’agit donc d’un amendement de bon sens.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabien Di Filippo, pour soutenir l’amendement no 1056.
M. Fabien Di Filippo
Il vise à engager un effet de relance beaucoup plus immédiat que le plan de relance du Gouvernement qui, au-delà de 2021, s’étale sur les années suivantes, alors que nous aurons été frappés bien plus tôt par le drame du chômage. Autre avantage, le dispositif que nous proposons ne pèse pas sur les crédits publics, mais mobilise des investissements privés. Tel est le but du déplafonnement que nous préconisons pour les travaux de rénovation énergétique effectués par les bailleurs. Ce serait profitable pour la performance énergétique, pour le secteur du bâtiment, pour l’économie et pour les finances publiques.
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Rolland, pour soutenir l’amendement no 1336.
M. Vincent Rolland
Il vise un double objectif : consolider l’activité du bâtiment en favorisant les travaux de rénovation énergétique et accélérer la transition écologique que nous appelons tous de nos vœux. C’est donc un amendement gagnant-gagnant.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Il faut décrire les dispositions fiscales actuelles jusqu’au bout, monsieur Naegelen : il existe certes un plafond annuel d’imputation des déficits fonciers sur le revenu global, mais le surplus éventuel de déficit foncier qui dépasse cette limite peut être imputé sur les revenus fonciers des années suivantes. Il est important de prendre en considération l’intégralité des possibilités fiscales, et de préciser que lorsque le plafond est atteint, l’histoire n’est pas finie.
Mon avis est défavorable sur ces amendements pour plusieurs raisons. Tout d’abord, nous les avons déjà examinés à l’occasion du PLFR 3, et j’y étais déjà opposé. Ensuite, les travaux de rénovation énergétique sont bien évidemment éligibles à la déductibilité. Enfin, MaPrimeRénov’ est devenu le principal outil de l’action publique pour accompagner les travaux de rénovation thermique des bâtiments.
MaPrimeRénov’ est en vigueur depuis le 1er octobre, et a évolué. Du fait de la crise, le Gouvernement a décidé de l’ouvrir aux propriétaires bailleurs, aux copropriétaires – excellente nouvelle – et à l’ensemble des ménages. Souvenez-vous : nous avions débattu des deux derniers déciles à réintégrer dans le crédit d’impôt transition énergétique, le CITE. Or MaPrimeRénov’ s’adresse à l’ensemble des ménages, et maximise ainsi l’effet « gagnant-gagnant » que vous mentionnez à juste titre. En outre, un barème progressif permet aux ménages les plus modestes de bénéficier davantage que les autres de ce dispositif. Enfin, il est prévu une bonification de MaPrimeRénov’ pour les travaux de rénovation globale.
Nous disposons donc déjà, depuis le 1er octobre, d’un outil direct d’aide et de financement. Peut-être faut-il le simplifier et le rendre plus opérationnel, je vous l’accorde. Toutefois, nous avons beaucoup plus à gagner, collectivement, à employer MaPrimeRénov’ pour soutenir la rénovation thermique des bâtiments des ménages, qu’à recourir au déplafonnement que vous proposez ou à retirer les travaux de rénovation thermique de l’assiette d’imputation des déficits. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Je fais miens les arguments de M. le rapporteur général. Comme il l’a rappelé, un report est possible sur les années suivantes. En outre, les dispositifs de droit commun et les dispositifs de relance dédiés à la rénovation thermique et énergétique des bâtiments sont déjà très importants, d’autant que leur cible a été largement étendue afin de couvrir la totalité des déciles. Notez que la moitié des travaux est réalisée par les huitième et neuvième déciles : les rendre éligibles aura donc un véritable effet multiplicateur. Plus encore, les propriétaires individuels, mais aussi les bailleurs et les copropriétés, sont désormais éligibles.
Pour soutenir le secteur du bâtiment dans ces domaines, l’État a par ailleurs lancé un appel à projets pour la rénovation thermique et énergétique de ses propres bâtiments. Cet appel à projets s’est déroulé du 7 septembre au 9 octobre, et les dossiers retenus seront publiés le 1er décembre. Enfin, une enveloppe de 1 milliard d’euros est prévue pour accompagner la rénovation thermique et énergétique des bâtiments des collectivités locales, dans le cadre d’appels à projets qui seront lancés dans les prochaines semaines. Les dispositifs étant déjà nombreux, il n’est pas opportun d’y ajouter les règles fiscales que vous proposez. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Louis Bricout.
M. Jean-Louis Bricout
MaPrimeRénov’ est loin de couvrir tous les champs et de répondre à tous les enjeux du logement. Les aides directes attribuées actuellement au parc privé – bailleurs et propriétaires occupants – ne dépassent pas le niveau de 2017, bien que l’assiette ait été élargie aux bailleurs, aux copropriétés et aux ménages les plus aisés – mesure qui déclenchera certes des travaux, mais qui ne résoudra malheureusement pas la situation des ménages en grande précarité énergétique.
MaPrimeRénov’ ne s’inscrit pas non plus dans la trajectoire d’une neutralité carbone en 2050, qui nécessiterait de dépenser près de 12 milliards d’euros par an ; nous en sommes loin ! Elle ne traduit pas davantage une politique globale et performante du logement : des travaux coûtant quelque 10 000 euros sont loin d’une telle ambition, mais sont plutôt des projets de rénovation « à la découpe ».
Par ailleurs, MaPrimeRénov’ n’assure pas un bon accompagnement des personnes et ne diminue pas la complexité administrative : il existe encore une multiplicité de programmes, comme l’aide Habiter mieux. MaPrimeRénov’ n’est donc pas forcément la bonne solution. Nous avions proposé une prime climat qui cumulait tous les avantages ; il est dommage que vous ne l’ayez pas retenue.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabien Di Filippo.
M. Fabien Di Filippo
Votre réponse n’est satisfaisante ni économiquement, ni financièrement, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général. Elle ne l’est pas économiquement, car votre solution exclut certains travaux que mèneraient les bailleurs dans leurs logements ; elle ne l’est pas financièrement, car aucun des dossiers MaPrimeRénov’ – ni du dispositif précédent – n’est allé jusqu’à son terme. Certains ont sept ou huit mois de retard ! Je vous ai déjà alertés plusieurs fois sur ce point : les artisans, et parfois même les particuliers, ont avancé des montants considérables, mais l’argent n’arrive pas. Pourquoi ces dossiers, déposés depuis belle lurette, ne sont-ils toujours pas validés ? Nous sommes mi-octobre, et l’argent se fait toujours attendre ! Avant de parler de MaPrimeRénov’ de l’année prochaine, expliquez-nous pourquoi, sur le terrain, ces crédits n’arrivent pas ! Vous allez faire péricliter des sociétés parfaitement compétentes et viables !
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert
MaPrimeRénov’ est devenu le véhicule global censé répondre aux questions de rénovation énergétique. Or cet instrument est très compliqué. En tant que rapporteur spécial, je l’avais qualifié de Rubik’s Cube ! Depuis, vous avez créé un MaPrimeRénov’ violet, un MaPrimeRénov’ rose, un MaPrimeRénov’ jaune… Rappelons que cette prime est attribuée à la suite d’un calcul complexe, qui croise les données fiscales du demandeur avec les conditions énergétiques. En d’autres termes, si j’achète une pompe à chaleur et que je gagne plus de 3 300 euros de revenu de référence, j’ai droit à un montant donné ; mais si j’achète une chaudière à gaz et que je suis dans le quatrième décile, j’ai droit à un montant différent… En outre, MaPrimeRénov’ n’est pas adapté aux propriétaires bailleurs qui souhaiteraient faire des travaux lourds dans plusieurs de leurs biens. Si ces amendements étaient adoptés, nous pourrions tester les deux solutions – quitte à empêcher leur cumul – et juger laquelle est la plus propice à massifier les travaux.
Quant au plafond de 10 700 euros, il est inférieur au prix de certaines chaudières, qui peut rapidement atteindre 16 000 ou 18 000 euros. Avec une isolation par les combles, la facture peut monter à 30 000 euros ! Ce sont des investissements très lourds. Les propositions de mes collègues sont beaucoup plus simples que MaPrimeRénov’, dispositif qui débute et qui s’ouvre à peine aux propriétaires bailleurs.
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Éric Woerth, président de la commission des finances
Je soutiens ces amendements. Rappelons que lors de l’examen du PLFR, la majorité et le Gouvernement s’étaient très fermement opposés à ce que les bailleurs et les neuvième et dixième déciles soient éligibles à MaPrimeRénov’. Vous y êtes finalement venus, et tant mieux. Vous devriez écouter davantage ce que vous dit l’opposition ! Quand l’opposition vous sensibilise aux bailleurs qui veulent effectuer des travaux de rénovation, peut-être devriez-vous prêter l’oreille !
M. Julien Aubert
Il ne faut pas écouter toutes les oppositions !
(Les amendements identiques nos 220, 695, 994, 1056 et 1336 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l’amendement no 2862.
M. Julien Aubert
Il vise une catégorie de contribuables qui a été particulièrement malmenée depuis 2017, les plus de 65 ans et les personnes frappées d’invalidité. Une étude publiée par l’Institut national de la statistique et des études économiques – INSEE – en mars 2019 indique qu’alors que le niveau de vie de l’ensemble des Français a baissé de 0,4 % en moyenne entre janvier et octobre 2018, celui des retraités a baissé de 2 %, soit un écart de 1,6 point. L’augmentation de la CSG que vous avez appliquée dans un premier temps, avant de l’annuler pour les retraités percevant moins de 2 000 euros, y a contribué.
Par cet amendement, nous proposons de doubler l’abattement dont disposent les plus de 65 ans et les personnes frappées d’invalidité. Les montants en jeu ne sont pas très élevés : 99 euros par mois pour un revenu supérieur ou égal à 2 000 euros mensuels, environ 200 euros par mois pour un revenu inférieur à 1 241 euros. Ce doublement de l’abattement contrebalancerait la faible revalorisation des pensions, comprise entre 0,8 % et 1 %, qui rend cette catégorie beaucoup plus sensible, notamment en temps de crise. Nous la protégerions, par un coussin fiscal, du choc qui se profile sur le pouvoir d’achat dans les mois à venir.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Des conditions fiscales particulières, y compris des abattements, sont déjà appliquées aux personnes invalides et à celles qui touchent une retraite modeste. Je ne souhaite pas que nous modifiions la fiscalité de ces ménages. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis.
(L’amendement no 2862 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 886.
Mme Véronique Louwagie
Il vise à trouver une solution pour les personnes dépendantes, notamment celles qui perçoivent l’APA. Un grand nombre d’entre elles souhaitent rester à domicile mais ont besoin de l’aide constante d’un tiers, qui occasionne des dépenses importantes. Leurs ressources ne leur permettent pas toujours de rester à domicile. Elles ne souhaitent pas non plus vendre leur maison, mais y vivre.
Or il existe un dispositif qui leur permettrait de disposer de revenus tout en restant à leur domicile : le viager, puisqu’il procure des rentes.
Cet amendement propose d’exonérer d’imposition les rentes viagères perçues par des personnes bénéficiant de l’APA. La défiscalisation serait corrélée à la survenue de la dépendance ; elle ne serait donc pas déployée pour l’ensemble des Français.
C’est une réponse intéressante au risque de dépendance : elle aiderait les personnes à faire face aux dépenses relativement importantes qu’occasionne la perte d’autonomie.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Au-delà du fait que l’exonération proposée par votre amendement n’est pas soumise à conditions de ressources, ce qui pose problème, je ne crois pas opportun d’adopter dans le cadre du PLF quelques mesures concernant la dépendance – et il ne s’agit pas pour moi de botter en touche de manière systématique s’agissant de cet enjeu.
Nous aurons ce débat dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale et nous l’aurons aussi, dès le début de l’année 2021, avec le projet de loi « Grand âge et autonomie ». Il nous faut établir un modèle social français du financement de la dépendance. Si nous adoptons aujourd’hui quelques mesures, elles seront par définition insuffisantes. Nous aurons un débat collectivement, après avoir créé la cinquième branche et le cinquième risque au printemps dernier, ce qui était une excellente nouvelle.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz
J’estime que l’amendement de Mme Louwagie a beaucoup de sens.
M. Maxime Minot
Bien sûr !
Mme Marie-Christine Dalloz
On nous promet depuis maintenant deux ans une grande loi sur la dépendance. Nous avons eu beaucoup de communication à ce sujet, mais concrètement, les familles ne voient rien venir. C’est pour elles un lourd enjeu budgétaire, financier, et même sentimental car cela crée beaucoup de tensions. Les enfants ou les petits-enfants sont mis à contribution pour payer les prix de journée alors qu’il y aurait des solutions faciles à mettre en œuvre comme celle proposée par ma collègue.
Cet amendement pose une vraie question et il la traite, sinon en totalité, du moins en partie ; mais comme il ne vient pas de la majorité, comme il ne prend pas place dans une grande réunion donnant lieu à de multiples communications comme le Gouvernement sait le faire, il sera rejeté. Je le déplore, car il avait vraiment le mérite de faciliter la vie des familles. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Cendra Motin.
Mme Cendra Motin
Non, nous ne sommes pas que dans la parole et l’incantation. Avant nous, certains ont fait beaucoup de promesses. Nous, nous tenons celles que nous faisons ! (Protestations sur les bancs du groupe LR.)
Nous créons la cinquième branche dans le PLFSS, nous l’accompagnons des financements qui vont avec, et ce grand texte sur la dépendance, nous allons en débattre ! Toutes vos idées seront bien sûr les bienvenues ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. Maxime Minot
Vous ne les écoutez pas !
(L’amendement no 886 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 1119, 535 et 1886. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 1119.
Vous pourrez peut-être, monsieur le rapporteur général, présenter en même temps votre sous-amendement no 2931, qui porte sur l’amendement no 1119.
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
L’amendement no 1119, adopté par la commission des finances, vient régler une problématique récurrente posée par la réforme de la fiscalité des non-résidents. Je laisserai Mme Genetet donner plus de détails, car son amendement est identique.
Quant à mon sous-amendement no 2931, il est rédactionnel.
Mme la présidente
La parole est à Mme Anne Genetet, pour soutenir l’amendement no 1886.
Mme Anne Genetet
Cet amendement vient corriger la réforme de l’imposition des contribuables non-résidents entamée il y a deux ans. Il concerne plus particulièrement les revenus perçus en France par des contribuables domiciliés à l’étranger, qui sont environ 260 000.
Cette réforme a conduit, pour certaines catégories de contribuables, à une augmentation considérable de leur imposition, de l’ordre de 200 %, ce qui n’était évidemment pas acceptable. Un moratoire avait été proposé. À cet égard, je voudrais souligner le travail de construction mené conjointement par le Gouvernement, les associations de contribuables et les parlementaires pour stabiliser cette réforme et faire en sorte que la collecte de l’impôt soit plus simple.
Les Français de l’étranger ne sont pas des Français massacrés, comme certains le prétendent ici, ce sont des Français écoutés : nous tenons compte de leurs remarques. Nous sommes parvenus à stabiliser la réforme. À partir de maintenant, leurs impôts ne connaîtrons plus d’augmentations. C’est chose définitive. Je remercie encore une fois le Gouvernement pour son écoute, qui nous a permis d’arriver à cette conclusion. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements identiques et le sous-amendement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Mme Genetet l’a dit à l’instant, la réforme de la fiscalité des non-résidents a été initiée il y a plus de deux ans. Ne restait plus qu’une étape à franchir, qui consistait à supprimer le caractère partiellement libératoire de la retenue à la source spécifique applicable aux contribuables non-résidents. Lors du débat sur le PLF pour 2020, les risques pesant sur les non-résidents les moins fortunés avaient été exposés. Les hypothèses de travail ont montré que les non-résidents dont les revenus sont situés entre 27 000 et 44 000 euros auraient connu une très forte augmentation de leur imposition alors que pour ceux dont les revenus sont supérieurs à 150 000 euros, l’augmentation aurait été bien moindre.
Je m’étais engagé à remettre un rapport aux parlementaires. Il a été transmis aux députés et sénateurs représentant les Français de l’étranger au cours du mois de juillet. Il explorait trois scénarios. L’un d’eux consistait, après le moratoire sur la suppression de la retenue à la source partiellement libératoire, à maintenir cette retenue. D’autres scénarios consistaient à élaborer des barèmes, à calculer des décotes, à instaurer des crédits d’impôt, toutes mesures qui nous ont paru extrêmement complexes sans offrir la garantie de répondre aux attentes des contribuables non-résidents.
Le Gouvernement est donc favorable aux amendements identiques. Nous nous étions engagés à trouver un terrain d’entente avec les représentants des Français de l’étranger pour aboutir à une solution – je crois que c’est le cas aujourd’hui. Celle-ci ne remet pas en cause le reste de la réforme, ce qui est essentiel en termes de progressivité et de justice fiscale, mais cela évite de mettre en place une réforme qui, malgré beaucoup de bonnes intentions, aurait été contreproductive.
Je suis également favorable au sous-amendement.
Mme la présidente
La parole est à M. Meyer Habib, pour soutenir l’amendement no 535.
M. Meyer Habib
Si vous me le permettez, monsieur le ministre, je dirai : « Tout ça pour ça ! ». Il aura fallu attendre deux ans pour que votre gouvernement et votre majorité renoncent enfin à cette mauvaise réforme de l’impôt sur les revenus des non-résidents. Deux ans de discussions, de débats, avec l’adoption d’un moratoire il y a un an et la remise d’un rapport en juillet dernier. Deux ans d’anxiété pour les 220 000 foyers fiscaux concernés, parmi lesquels on trouve des retraités, des gens de condition très modeste, qui voyaient se profiler une nouvelle injustice fiscale.
Après des hésitations palpables, le 6 octobre en commission des finances, vous avez heureusement fait marche arrière en maintenant la retenue à la source spécifique partiellement libératoire.
Je rappelle tout de même que dès 2019, avec mes collègues sénateurs des Français de l’étranger du groupe Les Républicains, nous avons demandé le retrait de cette réforme fiscale qui prévoyait d’appliquer aux non-résidents un taux d’imposition de 20 % dès le premier euro. Concrètement, cela aurait entraîné pour certains foyers une imposition multipliée par deux, par trois, voire par dix. Et qui auraient été les plus touchés ? Vous l’avez dit, monsieur le ministre, les plus modestes.
Le 19 septembre 2019, j’écrivais déjà à Gérald Darmanin, votre prédécesseur, pour dénoncer cette bombe fiscale. Il y a deux ans, en deuxième lecture, j’étais seul dans cet hémicycle, chers collègues des Français de l’étranger, pour demander le retrait pur et simple de ce dispositif – seul !
Mon amendement no 535 réitère cette demande qui, semble-t-il, est acceptée. Monsieur le ministre, je m’en félicite. Nous n’allons pas faire la fine bouche : mieux vaut tard que jamais !
Si vous me le permettez, madame la présidente, j’ajouterai que la question de la CSG et de la CRDS sur les revenus du capital des personnes affiliées à un régime étranger de sécurité sociale dans un État autre qu’un État membre de l’Union européenne reste posée. Mais nous y reviendrons peut-être un peu plus tard.
(Le sous-amendement no 2931 est adopté.)
(Les amendements identiques nos 1119, 1886 et 535, sous-amendés, sont adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 703, 225 et 1546, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 225 et 1546 sont identiques.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 703.
Mme Marie-Christine Dalloz
Cet amendement porte sur la demi-part des veufs et des veuves.
En politique, il faut toujours savoir reconnaître ses erreurs. Je voudrais resituer la suppression de cette demi-part dans son contexte. Comme la crise de 2008 était intervenue, la date de l’entrée en vigueur de cette mesure avait été repoussée, mais sa mise en application a créé un véritable séisme fiscal – je pèse mes mots. Fort de cette expérience, le gouvernement d’alors avait décidé de rétablir cette demi-part pour les personnes ayant élevé seules un enfant pendant cinq ans.
Pour lutter contre la paupérisation des populations âgées, une solution simple pourrait être de rétablir le bénéfice de cette demi-part pour tous les veufs et veuves ayant élevé au moins un enfant, sans référence à une période de cinq ans.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 225.
M. Fabrice Brun
Défendu !
Mme la présidente
La parole est à M. Ludovic Pajot, pour soutenir l’amendement no 1546.
M. Ludovic Pajot
La perte d’un conjoint ou d’une conjointe est un événement dramatique. Cette disparition, outre la souffrance affective qu’elle engendre, peut avoir des conséquences financières et matérielles lourdes pour celui ou celle qui survit.
Si le droit des successions prend en considération cette situation, en exonérant d’impôt le conjoint survivant, des anomalies persistent en matière de fiscalité des revenus. La suppression de la demi-part pour les veufs et les veuves est intervenue en 2014. Elle a eu pour effet soit de rendre imposables à l’impôt sur le revenu certains contribuables qui n’en étaient jusque-là pas redevables, soit de rehausser leur niveau d’imposition.
La condition imposée pour pouvoir bénéficier de cette demi-part supplémentaire, à savoir avoir supporté à titre exclusif ou principal la charge d’un enfant pendant au moins cinq ans, est une pénalité supplémentaire infligée à des retraités souvent modestes, pour lesquels le poids de toute fiscalité nouvelle est particulièrement difficile à supporter.
Comme cela vient d’être rappelé, plusieurs millions de nos compatriotes ont été affectés par cette suppression. Dans le contexte de la crise sanitaire, à laquelle nos anciens sont particulièrement exposés et dont les conséquences risquent d’être particulièrement dures pour nos compatriotes les plus modestes, nous vous demandons de bien vouloir faire un geste significatif en rétablissant pleinement cette demi-part fiscale.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Pour moi, le débat sur la demi-part des veufs et des veuves est clos. Rappelons d’abord qu’elle n’a pas été supprimée brutalement : les gouvernements ont procédé à une sortie en sifflet, sur plusieurs années – je pense que vous vous en souvenez, madame Dalloz. Et puis, cette décision répondait à une raison de fond, elle n’a pas été prise uniquement parce qu’il y avait une crise – nous n’allons, pas du reste, commencer à hiérarchiser les crises, car nous sommes en train d’en vivre une qui est particulièrement violente.
Cette demi-part correspondait à une situation qui n’est plus la même aujourd’hui. Son attribution venait compenser une charge pesant sur le revenu. Soumettre par la suite son versement à la condition d’avoir élevé un enfant pendant au moins cinq ans était plus conforme à la période actuelle.
Il faut soutenir les personnes isolées, particulièrement lorsqu’elles sont âgées, je suis entièrement d’accord avec vous sur ce point. Il existe plusieurs dispositifs à cette fin. Je ne vais pas vous rappeler ce que nous avons fait pour le minimum vieillesse, qui a été augmenté plus que sous n’importe quel autre quinquennat. Les mesures de soutien aux plus vulnérables, nous en avons pris. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Ce n’est pas pour autant qu’il faut rétablir le dispositif dit de demi-part des veuves, qui ne paraît plus adapté à la situation actuelle. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Je suis défavorable à cet amendement pour les raisons exposées par M. le rapporteur général, et j’ajoute que la suppression progressive avait été assortie de plusieurs mesures d’accompagnement, voire de compensation. Je pense notamment à une mesure déjà mise en place précédemment, et renouvelée à partir de 2018 à l’initiative du député Sacha Houlié, visant à ce que l’éligibilité à l’impôt de veufs ou de veuves ne bénéficiant pas, dans le nouveau système, de la demi-part dont ils bénéficiaient auparavant, ne les conduise pas à être assujettis à la taxe d’habitation et à la contribution à l’audiovisuel public.
Depuis 2018, nous reconduisons ce dispositif d’année en année dans le cadre des lois de finances rectificatives, et nous avons l’intention de continuer à le faire. Je suis donc, je le répète, défavorable à cet amendement.
(L’amendement no 703 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 225 et 1546 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 863 et 95, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 863.
M. Dino Cinieri
Cet amendement prévoit le bénéfice de la demi-part supplémentaire du quotient familial à toute veuve d’ancien combattant âgée de plus de 64 ans.
Mme la présidente
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 95.
M. Fabrice Brun
Depuis la dernière loi de finances, les veuves d’anciens combattants peuvent bénéficier de la demi-part, à condition qu’elles soient âgées de plus de 74 ans et que leur conjoint, qui percevait une pension militaire ou était titulaire de la carte du combattant, soit décédé après son 74e anniversaire. Le présent amendement vise à ce que la condition d’âge soit ramenée de 74 ans à 70 ans.
Mme la présidente
Sur l’amendement no 1164, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 863 et 95 ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Nous avons adopté l’année dernière une mesure constituant une avancée significative…
Plusieurs députés des groupes LaREM et LR
Grâce à M. Dufrègne !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
C’est grâce à un amendement de M. Dufrègne, effectivement, qu’il n’est plus nécessaire que le défunt ait atteint l’âge de 74 ans pour que sa veuve bénéficie de la demi-part – étant précisé qu’elle-même doit toujours avoir au moins 74 ans, et que le défunt doit avoir perçu une retraite d’ancien combattant.
Si je salue cette avancée, j’estime que nous devons en rester là. Certes, il persiste un effet de seuil qu’on peut trouver injuste, mais il l’est toujours moins que l’effet de seuil résultant de l’âge du conjoint lors de son décès : il était particulièrement dur quand le décès d’un ancien combattant à 73 ans privait sa veuve de la demi-part. Je suis donc défavorable à ces amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis.
(Les amendements nos 863 et 95, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 1164.
M. Jean-Paul Dufrègne
Comme vient de le dire M. le rapporteur général, nous avons adopté l’an dernier un amendement qui a permis aux veuves dont le mari était décédé avant d’atteindre l’âge de 74 ans de bénéficier d’une demi-part fiscale supplémentaire. Cependant, dans notre empressement, nous avons rédigé cet amendement en recourant au mot « veuves », ce qui était restrictif. Afin d’y remédier, nous proposons de remplacer ce mot par la locution « conjoints survivants ».
En effet, dans certains cas l’ancien combattant était une femme, dont le veuf se trouvait exclu du dispositif. Nos armées accueillant en leur sein de plus en plus de femmes, cette situation qui concerne peu de veufs pour le moment va devenir de plus en plus fréquente. Le présent amendement vise à remédier à notre oubli initial.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Si je comprends bien, monsieur Dufrègne, vous proposez un amendement en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes ?
M. Jean-Paul Dufrègne
Tout à fait !
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Qui pourrait être défavorable à un tel amendement ? Je vous donne donc un avis tout à fait favorable (Applaudissements sur divers bancs), d’autant qu’il y a effectivement de plus en plus d’engagées
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Je confirme ce qu’a dit M. Dufrègne, en précisant que la notion de conjoint survivant couvre tous les couples : aussi bien les femmes engagées qui auraient un mari ou une épouse que les hommes engagés qui auraient un mari ou une épouse.
M. Jean-Paul Dufrègne
Tout à fait !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Cela dit, la doctrine administrative couvre déjà parfaitement la situation que vous évoquez, dans la mesure où la pension est servie aussi bien aux veufs qu’aux veuves. Votre amendement est donc satisfait. J’émets toutefois un avis favorable afin que l’adoption de votre proposition, sans avoir pour effet de modifier vraiment le droit, le rende plus clair.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1164.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 71
Nombre de suffrages exprimés 71
Majorité absolue 36
Pour l’adoption 70
Contre 1
(L’amendement no 1164 est adopté.)
Plusieurs députés sur tous les bancs
Qui a voté contre ? On veut son nom ! (Sourires.)
Mme la présidente
C’est peut-être une erreur de saisie, chers collègues…
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 490.
M. Dino Cinieri
La demi-part supplémentaire qui revient de droit aux veuves d’anciens combattants est restituée de manière différenciée en fonction de la date de décès de leur époux. La distinction faite sur ce critère est injustifiable et entraîne des conséquences financières discriminatoires.
La date de décès de leur époux ne devrait en rien être le curseur d’application de la mesure. Le nier revient également à nier la reconnaissance par l’État de l’ancien combattant décédé avant ses 65 ans. Quel que soit l’âge du décès, la reconnaissance et les aides qui en découlent devraient être identiques.
Cette injustice est d’autant plus dure qu’elle repose sur une condition incontrôlable et très douloureuse pour la veuve. La perte prématurée de son époux ne devrait pas entraîner, en plus, la perte du seul avantage dont elle puisse bénéficier du fait de l’engagement de son époux. C’est pourquoi le présent amendement propose d’abaisser la condition d’âge à 70 ans, pour que les veuves puissent bénéficier de la demi-part fiscale supplémentaire.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées précédemment.
(L’amendement no 490, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l’amendement no 2860.
M. Julien Aubert
Notre collègue Cendra Motin nous a assuré tout à l’heure que toutes les idées étaient les bienvenues pour résoudre le problème de la dépendance. Cela tombe bien, j’en ai justement une à vous proposer, et je vous invite donc à « enfourcher le tigre », pour reprendre une expression chère au Président de la République.
Cette idée consiste à créer un « quotient solidarité aîné », qui permette de faire bénéficier d’une demi-part supplémentaire tout contribuable qui accueille sous son toit un ascendant en perte d’autonomie – sur le modèle du quotient familial, qui permet à un couple qui décide d’avoir des enfants de ne pas perdre de pouvoir d’achat – du moins en principe, c’est-à-dire avant le quinquennat de François Hollande…
En l’état actuel du droit, les conditions imposées pour bénéficier de la demi-part supplémentaire en cas d’accueil d’un ascendant en perte d’autonomie sont très sévères : il faut que cette personne soit invalide à 80 %, c’est-à-dire qu’elle soit classée GIR 1 ou GIR 2 dans la grille AGGIR – Autonomie Gérontologie Groupe Iso Ressources.
Notre amendement vise à assouplir ces conditions en exigeant simplement que la personne accueillie perçoive l’allocation personnalisée d’autonomie –APA –, ce qui correspond aux personnes classées GIR 1, GIR 2, GIR 3 et GIR 4. Une telle mesure aura pour effet d’encourager les Français à accueillir leurs ascendants chez eux sans que cela se traduise par une perte d’achat, et contribuera à faire évoluer la prise en charge de la dépendance vers un système basé sur le modèle familial plutôt que par des structures souvent décriées. J’espère, mes chers collègues, que cette proposition me vaudra vos acclamations ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Mme la présidente
Êtes-vous enclin à acclamer cet amendement, monsieur le rapporteur général ?
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général
Je ne suis pas sûr d’être moi-même acclamé quand je vous aurai dit qu’il existe déjà des dispositifs fiscaux tout à fait avantageux, destinés à ceux qui s’occupent de leurs ascendants à leur domicile. Je rappelle en effet que ces personnes peuvent bénéficier d’une déduction forfaitaire de 3 535 euros – les frais excédant cette somme pouvant être pris en charge sur production des justificatifs correspondants. Le contribuable est donc aidé par l’État quand il s’occupe de ses ascendants, dès lors que leur niveau de ressources les expose à des difficultés financières, y compris lorsqu’ils sont aidés à leur domicile.
Cet exemple n’en est qu’un parmi d’autres, qui constituent le système destiné à aider les foyers dans l’accompagnement de leurs aînés. Ce qu’il pourrait être intéressant d’envisager, c’est une éventuelle remise à plat – peut-être dans le cadre de la future loi « Grand âge et autonomie » – de l’ensemble des dispositifs fiscaux, sociaux et réglementaires s’appliquant à la prise en charge de la dépendance, afin de les rendre plus efficaces. En attendant, je suis défavorable à cet amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert
Il existe effectivement deux sortes de mesures destinées à accompagner la prise en charge d’ascendants au domicile d’un contribuable : d’un côté la demi-part fiscale supplémentaire, que je propose d’étendre, de l’autre la défiscalisation de la pension alimentaire que vient d’évoquer M. le rapporteur général. Cependant, je pense que c’est fromage ou dessert : on ne peut cumuler les deux.
Mon amendement porte uniquement sur la demi-part supplémentaire qui, en l’état actuel des choses, ne s’applique qu’à la prise en charge d’ascendants classés GIR 1 ou GIR 2, c’est-à-dire de personnes présentant un taux d’invalidité égal ou supérieur à 80 %, qui ne peuvent absolument pas vivre seules.
Il est vrai qu’on peut défiscaliser les pensions alimentaires, mais ce que vous avez oublié de nous dire, c’est qu’il y a une condition de ressources. En outre, il faut prouver que la pension a bien été versée, les dépenses effectuées, etc., afin de déduire le montant réel des versements au cas où on estime que la déduction forfaitaire est insuffisante. Je considère que ce que j’appelle le « quotient solidarité aîné » est plus simple à comprendre que ces mécanismes de déductions plafonnées qui nécessitent de produire tous ces justificatifs.
C’est en cela que je ne suis pas d’accord avec votre argumentation. Ma solution est une simplification : on met de côté les personnes relevant des GIR 5 et 6, qui souffrent d’une faible dépendance, pour se concentrer sur les bénéficiaires de l’APA. Il suffirait d’être allocataire de l’APA pour avoir droit à la demi-part fiscale. On toucherait ainsi tous ceux dont le taux d’invalidité est d’au moins 60 %, sans distinction au sein des bénéficiaires de l’APA, car tous ont besoin que leur descendance s’occupe d’eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Vous proposez donc d’étendre la définition du foyer fiscal afin d’y intégrer les revenus des personnes en question ? Êtes-vous sûr de votre calcul ?
(L’amendement no 2860 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
4. Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2021.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Serge Ezdra